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Du droit français au jus commune

 

Les rapports historiques que Nice et sa province entretiennent avec le droit français sont très limités. Ils se limitent aux 22 années de l’époque révolutionnaire et impériale et à la période qui suit le rattachement de 1860. Pour l’essentiel l’environnement juridique est donc « étranger ». Qualifions le plus exactement de jus commune , un droit que l’on peut très abruptement définir ainsi :on applique le droit propre sous forme de statut ou de coutume, apparemment comme en France mais le droit romain est applicable ici de façon effective, non seulement de manière supplétive mais aussi, et surtout, subsidiaire. Cette pratique produit un jus commune exprimé par la jurisprudence des docteurs et des cours souveraines évoluant dans l’environnement très international d’une sorte de respublica jurisconsultorum. Ajoutons à cela que pendant cinq siècles le Comté de Nice évolue dans le cadre institutionnel et politique des Etats de Savoie et que là encore les approches ne sont pas celles du royaume de France. Là aussi on évolue dans un droit étranger.

On est donc, dans tous les domaines du droit public et du droit privé, bien loin des méthodes, sinon des solutions juridiques du droit français. Il faut avouer que pour un historien du droit français la situation est peu agréable. Il ne trouvera pas dans les archives locales de quoi illustrer et approfondir ce qu’il a appris …et ce qu’il enseigne à ses étudiants !

Et si c’était une chance ou au moins une opportunité ? Ces archives, souvent démembrées des archives d’Etat de Turin, offrent la possibilité d’étudier ce jus commune de façon concrète. Ajoutons que la Faculté de droit de Nice possède une bibliothèque de près de 300 ouvrages de jus commune et on comprendra qu’il était tentant d’aborder le sujet. La littérature sur le jus commune, principalement italienne, est abondante. Les travaux des collègues piémontais sur le droit et les institutions des Etats de Savoie sont nombreux. J’avais une petite expérience à partir de mes recherches en droit de la mer d’une part et en droit féodal d’autre part. Le classement des archives du Sénat de Nice m’a offert l’occasion de découvrir les registres de decisiones, c'est-à-dire d’arrêts motivés, de la cour niçoise. On se trouve là plongé dans l’univers du jus commune. Rédigés en latin…jusqu’au début du XIXe siècle !, longs de plusieurs pages, ces arrêts sont difficiles à pénétrer. Il reste, lorsque on y parvient, et lorsque ils sont rédigés par un bon juriste, la satisfaction de se trouver au centre d’un système de citations qui fait de l’arrêt le plus secondaire une petite somme juridique. En ce sens les études qui suivent souhaitent  encourager la recherche dans ces matériaux de jurisprudence.

Sommaire jus commune

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