Louis XVI. Assemblées des chambres du Parlement de Paris. 11 avril-7 mai 1788
 
 
 
 

Les procès-verbaux des Assemblées des chambres

 du Parlement de Paris-Cour des pairs

 

 11 avril- 7 mai 1788 

 
Archives nationales
  X1B  8988, pour la période du 1er février 1788 au 9 mai 1788
 
Assemblées des chambres des 
1.          11 avril
2.          12 avril
3.          15 avril
4.          17 avril
5.          18 avril
6.          22 avril
7.          29 avril
8.            30 avril
9.          3 mai
10.                       5 mai
11.                       7 mai
 
 
 Michel Bottin
Mise en ligne septembre 2012
 
Pour citer : Michel Bottin, Les procès-verbaux des Assemblées des chambres du Parlement de Paris-Cour des pairs. 11 avril7 mai 1788, Michel-Bottin.com, 2012.
 
       
        Les procès-verbaux des Assemblées des chambres du Parlement de Paris sont peu exploités, hormis bien entendu les extraits publiés par Jules Flammermont, Remontrances du Parlement de Paris au XVIIIe siècle, T. 3, Paris, 1908.
Sans doute sont-ils répétitifs et formalistes. Ils présentent toutefois l’avantage de coller de très près à l’actualité et d’éclairer des questions qui ont peu intéressé les contemporains. Peut-on avancer qu’ils sont plus « objectifs » ? Ils forment en tout cas un utile complément aux gazettes et aux mémoires. C’est ce qui peut justifier cette publication.
        Cette série de onze Assemblées des chambres -en moins d’un mois !- couvre un moment clé de l’histoire de la Pré Révolution. On entre dans cette période cruciale que Jean Egret appelle « La révolte de la Cour des pairs ». Elle aboutit aux Edits de mai et à la mise à l’écart des parlements. Cette histoire politique est connue. Ces procès-verbaux permettent toutefois d’éclairer certains aspects des relations, de plus en plus difficiles, entre le roi et son Parlement. Ils posent le cadre juridique du dialogue et de la confrontation. On quitte l’histoire politique pour l’histoire institutionnelle et juridique. Et la lecture de ces procès-verbaux montre que ces magistrats sont de bons juristes. Peut-être trop d’ailleurs. Les ministres ont moins de scrupules.
        Le chercheur trouvera ici l’intégralité des procès-verbaux -y compris les ratures [i] - mais on n’a pas jugé utile de retranscrire les parties publiées par Flammermont. Des liens y renvoient.
 
        Sur les Assemblées de chambres de la période pré révolutionnaire :
 
Résumé des événements
19 novembre 1787 : le Parlement enregistre, en présence de Louis XVI, la première tranche d’un grand emprunt quinquennal qui sort les finances publiques de l’embarras pour l’année 1788.  Mais aussitôt le roi sorti, la Cour vote un arrêté dénonçant l’illégalité de l’enregistrement. Deux études d’Isabelle Brancourt sur cet événement :
20 novembre : trois lettres de cachet punissent les meneurs de l’opposition à l’arrêt et les instigateurs de l’arrêté : une pour le duc d’Orléans placé en « exil » dans son château de Villers-Cotterêts, une pour le conseiller Sabatier incarcéré au Mont-Saint-Michel et une troisième pour le conseiller Fréteau, conduit à la citadelle de Doullens. Les sanctions seront progressivement levées à partir du mois suivant.
21 novembre : le roi supprime l’arrêté. Tous les textes : discours du roi, discours du garde des Sceaux Lamoignon, discours de Tandeau rapporteur, édit et annexes, arrêté du Parlement du 19, réponse du roi du 21, dans « Tableau de la séance du 19 novembre 1787... », 1787, 64 p.
22 novembre : la Cour décide des remontrances sur la « forme de la séance tenue par le roi » le 19. Des commissaires sont nommés pour les rédiger.
         23 novembre : l’Assemblée des chambres ne s’accorde pas sur le texte des remontrances présenté par les commissaires.
        Peu à peu le conflit s’apaise. Loménie de Brienne a réussi à placer l’emprunt. L’hiver est occupé par l’enregistrement de l’édit concernant l’état-civil des non-catholiques, par un conflit récurrent sur l’usage des lettres de cachet et par le projet de réforme de la législation criminelle.
11 avril 1788 : cinq mois après leur nomination les commissaires réussissent à porter à l’ordre du jour de l’Assemblée des chambres un projet de remontrances sur la forme de la séance du 19 novembre et sur la suppression par le roi de l’arrêté de protestation. L’auteur présumé est Duval d’Eprémesnil, un conseiller des Enquêtes. Les remontrances sont votées. Cette position remet indirectement en cause la levée de la deuxième tranche de l’emprunt à l’automne prochain.
17 avril : le roi reçoit la grande délégation du Parlement et leur donne sa réponse. Elle est sévère.
22 avril : Le Parlement nomme des commissaires pour rédiger une réponse à la réponse du roi.
29 avril : Goislard de Monsabert, conseiller aux Enquêtes, réussit à faire voter un arrêté dénonçant les nouvelles pratiques de perception de vingtièmes.
30 avril : les commissaires nommés le 22 avril réussissent à faire voter leur texte. Les itératives remontrances haussent le ton : « La réponse de V.M. du 17 avril est affligeante … ».
3 mai : Duval d’Eprémesnil fait voter un arrêté très politique : « ….Considérant que les entreprises des ministres contre la Magistrature ont évidemment pour cause le parti qu’a pris la Cour de résister à deux impôts désastreux… ».
4 mai : arrêt du Conseil cassant les arrêtés du 29 avril et 3 mai. Lettres de cachet décrétant l’arrestation des conseillers Duval et Goislard.
5 mai : La mémorable séance des 30 heures. Le ministère est passé à l’offensive et veut arrêter Goislard et Duval, au besoin dans l’enceinte même du Palais. Les gazetiers ont appelé cet épisode « Le siège du Palais ».
7 mai : Le lit de justice est annoncé pour le lendemain. Les magistrats semblent connaître certains détails des réformes portées à l’enregistrement ; elles bouleversent l’organisation de la justice. Le Parlement élève une nouvelle protestation.
8 mai : le Parlement est à Versailles pour assister au lit de justice au cours duquel les Edits de mai sont enregistrés. La constitution de la Cour plénière en est l’élément central.
 
        La contestation de la légalité de la séance du 19 novembre 1787 apparaît donc comme le fil rouge de la période. La question du déficit domine indirectement tous les autres problèmes et finit par se déplacer vers le débat constitutionnel. En sanctionnant Duval et Goislard le ministère ne se trompait donc pas de cible. Le premier a mené avec détermination la bataille contre la légalité de l’emprunt. Le second a contesté la nouvelle application des vingtièmes. Or ces deux recettes étaient à la base de la politique de redressement budgétaire entreprise par Loménie de Brienne. Le Parlement de Paris devenait ainsi un danger majeur pour la mise en œuvre de cette politique. Le transfert de ses compétences législatives, fiscales et financières à la Cour plénière pouvait seul sortir le ministère de l’embarras.
Du vendredi onze avril
mil sept cent quatre-vingt huit
du matin
toutes les chambres assemblées
les pairs y séant
 
                 Premier Président                                         
     M. Etienne François d’Aligre,                           
                   Présidents                                                               
 M. Louis François de Paule le Fèvre d’Ormesson           
M. Arnaud Guillaume François de Gourgue               
M. Louis Le Peletier de Rozambo                               
M. Omer Joly de Fleury                                            
M. Pierre Gilbert de Voisins                                    
M. Barillon      Conseiller d’honneur                        
 Pairs de France, Messieurs                                                                         
Le Duc de Fronsac                                                      
Le Duc de Noailles
Le Duc de Gesvres
Le Duc d’Aumont
Le duc de Choiseul
Le Duc de Praslin
Le Duc de La Rochefoucauld
         Conseillers de la Grand’ Chambre, Messieurs             
Duport, Dupuis, d’Haringhe, Nouet, Lefebvre, Dionis, Titon, Bougongne, de Glatigny, Bruant, Serre, d’Outremont, Fourmestraux, Tandeau, Clement, Robert, Bourgevin, Lecoigneux, Fredy, Pasquier, Phelyppe, Camus, Barbier, Clement, Delpech, Leriche, Langlois, Amelot,Mauperché,Lescalopier,Constance,Chupin                                      
         Messieurs les Présidents des Enquêtes & Requêtes
Roland, Dompierre, Chabenat, Dutrousset, Le Rebours
         Messieurs Conseillers des Enquêtes et Requêtes
Dudoyer, Ferrand, Brisson, de Gars, Molé, Goislard, Salamon, Lamoignon, Boula, Lambert, Le Roy, Duval, Huguet, Lechanteur, Duport, Robert, De Villiers, Masson, Anjorrand, Guerrier, Tabary, Boula, Duchesne, Louis, Hanmer, Brochand, de Villiers, Dupont, Noblet, Foullon, Chasseing, Defay, Oursin, Merceron, Sagnier, Talon, Lefevre, Bourgevin, Leclerc, Cadot, Geoffroy, Pasquier, Rossignol, La Bletonnière, Dupleix, Agard, Depont, Paris, Titon, Chupin, Tourolle, Morel, Berulle, Fourmestraux, Geoffroy, Chambry, Desponty, Roland, Boissel, Sahuguet, Bodkin, Barême, Perré, Barberé  [ii]
      
         Ce jour, à la levée de la seconde audience, les chambres ont été averties en la manière accoutumée. Les chambres assemblées, Messieurs les Pairs ci-dessus nommés venus successivement en la Cour ayant pris séance ainsi que Messieurs les Présidents, Conseiller d’honneur, Conseillers-Présidents des Enquêtes et Requêtes et Conseillers des Enquêtes et Requêtes, et ce en la manière énoncée au procès-verbal du sept décembre mil sept cent quatre-vingt-sept, et s’étant placés comme il est marqué audit procès-verbal, Monsieur le Premier Président a dit que Messieurs les Commissaires nommés le vingt-deux novembre dernier pour la rédaction des remontrances arrêtées ledit jour, tant sur la forme de la séance tenue par le roi le dix-neuf dudit mois de novembre que sur la partie du discours du roi du vingt un du même mois relative à l’arrêté pris après ladite séance du dix-neuf novembre et à l’improbation de l’usage des arrêtés sur le registre, avaient fini leur travail ; qu’il en avait été rendu compte dans les chambres et que si Messieurs les jugeaient à propos, il serait fait lecture desdites remontrances.
         Lecture faite desdites remontrances et la matière sur ce mise en délibération ; les voix prises en la manière accoutumée lorsqu’il n’y a point de rapporteur, ainsi que cela est énoncé au procès-verbal du vingt novembre dernier  [iii].
         Lesdites remontrances ont été adoptées et il a été arrêté qu’il en sera fait minute, laquelle sera signée par Monsieur le Premier Président et se trouvera au registre particulier de ce jour, et il a été arrêté en outre qu’il serait fait au roi une députation en la forme ordinaire et que les gens du roi seraient chargés de se retirer par devant ledit seigneur roi à l’effet de savoir le jour le lieu et l’heure où il lui plaira recevoir les très humbles et très respectueuses remontrances  arrêtées le vingt-deux novembre dernier tant sur la forme de la séance tenue par le roi le dix-neuf du dit mois de novembre que sur la partie du discours du roi du vingt un du même mois relative à l’arrêté pris après ladite séance du dix-neuf novembre et à l’improbation de l’usage des arrêtés sur le registre.
         Les gens du roi à l’instant mandés, entrés et placés, debout et découverts, Monsieur le Premier Président leur a fait entendre le susdit arrêté, à quoi ils ont répondu, Monsieur Antoine Louis Séguier, avocat dudit seigneur roi portant la parole, qu’ils ne manqueraient pas d’obéir aux ordres de la Cour.
Et lesdits gens du roi retirés
La Cour s’est levée.
D’Aligre
 
Les remontrances suivent le procès-verbal.
Publiées par Jules Flammermont, Remontrances du Parlement de Paris au XVIIIe siècle, T. 3, Paris, 1908, pp. 721-734 :« Sire, la liberté publique, attaquée dans son principe, le despotisme substitué à la loi de l’Etat, la magistrature enfin réduite à n’être plus que l’instrument du pouvoir arbitraire, tels sont les grands et douloureux objets qui ramènent votre parlement au pied du trône. Etc. »
 
Du samedi douze avril
mil sept cent quatre-vingt huit
de relevée
toutes les chambres assemblées
 
             Premier Président                                          
     M. Etienne François d’Aligre,                           
          Présidents                                                               
 M. Louis François de Paule le Fèvre d’Ormesson  
M. Jean Baptiste Gaspard Bochart de Saron        
M. Arnaud Guillaume François de Gourgue               
M. Louis Le Peletier de Rozambo                               
M. Omer Joly de Fleury                                           
M. Pierre Gilbert de Voisins                                    
M. Barillon        Conseiller d’honneur        
            Conseillers de la Grand’ Chambre, Messieurs            
Duport, Lefebvre, Titon, Nouet, de Glatigny, Bougongne, Serre, Fourmestraux, Clement, Bourgevin, Fredy, Pasquier, Phelyppe, Barbier, Delpech, Langlois, Chuppin, Dupuis, Dionis, Bruant, d'Outremont, Tandeau, Robert, Lecoigneux, Pasquier, Camus, Clement, Le Riche, Amelot, Lescalopier, Constance   
         Messieurs Présidents des Enquêtes & Requêtes
Roland, Dompierre, Chabenat, Anjorrant, Dutrousset, Le Rebours
         Messieurs Conseillers des Enquêtes et Requêtes
Dudoyen, Ferrand, Brisson, de Gars, Molé, Goislard, Salamon, Lamoignon, Boula, Lambert, Le Roy, Duval, Huguet, Le Chanteur, Duport, Robert, de Villiers, Masson, Anjorrand, Guerrier, Tabary, Boula, Duchesne, Louis, Hanmer, Brochand, de Villiers, Dupont, Noblet, Foullon, Chasseing, de Fay, Oursin, Merceron, Talon, Lefevre, Bourgevin, Leclerc, Cadot, Geoffroy, Pasquier, Rossignol, La Bletonnière, Duplex, Agard, Depont, Paris, Titon, Chupin, Tourolle, Morel, Berulle, Fourmestraux, Geoffroy, Chambry, Desponty, Roland, Boissel, Sahuguet, Bodkin, Bareme, Perré, Barberé
 
         Ce jour, six heures de relevée, toutes Chambres assemblées (les buvetiers des Chambres ayant été, par ordre de Monsieur le Premier Président, avertir Messieurs qu’il y aurait assemblée des chambres ce soir à six heures), Monsieur le Premier Président a dit que les gens du roi demandaient à entrer pour rendre compte à la Cour de la mission dont ils avaient été chargés par l’arrêté du jour d’hier.
         Les gens du roi à l’instant mandés, entrés et placés, debout et découverts, le procureur général du roi portant la parole,  ont dit que le roi recevrait demain treize de ce mois à Versailles à six heures du soir les remontrances que son Parlement a arrêté devoir lui faire le vingt-deux novembre dernier tant sur la séance tenue par le Roi en la Cour le dix-neuf dudit mois que sur la partie du discours du roi du vingt un du même mois relative à l’arrêté pris après ladite séance et à l’improbation de l’usage des arrêtés sur les registres, et que son intention était qu’elles fussent apportées par Monsieur le Premier Président et deux de Messieurs les Présidents seulement.
         Et se sont lesdits gens du Roi retirés.
         Eux retirés et la matière mise en délibération,
         Il a été arrêté que conformément aux intentions du roi, Monsieur le Premier Président et deux de Messieurs les Présidents se rendront à Versailles demain dimanche à six heures du soir à l’effet de présenter audit seigneur roi lesdites très respectueuses remontrances dont la minute a été signée le onze de ce mois et que les chambres seraient assemblées le mardi quinze du présent mois pour entendre la réponse du roi auxdites remontrances ; et collation faite à l’instant de la copie pour le roi sur la minute desdites remontrances, ladite copie a été signée par le greffier en chef.
         Après quoi la Cour s’est levée.
         D’Aligre
116
 
Du mardi quinze avril
mil sept cent quatre-vingt huit
du matin
toutes les chambres assemblées
les pairs y séant                
 
             Premier Président                                         
  M. Etienne François d’Aligre,                           
         Présidents                                                               
 M. Louis François de Paule le Fèvre d’Ormesson  
M. Jean Baptiste Gaspard Bochart de Saron        
M. Arnaud Guillaume François de Gourgue               
M. Louis Le Peletier de Rozambo                               
M. Omer Joly de Fleury                                           
M. Pierre Gilbert de Voisins                                    
M. Barillon        Conseiller d’honneur    
 Pairs de France, Messieurs                                                                         
Le Duc de Fronsac                                                      
Le Duc de Noailles
Le Duc de Gesvres
Le Duc d’Aumont
Le Duc de Choiseul
Le Duc de Praslin
Le Duc de La Rochefoucault
   
         Conseillers de la Grand ’Chambre, Messieurs            
Duport, Lefebvre, Titon, Nouet, de Glatigny, Bougongne, Serre, Fourmestraux, Clement, Bourgevin, Fredy, Pasquier, Phelyppe, Barbier,  Delpech, Langlois, Chuppin, Dupuis, Dionis, Bourgongne, Bruant, d'Outremont, Tandeau, Robert, Lecoigneux, Pasquier, Camus, Clement, Le Riche, Amelot, Lescalopier, Constance   
         Messsieurs Présidents des Enquêtes & Requêtes
Roland, Dompierre, Chabenat, Anjorrant, Dutrousset, Le Rebours
         Messieurs Conseillers des Enquêtes et Requêtes
Dudoyen, Ferrand, Brisson, de Gars, Molé, Goislard, Salamon, Lamoignon, Boula, Lambert, Le Roy, Duval, Huguet, Le Chanteur, Duport, Robert, de Villiers, Masson, Anjorrand, Guerrier, Tabary, Boula, Duchesne, Louis, Hanmer, Brochand, de Villiers, Dupont, Noblet, Foullon, Chasseing, de Fay, Oursin, Merceron, Talon, Lefevre, Bourgevin, Leclerc, Cadot, Geoffroy, Pasquier, Rossignol, La Bletonnière, Duplex, Agard, Depont, Paris, Titon, Chupin, Tourolle, Morel, Berulle, Fourmestraux, Geoffroy, Chambry, Desponty, Roland, Boissel, Sahuguet, Bodkin, Bareme, Perré, Barberé
 
         Ce jour à l’issue de l’audience du rôle, les chambres ont été averties en la manière accoutumée pour l’assemblée remise à ce jour d’hui par l’arrêté du douze de ce mois.
         Les chambres assemblées, Messieurs les Pairs ci-dessus nommés venus successivement en la Cour ayant pris séance ainsi que Messieurs les Présidents, Conseiller d’honneur, Conseillers de Grand ’Chambre, Conseillers-Présidents des Enquêtes et Requêtes et Conseillers des Enquêtes et Requêtes, et ce en la manière énoncée au procès-verbal du sept décembre mil sept cent quatre-vingt-sept et s’étant placés comme il est marqué audit procès-verbal, Monsieur le Premier Président a dit  qu’en exécution des ordres du roi et de l’arrêté de la Cour du douze de ce mois, il s’était rendu dimanche dernier  à Versailles avec Monsieur le Président Lefevre et Monsieur le Président de Gourgue ; que vers les sept heures du soir ils avaient été introduits dans le cabinet du roi où il était environné de ses ministres, et que s’étant approchés de sa personne, il avait eu l’honneur de lui présenter les très humbles et très respectueuses remontrances  arrêtées le dix-neuf novembre mil sept cent quatre-vingt-sept tant sur la forme de la séance tenue par le roi en son Parlement le dix-neuf du même mois que sur la partie du discours du roi du vingt un du même mois relative à l’arrêté pris après ladite séance du dix-neuf novembre et à l’improbation de l’usage des arrêtés sur le registre ; que le roi les avait prises et leur avait fait l’honneur de leur dire qu’il ferait connaître ses intentions.
         La matière sur ce mise en délibération.
         Il a été arrêté qu’il serait fait procès-verbal du récit fait par Monsieur le Premier Président.
         Et la Cour s’est levée.
         D’Aligre
 
 
Du jeudi dix-sept avril
mil sept cent quatre-vingt huit
sept heures et demie du matin
toutes les chambres assemblées
 
                 Premier Président                                         
     M. Etienne François d’Aligre,                           
         Présidents                                                              
M. Louis François de Paule le Fèvre d’Ormesson  
M. Jean Baptiste Gaspard Bochart de Saron        
M. Arnaud Guillaume François de Gourgue               
M. Louis Le Peletier de Rozambo                               
M. Omer Joly de Fleury                                           
M. Pierre Gilbert de Voisins  
M. Louis Michel Le Peletier de Saint Fargeau                                  
M. Barillon        Conseiller d’honneur    
    Conseillers de la Grand ’Chambre, Messieurs            
Duport, Lefebvre, Titon, Nouet, de Glatigny, Dupuis, Bougongne, Serre, Fourmestraux, Fredy,  Phelyppe, Barbier, Langlois, Chuppin, Dionis,  d'Outremont, Tandeau, Robert, Lecoigneux, Le Riche, Constance, Mauperché
         Messsieurs Présidents des Enquêtes & Requêtes
Chabenat, Dutrousset, Le Rebours
         Messieurs Conseillers des Enquêtes et Requêtes
Masson, Ferrand, Salamon, Molé, Huguet, Agard, Barberé, Sallier, Le Clerc, Rossignol, Perrotin, Talon, Pasquier, Sahuguet, Roger, Talon, Geoffroy, Bodkin, Lefèvre, Tabary, Boula, Louis, Chasseing, Dudoyen, Lechanteur, Foumestraux, Cadot
 
         Ce jour, après l’audience de sept heures, toutes les chambres assemblées, Messieurs ayant été avertis par leurs buvetiers qui en avaient reçu l’ordre de Monsieur le Premier Président qu’il y avait assemblée des chambres ce matin à sept heures et demie, Monsieur le Premier président a dit que les gens du roi demandaient à entrer.
         Eux entrés et placés debout et couverts, Me Antoine Louis Séguier avocat dudit seigneur roi portant la parole, ont dit qu’ils apportaient à la Cour une lettre de cachet du roi portant que l’intention dudit seigneur roi était que la grande députation de son Parlement formée en la manière accoutumée se rendit à Versailles près de sa personne ce jour d’hui à  onze heures du matin avec les avocats et procureur généraux, pour y recevoir ses ordres ; laquelle lettre ils laissaient à la Cour ; et se sont les gens du roi retirés, après avoir laissé ladite lettre sur le  bureau.
         Eux retirés.
         Lecture faite de ladite lettre de cachet du roi dont la teneur en suit :
         « De par le Roy,
         « Nos amés féaux. Nous vous faisons cette lettre pour vous dire que notre intention est que la grande députation de notre Parlement, formée en la manière accoutumée, se rende ici près de nous demain jeudi dix-sept de ce mois à onze heures du matin, avec nos avocats et procureur généraux pour y recevoir nos ordres. Si n’y faites faute, car tel est notre plaisir. Donné à Versailles le 16 avril 1788 ». Signé Louis. Et plus bas, le Baron de Breteuil.
         La matière sur ce mise en délibération :
         Il a été arrêté que, conformément aux ordres du roi, il serait député avec Messieurs les Présidents, douze de Messieurs de Grand ’Chambre et trois de chacune des chambres des Enquêtes et Requêtes, lesquels, avec Messieurs les Présidents, les gens du roi, le greffier en chef et un secrétaire de la Cour se rendront aujourd’hui à onze heures à Versailles, et que les chambres seraient assemblées demain vendredi dix-huit de ce mois  à dix heures du matin pour entendre la réponse du roi.
         Et Monsieur le Premier Président a nommé pour députés de la Grand ’Chambre Messieurs Bourgongne, Bourgevin, Lecoigneux et Constance conseillers clercs et Messieurs Duport, Titon, Fredy, Glatigny, Robert, Dupuis, Nouet et Le Riche conseillers lays, lesquels avec Messieurs les Présidents et Messieurs les députés des Enquêtes et Requêtes au nombre de trois de chaque  chambre se sont levés et, précédés de M. le Greffier en chef qui marchait seul, de M. François Louis Du Franc, secrétaire de la Cour, et suivis des gens du roi qui avaient été avertis du départ de Messieurs les députés, sont sortis par le parquet des huissiers, ont traversé la grande salle accompagnés d’un détachement de la robe courte qu’ils ont trouvé à la porte extérieure dudit parquet des huissiers et sont descendus par le grand escalier de la cour de May au bas duquel ils ont trouvé leurs voitures et dans lesquelles ils sont montés suivant l’ordre accoutumé, toujours accompagnés d’un détachement de la robe courte.
         D’Aligren
116
 
Du vendredi dix-huit avril
mil sept cent quatre-vingt huit
du matin
toutes les chambres assemblées
les pairs y séant
 
                 Premier Président                                         
     M. Etienne François d’Aligre,                            
          Présidents                                                              
M. Louis François de Paule Le Fèvre d’Ormesson  
M. Jean Baptiste Gaspard Bochart de Saron                 
M. Arnaud Guillaume François de Gourgue               
M. Louis Le Peletier de Rozambo                               
M. Omer Joly de Fleury                                            
M. Pierre Gilbert de Voisins 
M. Louis Michel Le Peletier de Saint Fargeau                                 
         Conseillers d’honneur                         
M. Barillon
M. Le Pileur       
        Pairs de France, Messieurs
Le Duc d’Uzès
Le Duc de La Tremoille
Le Duc de Piney Luxembourg
Le Duc de Mortemart  
Le Duc de Gesvres                                                                    
Le Duc de Noailles
Le Duc d’Aumont
Le Duc de Fitz-James
Le Duc de Choiseul
Le Duc de Praslin
Le Duc de La Rochefoucault
         Conseillers de la Grand ’Chambre, Messieurs            
Duport, Dupuis, d’Haringhe, Nouet, Lefebvre, Dionis, Titon, Bougongne, de Glatigny, Bruant, Serre, d’Outremont, Fourmestraux, Tandeau,  Robert, Bourgevin, Lecoigneux, Fredy, Pasquier, Phelyppe, Camus, Barbier, Clement, Leriche, Langlois, Amelot, Mauperché, Lescalopier, Constance, Chuppin                                    
         Messsieurs Présidents des Enquêtes et Requêtes
Roland, Dompierre, Chabenat, Dutrousset, Le Rebours
         Messieurs Conseillers des Enquêtes et Requêtes
Masson, Dudoyer, Clement, Desponty, Ferrand, Anjorant, Guerrier, Tabary, Favières, Boula Duchesne, Brisson, Perrotin, Robert, Degars, Boula, Le Noir, Duval, Huguet, Duport, Goislard, Brochant, Devilliers, Dupont, Merceron, Noblet, Fagnier, Foullon, Oursin, Devilliers , Chasseing, De Fay, Talon, Lefevre, Salamon, Bourgevin, Morel, Rossignol, Digé, Chopin, Paris, Titon, Lamoignon, Agard, Dupleix, Depont, Pasquier, Tourolle, Geoffroy, Cadot, Le Clerc, Berulle, Fourmestraux, Roger, Robert, Louis, Chaubry, Esmangard, Lechanteur, Lambert, Le Roy, Roland, Barême, Boissel, Lambert, Bodkin, Geoffroy, Sallier, Sahuguet, Perré, Barberé
 
         Ce jour à l’issue de la seconde audience, les chambres ont été averties en la manière accoutumée pour l’assemblée indiquée  ce jour d’hui par l’arrêté du jour d’hier.
         Les chambres assemblées, Messieurs les Pairs ci-dessus nommés venus successivement en la Cour ayant pris séance ainsi que Messieurs les Présidents, Conseillers d’honneur, Conseillers de Grand ’Chambre, Conseillers-Présidents des Enquêtes et Requêtes et Conseillers des Enquêtes et Requêtes, et ce en la manière énoncée au procès-verbal du sept décembre dernier, et s’étant placés comme il est marqué audit  procès-verbal, Monsieur le Premier Président a dit qu’en exécution des ordres du roi et de l’arrêté de la Cour du jour d’hier, Messieurs les Présidents, Messieurs les députés de toutes les chambres, les gens du roi, Monsieur le Greffier en chef et un des secrétaires de la Cour étaient partis du Palais à la levée de l’assemblée des chambres vers les huit heures du matin escortés d’un détachement de la robe courte qu’ils avaient trouvé à la porte extérieure du parquet des huissiers, pour, conformément auxdits ordres du roi, se rendre à Versailles et y recevoir la réponse dudit seigneur roi aux remontrances arrêtées le vingt-deux novembre dernier tant sur la forme de la séance tenue par le Roi en sa Cour le lundi dix-neuf dudit mois que sur la partie du discours du Roi du vingt un du même mois relative à l’arrêté pris après ladite séance du dix-neuf novembre et à l’improbation de l’usage des arrêtés sur le registre ; que descendus par le grand escalier de la cour du May, ils étaient entrés dans leurs voitures qui les attendaient dans ladite cour, Monsieur le Premier Président dans son carrosse de cérémonie attelé de six chevaux avec Monsieur le Président Bochart  qui s’est assis dans la place du fond à sa gauche, devant lui Monsieur Bourgongne, conseiller clerc, et devant le Président Bochart, Monsieur Duport conseiller lay, comme étant les plus anciens de Messieurs les députés ; que devant son carrosse marchait immédiatement le carrosse de Monsieur le Greffier en chef aussi attelé de six chevaux où il était avec le secrétaire de la Cour lequel était précédé d’un carrosse pareillement attelé de six chevaux dans lequel étaient son écuyer et ses secrétaires ; et qu’après son carrosse suivaient ceux de Messieurs les Présidents et Conseillers et des gens du roi dans l’ordre accoutumé ; que tous ainsi montés dans leurs voitures étaient sortis, toujours escortés d’un détachement de la robe courte, par la grille de ladite cour du May et étaient passés par la rue de la Barillerie, la rue Saint Louis, le quai des Orfèvres, le Pont Neuf et le quai des Thuileries ; qu’ils avaient trouvé plusieurs brigades du Guet qui avaient été postées aux différents carrefours pour empêcher que la marche ne fut interrompue et en différents endroits sur la route des brigades de Maréchaussée qui leur ont rendu, ainsi que les brigades du Guet, les honneurs accoutumés ; qu’arrivés à Versailles sur les onze heures, ils étaient descendus de leurs voitures dans la cour des Princes et étaient entrés dans la salle des Ambassadeurs qu’on avait préparée pour les recevoir, à la porte de laquelle ils avaient trouvé les Suisses du Roi ; que vers les midi, Monsieur le Baron de Breteuil, Ministre et Secrétaire d’Etat, le grand maître,  le maître et l’aide des Cérémonies étant venus les avertir que le roi était prêt à les recevoir, ils étaient à l’instant sortis de la salle, marchant deux à deux, leur bonnet à la main, précédés de Monsieur le Greffier en chef qui marchait seul, et du secrétaire de la Cour et suivis des gens du roi, le premier président ayant à sa gauche M. le Baron de Breteuil et à sa droite le grand maître des Cérémonies, le maître des Cérémonies et l’aide des Cérémonies placés un peu en avant sur les côtés, et avaient passé par la cour qui conduit au grand escalier de marbre qu’ils avaient monté, avaient traversé les appartements et avaient été introduits dans la chambre du roi où il était assis dans un fauteuil derrière lequel était son capitaine des Gardes, ayant à sa droite Monsieur et à sa gauche Monsieur le Comte d’Artois, debout et découverts, après eux sur la même ligne les princes de son sang et derrière sa personne tous les ministres avec grand nombre de seigneurs de sa cour qui l’environnaient, à l’exception cependant de Monsieur le Garde des Sceaux qui était placé après Monsieur le Prince de Conty ; qu’entrés dans la chambre du roi et approchés de sa personne, après avoir fait les salutations ordinaires, le roi leur avait fait l’honneur de se découvrir au moment où ils étaient entrés dans sa chambre, s’étant recouvert à l’instant où la porte s’était fermée, leur avait fait celui de leur dire :
 
Réponse du roi dans Flammermont, Remontrances, op.cit., p. 735 : « ….Il était superflu de parler de la loi d’enregistrement et de la liberté des suffrages. Lorsque je viens tenir mon Parlement, c’est pour entendre la discussion de la loi que j’y apporte…. »
 
        
         Et que s’étant ensuite retirés, en regardant toujours la personne du roi, ils avaient été ramenés dans ladite salle des Ambassadeurs par les mêmes personnes et de la même manière qu’ils avaient été conduits ; après quoi ils étaient remontés dans leurs voitures et étaient partis pour Paris dans le même ordre qu’ils étaient venus et avaient trouvé sur la route les mêmes brigades de Maréchaussée qui y étaient lors de leur passage et qui leur avaient rendu les mêmes honneurs.
         La matière mise en délibération sur la réponse du roi, les voix prises en la manière accoutumée lorsqu’il n’y a point de rapporteur ainsi que cela est énoncé au procès-verbal du vingt novembre mil sept cent quatre-vingt-sept, il a été arrêté que la délibération serait continuée à mardi prochain vingt-deux de ce mois et que les princes et les pairs seraient avertis que ladite délibération sur la réponse du roi du dix-sept de ce mois aux remontrances arrêtés le vingt-deux novembre dernier tant sur la forme de la séance tenue par le Roi en sa Cour le lundi dix-neuf dudit mois que sur la partie du discours du roi relative à l’arrêté pris après ladite séance du dix-neuf novembre et à l’improbation de l’usage des arrêtés sur le registre, était continuée au mardi vingt-deux du présent mois.
         Et a été arrêté en outre que le secrétaire de la Cour qui sera chargé d’avertir Monsieur le Duc d’Orléans, lui témoignera la satisfaction que le Parlement a ressenti en apprenant qu’il était rendu à ses vœux.
         Et la Cour s’est levée.
         D’Aligre
Du mardi vingt-deux avril
mil sept cent quatre-vingt huit
du matin
toutes les chambres assemblées
les pairs y séant
 
                 Premier Président                                         
     M. Etienne François d’Aligre,                           
         Présidents                                                               
M. Louis François de Paule le Fèvre d’Ormesson  
M. Arnaud Guillaume François de Gourgue               
M. Louis Le Peletier de Rozambo                               
M. Omer Joly de Fleury                                            
M. Pierre Gilbert de Voisins 
M. Louis Michel Le Peletier de Saint Fargeau                                 
             Conseillers d’honneur                     
M. Barillon
M. Le Pileur       
               Pairs de France, Messieurs
Le Duc d’Uzès
Le Duc de Piney Luxembourg
Le Duc de Gesvres                                                                    
Le Duc d’Aumont
Le Duc de Charost
Le Duc de Saint Cloud
Le Duc de Fitz-James
Le Duc de Praslin
Le Duc de La Rochefoucault
Le Duc de Choiseul
Le Duc de Coigny
         Conseillers de la Grand ’Chambre, Messieurs            
Duport, Dupuis, d’Haringhe, Nouet, Lefebvre, Dionis, Titon, Bougongne, de Glatigny, Bruant, Serre, d’Outremont, Fourmestraux, Tandeau,  Robert, Bourgevin, Lecoigneux, Fredy, Pasquier, Phelyppe, Camus, Barbier, Clement, Leriche, Langlois, Amelot, Mauperché, Lescalopier, Constance, Chuppin, Delpech, Titon                                
         Messieurs Présidents des Enquêtes et Requêtes
Bourrée, Roland, Dompierre, Chabenat, Dutrousset, Le Rebours
         Messieurs Conseillers des Enquêtes et Requêtes
Masson, Dudoyer, Clement, Desponty, Ferrand, Anjorant, Guerrier, Tabary, Favières, Boula Duchesne, Brisson, Perrotin, Robert, Degars, Boula, Duval, Huguet, Duport, Goislard, Brochant, Devilliers, Dupont, Merceron, Fagnier, Foullon, Oursin, Devilliers , Chasseing, De Fay, Talon, Lefevre, Salamon, Rossignol, Chopin, Paris, Titon, Lamoignon, Agard, Dupleix, Depont, Pasquier, Tourolle, Geoffroy, Cadot, Le Clerc, Fourmestraux, Roger, Robert, Chaubry, Esmangard, Lechanteur, Lambert, Le Roy, Roland, Barême, Boissel, Lambert, Bodkin, Geoffroy, Barberé
 
         Ce jour à la levée de l’audience du rôle, les chambres ont été averties en la manière accoutumée pour l’assemblée remise à ce jour d’hui par l’arrêté du dix-huit  de ce mois.
Les chambres assemblées, Messieurs les Pairs ci-dessus nommés venus successivement en la Cour ayant pris séance ainsi que Messieurs les Présidents, Conseillers d’honneur, Conseillers de Grand ’Chambre, Conseillers-Présidents des Enquêtes et Requêtes et Conseillers des Enquêtes et Requêtes, et ce en la manière énoncée au procès-verbal du sept décembre dernier, et s’étant placés comme il est marqué audit  procès-verbal, Monsieur le Premier Président a dit que le procureur général du roi avait apporté ce matin à la Cour un édit du roi portant suppression de l’Arsenal, de son bailliage et de son gouvernement avec la lettre de cachet du roi envoyée sur icelui sur lequel il avait pris des conclusions par écrit, que la Grand ‘Chambre avait été assemblée pour y délibérer, qu’il y avait été arrêté que ledit édit serait porté aux chambres assemblées et que Monsieur Tandeau, rapporteur, voudrait bien en rendre compte.
         Lecture faite dudit édit et des conclusions du procureur général du roi par lui prises par écrit sur icelui et la matière sur ce mise en délibération, le compte d’icelui préalablement rendu par M. Tandeau, rapporteur, et les voix prises en la manière accoutumée lorsqu’il y a un rapporteur, ainsi que cela est énoncé au procès-verbal du sept décembre  [iv] dernier.
         L’enregistrement a été ordonné suivant l’arrêt particulier qui se trouve au registre de ce jour.
         Après quoi Monsieur le Premier Président a dit que Messieurs se rappelaient que par l’arrêté du dix-huit de ce mois la délibération avait été continuée à ce jour d’hui sur la réponse du roi aux remontrances arrêtées  le vingt-deux novembre dernier tant sur la forme de la séance tenue par le roi en sa Cour que sur la partie du discours dudit seigneur roi du vingt un du même mois relative à l’arrêté pris après ladite séance du dix-neuf novembre et à l’improbation de l’usage des arrêtés sur le registre, et que les princes et pairs avaient été avertis conformément audit arrêté du dix-huit de ce mois.
         Lecture faite de nouveau de ladite réponse du roi et la matière sur ce mise en délibération, les voix prises en la manière accoutumée lorsqu’il n’y a point de rapporteur, ainsi que cela est énoncé au procès-verbal du vingt novembre 1787.
         Il a été arrêté qu’il sera fait de très humbles et très respectueuses et itératives remontrances audit seigneur roi, et que pour en fixer les objets il sera nommé des commissaires qui s’assembleront en la grand’ chambre en raison des réparations faites en la chambre Saint-Louis, vendredi prochain six heures de relevée.
         Et Monsieur le Premier Président a nommé pour commissaires les mêmes [v] que ceux qui ont été nommés le vingt-deux novembre dernier pour les remontrances arrêtées ledit jour et sur lesquelles porte la réponse du roi ci-dessus énoncée.
         Ensuite, Messieurs ayant observé que le secrétaire de la Cour qui avait été chargé en exécution de l’arrêté du dix-huit de ce mois d’avertir Monsieur le Duc d’Orléans que la délibération sur la réponse du roi du douze de ce mois portée au procès-verbal du quinze de ce présent mois était continuée à ce jour d’hui, avait à rendre compte d’une mission dont il avait dû s’acquitter en vertu dudit arrêté du dix-huit de ce mois. Monsieur le Premier Président a dit au secrétaire de la Cour qui avait été avertir Monsieur le Duc d’Orléans de rendre compte de la mission dont il avait été chargé par ledit arrêté du dix-huit de ce mois.
         Alors M. François Louis Dufranc, secrétaire de la Cour s’étant avancé à l’entrée du parquet de la Cour, a dit qu’il s’était  présenté dimanche dernier au Palais royal sur les dix heures du matin et qu’ayant été introduit chez Monsieur le Duc d’Orléans par …, après avoir eu l’honneur de lui faire part, en exécution de l’arrêté du dix-sept dudit présent mois aux remontrances arrêtées le vingt-deux novembre dernier tant sur la forme de la séance tenue par le roi en sa Cour le dix-neuf du même mois que sur la partie du discours du roi du vingt un dudit mois de novembre relative à l’arrêté pris après la séance du dix-neuf novembre et à l’improbation de l’usage des arrêtés sur le registre, était continuée à ce jour d’hui dix heures du matin ; il avait eu l’honneur de lui témoigner, conformément audit arrêté du dix-huit de ce mois, la satisfaction que le Parlement avait ressentie en apprenant qu’il était rendu à ses vœux ; et que Monsieur le Duc d’Orléans lui avait fait celui de lui répondre qu’il était sensible à l’attention que le Parlement lui témoignait et qu’il ne pouvait pas se rendre à son invitation pour mardi.
         Après quoi la Cour s’est levée.
         D’Aligre
Du mardi vingt-neuf avril
mil sept cent quatre-vingt huit
du matin
toutes les Chambres assemblées
les Pairs y séant [vi]
 
          Premier Président                                          
     M. Etienne François d’Aligre,                           
         Présidents                                                              
M. Louis François de Paule le Fèvre d’Ormesson  
M. Arnaud Guillaume François de Gourgue
M. Jean Baptiste Gaspard Bochart de Saron                                 
M. Louis Le Peletier de Rozambo                               
M. Omer Joly de Fleury                                           
M. Pierre Gilbert de Voisins 
M. Louis Michel Le Peletier de Saint Fargeau                                  
         Conseiller d’honneur                           
M. Barillon,
         Pairs de France, Messieurs
Le Duc d’Uzès
Le Duc de Piney Luxembourg
Le Duc de Gesvres                                                                     
Le Duc d’Aumont
Le Duc de Charost
Le Duc de Fitz-James
Le Duc de Praslin
Le Duc de La Rochefoucault
Le Duc de Choiseul
         Conseillers de la Grand’Chambre, Messieurs            
Duport, Dupuis, d’Haringhe, Nouet, Lefebvre, Dionis, Titon, Bougongne, de Glatigny, Bruant, Serre, d’Outremont, Fourmestraux, Tandeau,  Robert, Bourgevin, Lecoigneux, Fredy, Pasquier, Phelyppe, Camus, Barbier, Clement, Leriche, Langlois, Mauperché, Constance, Chuppin, Lambert                            
         Messieurs Présidents des Enquêtes et Requêtes
Bourrée, Roland, Dompierre, Chabenat, Dutrousset, Le Rebours
         Messieurs Conseillers des Enquêtes et Requêtes
Masson, Dudoyer, Clement, Desponty,  Anjorant, Guerrier, Tabary, Favières, Boula, Brisson, Perrotin, Robert, Degars, Duval, Huguet, Duport, Goislard, Brochant, Devilliers, Dupont, Merceron, Fagnier, Foullon, Oursin, Devilliers , Chasseing, De Fay, Talon, Lefevre, Salamon, Rossignol, Paris,  Lamoignon, Agard, Dupleix, Depont, Geoffroy, Cadot, Le Clerc, Berulle, Fourmestraux, Roger, Robert, Chaubry, Esmangard, Lechanteur, Le Roy, Roland, Barême, Boissel, Lambert, Geoffroy, Barberé, Morel, La Blétonnière, Trudaine, Noblet, Bourrée, Molé, Bourgevin, Louis, Sahuguet, Sallier, Trudaine,perré, Chartier, Le Noir
 
         Ce jour à la levée de la seconde audience, les chambres ont été averties en la manière accoutumée.
         Les chambres assemblées, Messieurs les Pairs ci-dessus nommés venus successivement en la Cour ayant pris séance ainsi que Messieurs les Présidents, Conseillers d’honneur, Conseillers de Grand’Chambre, Conseillers-Présidents des Enquêtes et Requêtes et Conseillers des Enquêtes et Requêtes, et ce en la manière énoncée au procès-verbal du sept décembre dernier, et s’étant placés comme il est marqué audit procès-verbal, Monsieur le Premier Président a dit qu’un de Messieurs de la troisième Chambre des Enquêtes avait à rendre compte à la Compagnie d’un objet important.
         A l’instant, un de Messieurs les Présidents de la troisième Chambre des Enquêtes prenant la parole a dit que Messieurs de sa chambre ayant été instruits de ce qui se pratique pour l’extension des vingtièmes, celui de Messieurs qui était chargé d’en rendre compte, voudrait bien le faire. Et aussitôt celui de Messieurs qui était chargé de ce compte l’ayant rendu, a prié Monsieur le Premier Président de mettre en délibération ce qu’il convenait faire à cet égard.
         La matière mise en délibération.
         Est intervenu l’arrêt suivant :
 
 Arrêté dénonçant la perception des vingtièmes dans Flammemont, Remontrances, op. cit., p. 736.
 
 
         Et à l’instant, les gens du roi mandés, entrés et placés, debout et découverts, Monsieur le Premier Président leur a fait entendre l’arrêté ci-dessus, à quoi ils ont répondu, le procureur général du roi portant la parole, qu’ils se conformeraient aux ordres de la Cour.
         Et se sont lesdits gens du roi retirés.
         Eux retirés.
         Un de Messieurs a rendu compte d’un objet relatif à la détention de M. Fouilloux.
         Sur quoi la matière mise en délibération :
         Il a été arrêté que les gens du roi seraient chargés de s’informer des faits et d’en rendre compte aux chambres assemblées.
         Et à l’instant, les gens du roi mandés, entrés et placés, debout et découverts, Monsieur le Premier Président leur a fait part de ce dernier arrêté, à quoi ils ont répondu, le procureur général du roi portant la parole, qu’ils se conformeraient aux ordres de la Cour.
         Et se sont lesdits gens du roi retirés.
         Eux retirés.
         La Cour s’est levée.
         D’Aligre
(les remontrances sont annexées au procès-verbal)
Du mercredi trente avril
mil sept cent quatre-vingt huit
du matin
toutes les chambres assemblées
les pairs y séant
 
                 Premier Président                                         
     M. Etienne François d’Aligre,                           
         Présidents                                                              
M. Louis François de Paule le Fèvre d’Ormesson
M. Jean Baptiste Gaspard Bochart de Saron                    
M. Arnaud Guillaume François de Gourgue               
M. Louis Le Peletier de Rozambo                               
M. Omer Joly de Fleury                                           
M. Pierre Gilbert de Voisins 
M. Louis Michel Le Peletier de Saint Fargeau                                 
          Conseiller d’honneur                                                  
M. Barillon
          Pairs de France, Messieurs
Le Duc d’Uzès
Le Duc de Piney Luxembourg
Le Duc de Gesvres                                                                    
Le Duc d’Aumont
Le Duc de Charost
Le Duc de Fitz-James
Le Duc de Praslin
Le Duc de La Rochefoucault
         Conseillers de la Grand’Chambre, Messieurs            
Duport,  d’Haringhe, Nouet, Lefebvre, Dionis, Titon, Bougongne, de Glatigny, Bruant, Serre, d’Outremont, Fourmestraux, Tandeau,  Robert, Bourgevin, Lecoigneux, Fredy, Pasquier, Phelyppe, Camus, Barbier, Clement, Leriche, Langlois, Mauperché, Constance, Chuppin, Lambert, Dupleix, Clement                            
         Messieurs Présidents des Enquêtes & Requêtes
Roland, Chabenat, Anjorant, Le Rebours
         Messieurs Conseillers des Enquêtes et Requêtes
Masson, Dudoyer, Clement, Desponty,  Anjorant, Guerrier, Tabary, Favières, Boula, Brisson, Perrotin, Robert, Degars, Duval, Huguet, Duport, Goislard, Brochant, Devilliers, Dupont, Merceron, Fagnier, Foullon, Oursin, Devilliers , Chasseing, De Fay, Talon, Lefevre, Salamon, Rossignol, Paris,  Lamoignon, Agard, Dupleix, Depont, Geoffroy, Cadot, Le Clerc, Berulle, Fourmestraux, Roger, Robert, Chaubry, Esmangard, Lechanteur, Le Roy, Roland, Barême, Boissel, Lambert, Geoffroy, Barberé, La Blétonnière, Trudaine, Noblet, Molé, Bourgevin, Louis, Sahuguet, Sallier, Trudaine, Perré, Chartier, Le Noir, Boula, Chopin
 
         Ce jour à la levée de la seconde audience, les chambres ont été averties en la manière accoutumée.
         Les chambres assemblées, Messieurs les Pairs ci-dessus nommés venus successivement en la Cour ayant pris séance ainsi que Messieurs les Présidents, Conseillers d’honneur, Conseillers de Grand’Chambre, Conseillers-Présidents des Enquêtes et Requêtes et Conseillers des Enquêtes et Requêtes, et ce en la manière énoncée au procès-verbal du sept décembre dernier, et s’étant placés comme il est marqué audit procès-verbal, Monsieur le Premier Président a dit que les commissaires nommés le vingt-deux de ce mois pour fixer l’objet des remontrances arrêtées ledit jour sur la réponse du roi  du premier de ce mois à de précédentes remontrances arrêtées le vingt-deux novembre dernier sur la forme de la séance tenue par le roi en sa Cour le dix-neuf dudit mois de novembre et sur la partie du discours dudit seigneur roi du vingt un dudit mois relative à l’arrêté pris après la séance du dix-neuf novembre et à l’improbation des arrêtés sur le registre, avaient fini leur travail et avaient rédigé les remontrances, qu’il avait été rendu compte dans les chambres, et que si Messieurs le jugeaient à propos on ferait lecture desdites remontrances.
         Lecture faite d’icelles et la matière mise en délibération, les voix  prises en la manière accoutumée lorsqu’il n’y a point de rapporteur, ainsi que cela est énoncé au procès-verbal du vingt novembre dernier, elles ont été adoptées et il a été arrêté qu’il en serait fait minute, laquelle sera signée par Monsieur le Premier Président et se trouvera au registre de ce jour.
         Et a été arrêté en outre qu’il serait fait au roi une députation en la forme ordinaire, et que les gens du roi seraient chargés de se retirer par devant ledit seigneur roi pour savoir le lieu, le jour et l’heure où il lui plairait recevoir lesdites très humble et très respectueuses remontrances que son Parlement vient d’adopter.
         Les gens du roi mandés, entrés et placés, debout et découverts, Monsieur le Premier Président leur a fait entendre le susdit arrêté ; après quoi ils ont répondu, le procureur général du roi portant la parole (à cause de l’absence de Me Séguier premier avocat général qui était incommodé), qu’ils s’acquitteraient de la mission que la Cour leur faisait l’honneur de les charger.
         Ensuite, le procureur général du roi a dit que pour se conformer aux intentions de la Cour, il avait pris tous les renseignements qui dépendaient de lui sur la détention du nommé Fouilloux à l’Hôtel de la Force, et qu’il était assuré qu’il n’y avait pas été conduit d’ordre de police mais d’après les ordres particuliers du Roi.
         Et se sont lesdits gens du roi retirés ;
         Eux retirés.
         La matière mise en délibération sur le compte rendu par le procureur général du Roi de la détention dudit Fouilloux et les voix prises en la manière accoutumée lorsqu’il n’y a point de rapporteur ainsi qu’il est énoncé à la délibération précédente ;
         Il a été arrêté que les gens du roi seraient chargés de s’informer des causes, des motifs et des circonstances de l’enfermement et de la détention dudit Fouilloux à l’Hôtel de la Force et d’en rendre compte samedi prochain à l’assemblée des chambres.
         Les gens du roi de nouveau mandés, entrés et placé, debout et découverts, Monsieur le Premier Président leur a fait entendre le susdit arrêté ; après quoi ils ont répondu, le procureur général du roi portant la parole, qu’ils se conformeraient aux ordres de la Cour.
         Et se sont les gens du roi retirés.
         Après quoi la Cour s’est levée.
         D’Aligre
 
Itératives remontrances dans Flammermont, Remontrances, op. cit., pp. 736-744 : « Sire, la réponse de V.M. du 17 de ce mois est affligeante…. » Etc.
 
 
Du samedi trois mai
mil sept cent quatre-vingt huit
du matin
toutes les chambres assemblées
les pairs y séant
 
                 Premier Président                                          
     M. Etienne François d’Aligre,                           
         Présidents                                                              
M. Louis François de Paule le Fèvre d’Ormesson
M. Jean Baptiste Gaspard Bochart de Saron                     
M. Arnaud Guillaume François de Gourgue               
M. Louis Le Peletier de Rozambo                               
M. Omer Joly de Fleury                                            
M. Pierre Gilbert de Voisins 
M. Louis Michel Le Peletier de Saint Fargeau                                 
        Conseillers d’honneur                                                   
M. Barillon et M. Le Pileur
        Pairs de France, Messieurs
Le Duc d’Uzès
Le Duc de Piney Luxembourg
Le Duc de Gesvres                                                                    
Le Duc d’Aumont
Le Duc de Charost
Le Duc de Fitz-Jame
Le Duc de Brancas
Le Duc de Praslin
Le Duc de La Rochefoucault
         Conseillers de la Grand’Chambre, Messieurs            
Duport,  d’Haringhe, Nouet, Lefebvre, Dionis, Titon, Bougongne, de Glatigny, Bruant, Serre, d’Outremont, Fourmestraux, Tandeau,  Robert, Bourgevin, Lecoigneux, Fredy, Pasquier, Phelyppe, Camus, Barbier, Clement, Leriche, Langlois, Mauperché, Constance, Chuppin, Lambert, Clement, Dupuis                            
         Messieurs Présidents des Enquêtes & Requêtes
Bourrée, Roland, Chabenat, Anjorant, Dutrousset, Dompierre, Le Rebours
         Messieurs Conseillers des Enquêtes et Requêtes
Masson, Dudoyer, Clement, Desponty,  Ferrand, Anjorant, Guerrier, Tabary, Favières, Boula, Brisson, Perrotin, Robert, Degars, Duval, Huguet, Duport, Goislard, Brochant, Devilliers, Dupont, Merceron, Fagnier, Foullon, Oursin, Devilliers , Chasseing, De Fay, Talon, Lefevre, Salamon, Rossignol, Paris,  Lamoignon, Agard, Dupleix, Depont, Geoffroy, Cadot, Le Clerc, Berulle, Fourmestraux, Roger, Robert, Chaubry, Esmangard, Lechanteur, Le Roy, Roland, Barême, Boissel, Lambert, Geoffroy, Barberé, La Blétonnière, Trudaine, Noblet, Molé, Bourgevin, Louis,, Sahuguet, Sallier, Trudaine, Perré, Chartier, Le Noir, Boula, Chopin, Titon, Morel, Bourrée
 
         Ce jour, à l’issue de l’audience de neuf heures, les chambres ont été averties en la manière accoutumée pour l’assemblée des chambres remise à ce jour d’hui par l’arrêté du trente avril dernier.
         Les chambres assemblées, Messieurs les Pairs ci-dessus nommés venus successivement en la Cour ayant pris séance ainsi que Messieurs les Présidents, Conseillers d’honneur, Conseillers de Grand’Chambre, Conseillers-Présidents des Enquêtes et Requêtes et Conseillers des Enquêtes et Requêtes, et ce en la manière énoncée au procès-verbal du sept décembre dernier, et s’étant placés comme il est marqué audit  procès-verbal, Monsieur le Premier Président a dit que les gens du roi demandaient à entrer pour rendre compte de la mission dont elle les avait chargé par  son arrêté de mercredi dernier.
         Eux mandés, entrés et placés, debout et découverts, le procureur général du roi portant la parole (attendu l’absence de Me Séguier, premier avocat général, pour cause d’incommodité), a dit qu’il s’était acquitté de la mission dont la Cour lui avait fait l’honneur de le charger par son arrêté du trente avril dernier et que le roi recevrait les remontrances de son Parlement sur sa réponse du dix-sept avril dernier à de précédentes remontrances arrêtées le vingt-deux novembre dernier sur la forme de la séance tenue par le roi en sa Cour le dix-neuf dudit mois de novembre et sur la partie du discours dudit seigneur roi du vingt un dudit mois de novembre relative à l’arrêté pris après la séance ledit jour dix-neuf novembre et à l’improbation des arrêtés sur le registre, demain dimanche à Versailles à six heures du soir et que ses intentions étaient qu’elles fussent apportées par Monsieur le Premier Président et deux de Messieurs les Présidents seulement.
         Après quoi il a dit :
 
Compte rendu du procureur général sur l’arrestation et l’emprisonnement du Sieur Fouilloux, gazetier, dans Flammermont, Remontrances, op.cit., p. 744 : « Conformément à l’arrêté de la Cour du 30 avril dernier… ». Etc.
 
 
         Et se sont les gens du roi retirés, le procureur général ayant laissé sur le bureau les pièces énoncées dans le compte qu’il venait de rendre.
         Eux retirés.
         Et la matière mise en délibération sur le compte des gens du roi relatif aux remontrances, les voix prises en la manière accoutumée lorsqu’il n’y a point de rapporteur, ainsi que cela est énoncé au procès-verbal du vingt novembre dernier.
         Il a été arrêté que conformément aux intentions du roi, Monsieur le Premier Président et deux de Messieurs les Présidents seulement se rendraient demain dimanche quatre de ce mois à six heures du soir à Versailles, à l’effet  de présenter audit seigneur roi lesdites très humbles et très respectueuses remontrances dont la minute a été signée par Monsieur le Premier Président le trente avril dernier ; et que les chambres seraient assemblées le mardi six de ce mois dix heures du matin pour entendre la réponse du roi aux dites remontrances ; et collation faite à l’instant de la copie pour le roi sur la minute desdites remontrances, ladite copie a été signée par M. le Greffier en chef.
         Ensuite la matière mise en délibération sur le compte rendu par les gens du roi des motifs et des circonstances qui ont accompagné l’enlèvement du S. Fouilloux, et les voix  prises en la manière accoutumée lorsqu’il n’y a point de rapporteur ainsi qu’il est énoncé en la délibération précédente ; dans le cours des opinions, un des Messieurs s’est réservé de prier Monsieur le Premier Président de mettre en délibération ce qu’il y avait à faire sur l’état actuel de la Nation et de la Magistrature ; et la délibération commencée, terminée, est intervenu arrêt particulier qui se trouvera au registre de ce jour, lequel reçoit le procureur général plaignant des faits contenus, tant dans le récit  fait au sujet dudit Fouilloux par un de Messieurs le vingt-neuf avril dernier, que ce ceux contenus dans le compte qui venait d’être rendu par les gens du roi.
         Après quoi, celui de Messieurs qui dans le cours de la délibération précédente s’était réservé de délibérer sur l’état actuel de la Nation et de la Magistrature, prenant la parole, a dit :
« Monsieur,
« L’état des affaires publiques me paraît exiger de la part de la Compagnie quelques précautions. La notoriété publique suffirait à nous avertir : les commandants ont reçu ordre de se rendre dans les provinces, des conseillers d’Etat y sont envoyés avec différents maîtres des requêtes. Le système de la seule volonté expressément établi dans les différentes réponses surprises au roi n’annonce que trop clairement l’objet de leur mission. Je vous prie, Monsieur, de mettre en délibération ce qu’il convient de faire à ce sujet ».
         La matière mise en délibération et les voix prises en la manière accoutumée lorsqu’il n’y point de rapporteur ainsi qu’il est énoncé dans les délibérations précédentes ;
         Est intervenu l’arrêté suivant :
 
Arrêté,  précédé de l’intervention du conseiller (Duval d’Eprémesnil) dans Flammemont, Remontrances, op.cit.,  pp. 745-746. : « ….Considérant que les entreprises des ministres contre la Magistrature ont évidemment pour cause le parti qu’a pris la Cour de résister à deux impôts désastreux… ». Etc.
 
 
… « ordonne en outre ladite Cour que le présent arrêté sera par le procureur général du roi envoyé incontinent aux bailliages et sénéchaussées du ressort pour y être publié et registré et que le procureur général du Roi rendra compte de cet envoi en la Cour lundi prochain toutes chambres assemblées ».
         Et les gens du roi entrés et placés, debout et découverts, Monsieur le Premier Président leur a dit : « Gens du roi, la Cour vient de rendre un arrêté qu’elle vous charge d’envoyer incontinent dans les bailliages et sénéchaussées du ressort, et de rendre compte de l’exécution dudit arrêté lundi prochain cinq de ce mois aux chambres assemblées ; à quoi, lesdits gens du roi s’étant couvert, le procureur général du roi portant la parole, a répondu qu’il se conformerait aux ordres de la Cour et se sont lesdits gens du roi retirés.
         Après quoi la Cour s’est levée.
         D’Aligre
Du lundi cinq mai
mil sept cent quatre-vingt huit
du matin
toutes les chambres assemblées
les pairs y séant
 
                 Premier Président                                         
     M. Etienne François d’Aligre,                            
         Présidents                                                              
M. Louis François de Paule le Fèvre d’Ormesson
M. Jean Baptiste Gaspard Bochart de Saron                    
M. Arnaud Guillaume François de Gourgue                
M. Louis Le Peletier de Rozambo                               
M. Omer Joly de Fleury                                           
M. Pierre Gilbert de Voisins 
M. Louis Michel Le Peletier de Saint Fargeau                                 
         Conseillers d’honneur                                               
M. Barillon et M. Le Pileur
         Pairs de France, Messieurs
Le Duc de Luynes
Le Duc de Piney Luxembourg
Le Duc de Noailles
Le Duc de Saint Cloud
Le Duc de Praslin
Le Duc de La Rochefoucault
         Conseillers de la Grand’Chambre, Messieurs            
Duport,  d’Haringhe, Nouet, Lefebvre, Dionis, Titon, Bougongne, de Glatigny, Bruant, Serre, d’Outremont, Fourmestraux, Tandeau,  Robert, Bourgevin, Lecoigneux, Fredy, Pasquier, Phelyppe, Camus, Barbier, Clement, Langlois, Mauperché, Constance, Chuppin, Lambert, Clement, Dupuis                            
         Messieurs Présidents des Enquêtes et Requêtes
Bourrée, Roland, Chabenat, Anjorant, Dutrousset, Dompierre, Le Rebours
         Messieurs Conseillers des Enquêtes et Requêtes
Masson, Dudoyer, Clement, Desponty,  Ferrand, Anjorant, Guerrier, Tabary, Favières, Boula, Brisson, Robert, Duval, Huguet, Duport, Goislard, Brochant, Devilliers, Dupont, Merceron, Fagnier, Foullon, Oursin, Devilliers , Chasseing, De Fay, Talon, Lefevre, Salamon, Rossignol, Paris,  Lamoignon, Agard, Dupleix, Geoffroy, Cadot, Le Clerc, Berulle, Fourmestraux, Roger, Robert, Chaubry, Esmangard, Barême, Boissel, Lambert, Geoffroy, Barberé, La Blétonnière, Trudaine, Noblet, Bourgevin, Sahuguet, Sallier, Trudaine, Perré, Chartier, Chopin, Titon, Morel, Bourrée
 
         Ce jour, à l’issue de l’audience de neuf heures, les chambres ont été averties en la manière accoutumée pour l’assemblée des chambres demandée par Messieurs à Monsieur le Premier Président relativement à Messieurs Duval et Goislard, conseillers en la Cour, qui s’étaient rendus en leur chambre pour  y rendre compte de l’enlèvement qu’on avait voulu faire de leurs personnes pendant la nuit, assemblée qui avait été remise à ce jour d’hui avec les pairs par l’arrêté  de samedi dernier trois du présent mois pour entendre la réponse du roi aux remontrances dont Monsieur le Premier Président rend compte ci-après.
         Les chambres assemblées, Messieurs les Pairs ci-dessus nommés venus successivement en la Cour ayant pris séance ainsi que Messieurs les Présidents, Conseillers d’honneur, Conseillers de Grand‘Chambre, Conseillers-Présidents des Enquêtes et Requêtes et Conseillers des Enquêtes et Requêtes, et ce en la manière énoncée au procès-verbal du sept décembre dernier, et comme il est marqué audit procès-verbal, il a été convenu qu’il serait donné avis sur le champ en la forme ordinaire à ceux de Messieurs les Ducs et Pairs qui n’étaient pas au Palais, que la Cour toutes les chambres assemblées, pour la suite des affaires publiques, plusieurs pairs y séant, les attend.
         Ce qui a été fait à l’instant, et après avoir attendu environ une heure pour que Messieurs les Ducs et Pairs eussent le temps d’arriver, quelques-uns de Messieurs les Ducs et Pairs qui avaient été avertis s’étant rendus au Palais, Monsieur le Premier Président a dit qu’en exécution des ordres du roi et de l’arrêté de la Cour du trois de ce mois, il s’était rendu hier à Versailles avec le Président Lefèvre et Monsieur le Président de Gourgue ; que vers les sept heures du soir ils avaient été introduits dans le cabinet du roi où il était environné de ses ministres, et que, s’étant approché de sa personne il avait eu l’honneur de lui présenter les très humbles et très respectueuses remontrances arrêtées le trente avril dernier sur la réponse du roi du dix-sept dudit mois à de précédentes remontrances arrêtées le vingt-deux novembre mil sept cent quatre-vingt-sept sur la forme de la séance tenue par le Roi en sa Cour le dix-neuf dudit mois de novembre et sur la partie du discours du Roi du vingt un dudit mois relative à l’arrêté du dix-neuf dudit mois de novembre fait après la séance et à l’improbation des arrêtés sur le registre ; que le roi les avait prises et leur avait fait l’honneur de leur dire : « Je ferai savoir mes intentions à mon Parlement ».
         La matière sur ce mise en délibération et les voix prises en la manière accoutumée lorsqu’il n’y a point de rapporteur, ainsi qu’il est énoncé au procès-verbal du vingt novembre mil sept cent quatre-vingt-sept, il a été arrêté qu’il serait dressé procès-verbal du récit fait par monsieur le Premier Président.
         Ensuite, Messieurs ayant demandé à Messieurs Duval et Goislard de vouloir bien rendre compte de ce qui s’est passé cette nuit, lorsqu’on s’est présenté à leur porte avec des ordres du roi, Monsieur Duval a dit, prenant le premier la parole, que ce matin vers les une heure après minuit, trois particuliers portant l’uniforme de la prévôté de l’Hôtel, avaient frappé avec violence à la porte de sa maison et que son portier leur avait dit qu’il n’en avait pas les clefs, étant dans l’usage de les remettre tous les soirs à son maître ; ces particuliers lui avaient dit que c’était de la part du roi, que sur cela son portier leur ayant dit qu’il ne devait avoir les clefs qu’à sept heures et qu’il était impossible de les demander à son maître parce que pour arriver à sa chambre il y avait cinq ou six portes à ouvrir dont il n’avait pas les clefs, ces particuliers s’étaient retirés. Que sur les cinq heures était arrivée une voiture de la Cour attelée de quatre chevaux et que les gens qui la conduisaient, ayant aussi frappé à sa porte, et demandé si les personnes qui étaient venues à une heure du matin n’étaient pas dans la maison. Cette voiture s’était en allé sur la réponse que fit son portier que personne n’était entré dans sa maison. Qu’instruit de tout ce qui s’était passé il avait fait ouvrir sa porte à six heures du matin et avait fait sortir son carrosse où était monté son fils avec une autre personne, après lequel avaient couru différents particuliers qui environnaient sa maison, et qu’environ une demie heure après, vers les six heures et demie, il était sorti de sa maison et était venu à pied au Palais se rendre en la première Chambre des Enquêtes pour y prendre les ordres de Messieurs.
         Ensuite, M. Goislard ayant également pris la parole, a dit que réveillé ce matin vers les une heure après minuit par un grand bruit qu’il avait entendu à la porte, il s’était levé et ayant appris qu’on demandait à entrer de la part du roi, il s’était recouché parce qu’ayant cinq portes de son appartement fermées sur lui, il avait pensé que si on avait des ordres pour les enfoncer, il ne pourrait pas s’opposer à la force et que dans le cas où on n’en aurait pas on ne pourrait pas parvenir jusqu’à lui ; mais que vers les huit heures, ayant entendu gratter à une porte de derrière de son appartement, il avait été à cette porte,  et que ayant appris par la personne qui avait gratté et dont il avait reconnu la voix, il pouvait s’en aller sans être aperçu ; qu’il était sorti de son appartement et était passé par une fenêtre qui était à environ à quatre pieds du pavé ; qu’il avait été à pied jusque dans la rue de Sèvres [vii] où il avait trouvé une voiture en sortant de la rue Saint Maur, dans laquelle il était monté et qui l’avait amené au Palais où il s’était rendu à la troisième Chambre des Enquêtes pour y recevoir les ordres de Messieurs.
         La matière mise en délibération tant sur le compte qui venait d’être rendu par M. Duval que sur celui de M. Goislard, et les voix prises en la manière accoutumée lorsqu’il n’y a point de rapporteur ainsi que cela est énoncé à la délibération précédente, a été pris l’arrêté suivant :
         « La Cour délibérant sur le récit fait par Messieurs Duval et Goislard des mesures prises la nuit dernière pour les enlever de leur maison, considérant que les ministres, loin d’être ramenés aux principes de la monarchie par les démarches de la Cour toujours légales et toujours respectueuses envers le roi, ne s’occupent au contraire qu’à déployer toutes les ressources du despotisme qu’ils s’efforcent de substituer aux lois. Que les ministres viennent encore d’attenter à la liberté de deux magistrats de la Cour dont le crime est d’avoir uni leur zèle à celui de la Compagnie pour défendre les droits les plus sacrés de la Nation.
         « Considérant que les ordres particuliers qui violent l’asile des citoyens en les mettant dans l’impuissance de recourir aux lois, en ne tendant pas à remettre sans délai les personnes arrêtées entre les mains des juges compétents, n’obligent pas légalement les citoyens ; a mis et met Messieurs Duval et Goislard et tous les autres magistrats et citoyens sous la sauvegarde du roi et de la loi .
         « Et cependant a arrêté que Monsieur le Premier Président se transportera sur le champ à Versailles avec Messieurs les Présidents Lefèvre et Bochart et quatre de Messieurs de Grand’Chambre, à l’effet de représenter au roi l’effet des malheurs qui menacent la Nation et le supplie d’écouter dans sa sagesse d’autres conseils que ceux qui sont prêts d’entrainer l’autorité législative et la liberté publique dans un abîme dont il deviendrait peut-être impossible aux magistrats de les retirer. »
         A arrêté en outre que la Cour  attendra sans déplacer, le retour de Monsieur le Premier Président et de Messieurs les députés et qu’expédition en forme du présent arrêt sera délivrés à chacun de Messieurs Duval et Goislard.
         Et Monsieur le Premier Président a nommé pour députés, Messieurs Barbier, conseiller clerc, Lefèbvre, Robert et Amelot, conseillers lays.
         Ce fait un de messieurs de la première Chambre des Enquêtes a dit qu’il était chargé par sa chambre de dénoncer à la Cour un imprimé ayant pour titre : « Arrêté unanime du Parlement du trois mars ».
         Qu’il remettait cet imprimé sur le bureau et priait Monsieur le Président de mettre en délibération ce qu’il convenait de faire à ce sujet. La matière mise en délibération, et les voix prises en la manière accoutumée lorsqu’il n’y a point de rapporteur ainsi que cela est énoncé aux délibérations précédentes.
         Il a été arrêté que cet imprimé serait remis entre les mains des gens du roi pour y donner leurs conclusions sur le champ.
         Les gens du roi à l’instant mandés, entrés et placés, debout et découverts, Monsieur le Premier Président leur a dit que la Cour les mandait pour qu’ils eussent à prendre communication d’un imprimé ayant pour titre «  Arrêté unanime du parlement du trois mars » [viii] qui venait d’être dénoncé à la Cour par un de Messieurs à l’effet d’y donner leurs conclusions sur le champ ; à quoi, Me Antoine Louis  Séguier avocat dudit seigneur roi portant la parole, s’étant couvert, ont dit qu’ils se conformeraient aux ordres de la Cour et qu’ils allaient se retirer du parquet pour y délibérer.
         Et ledit imprimé leur ayant été remis, lesdits gens du roi se sont retirés.
         Peu de temps après lesdits gens du roi ayant fait avertir la Cour que leurs conclusions étaient prêtes, ils ont été mandés.
         Eux entrés et placés, debout et couverts, Me Antoine Louis Séguier, avocat général dudit seigneur roi portant la parole, ont fait un réquisitoire sur ledit imprimé lequel se trouvera au registre de ce jour en tête [ix] de l’arrêt particulier intervenu sur leurs conclusions.
Et se sont lesdits gens du roi retirés après avoir laissé sur le bureau ledit imprimé et les conclusions du procureur général du roi par lui prises par écrit sur icelui.
         Eux retirés et la matière mise en délibération, les voix prises en la manière accoutumée lorsqu’il n’y a point de rapporteur ainsi qu’il est énoncé au procès-verbal du sept décembre dernier
         Est intervenu arrêt particulier qui condamne ledit imprimé à être lacéré et brûlé, lequel se trouvera au registre de ce jour et a été arrêté en outre que les portes ouvertes, il serait fait à l’instant lecture et publication dudit arrêt les chambres assemblées, les pairs y séant, et que Monsieur le Premier Président sera chargé de remettre au roi une expédition dudit arrêt.
         Les portes ouvertes et le public entré, il a été fait lecture dudit arrêt par M. Dagobert Etienne Ysabeau, un des greffiers de la Grand’Chambre. Après quoi Monsieur le Premier Président a ordonné de faire retirer le public et de fermer les portes ; et le public retiré et les portes fermées, Monsieur le Premier Président s’est levé avec Messieurs les Présidents Lefèvre et Bochart et Messieurs Lefebvre, Robert, Amelot et Barbier, et est sorti, suivi de ces Messieurs, pour aller en son hôtel et en partir à l’effet de se rendre à Versailles en exécution de l’arrêté ci-dessus, Messieurs restant dans la Grand’Chambre conformément audit arrêté.
         Sur les quatre heures de relevée, Messieurs passèrent successivement dans les différentes buvettes des chambres où ils sont de service. Ensuite vers les sept heures du soir, Monsieur le Président de Gourgue qui se trouvait présider la Compagnie, comme l’ancien de ceux de Messieurs les Présidents qui étaient restés à l’assemblée, dit que M. Titon conseiller de Grand’Chambre, avait entre les mains un référé dont il désirait rendre compte à la Cour et M. Titon prenant à l’instant la parole a dit que le lieutenant général du bailliage du Palais, instruit qu’un particulier avait proposé à différents libraires du Palais la brochure intitulée « Arrêt unanime du Parlement » qui venait d’être condamnée au feu par arrêt de la Cour, avait chargé un des huissiers du bailliage de faire perquisition de sa personne, que ce particulier nommé Tisset avait été arrêté vers les deux heures après midi et conduit au bailliage, ledit lieutenant général l’avait fait fouiller et qu’on avait simplement trouvé différentes brochures mais qu’il n’avait point celle que la Cour venait de condamner à être brulée, que ledit lieutenant général l’avait interrogé et qu’ensuite il avait ordonné, sur les conclusions du procureur général du roi audit bailliage, qu’il serait référé en la Cour, les chambres assemblées ; que cet interrogatoire, sur lequel le procureur général auquel il avait été communiqué avait donné ses conclusions, lui avait été remis et que si Messieurs le jugeaient à propos, on en ferait lecture.
         Lecture faite dudit interrogatoire et des conclusions du procureur général du roi par lui prises par écrit sur icelui et la matière mise en délibération, les voix prise en la manière accoutumée ainsi qu’il est énoncé au procès-verbal du sept décembre dernier.
         Est intervenu arrêt particulier qui décrète de prise de corps ledit François Barnabé Tisset et ordonne que son procès lui sera fait à la requête du substitut du procureur général du Roi au bailliage du Palais lequel se trouvera au registre de ce jour.
         Sur les dix heures du soir, la Cour attendant toujours le retour de Messieurs les députés, quelques-uns de Messieurs passèrent à leurs buvettes, comme ils l’avaient fait à quatre heures, et au moment où ils venaient de se réunir, c’est-à-dire sur les minuit, six de ce mois, la Compagnie fut avertie qu’un détachement du régiment des Gardes françaises, la baïonnette au bout du fusil, précédés de sapeurs munis de leur hache et commandés par le Sieur Dagoust, capitaine aux Gardes, était arrivé au Palais et s’emparait de ses cours et de ses escaliers et un instant après les Gardes françaises s’étaient également emparé de toutes les avenues du Palais, et investi la grand’chambre et le parquet des gens du roi, ayant placé des sentinelles à toutes les portes de manière que toute communication fut interceptée, la consigne des soldats étant de ne laisser entrer ni sortir qui que ce soit au point que les étrangers de tout sexe et même de la plus haute qualité qui se trouvaient dans la grande salle et dans les différents passages qui conduisent aux chambres et dans les greffes furent forcés d’y rester jusqu’à neuf heures du matin, et depuis ce moment aucuns pair, président, conseiller ou autre membres de la Cour n’eurent plus la même liberté d’aller de la grand‘chambre à la buvette pour les besoins les plus urgents sans être escortés d’un soldat qui les gardait à vue ; et les gens du roi pour entrer seulement dans la grand ‘chambre par la porte de leur parquet qui y communique, furent obligés d’en demander la permission au Sieur Dagoust , lequel, vers les une heure du matin, comme on allait délibérer sur l’arrivée des troupes au Palais, se présenta à la porte de la grand’chambre, qui donne du côté des greffes et demanda à parler à Monsieur le Président de Gourgue, qui, en ayant été averti, y vint, et le Sieur Dagoust lui ayant dit qu’il avait des ordres du roi à communiquer à la Compagnie, Monsieur le Président de Gourgue lui répondit qu’il était d’usage en la Cour que ceux qui apportaient les ordres du roi fussent introduits par les gens du roi et qu’en conséquence il fallait qu’il se rendit en leur parquet pour leur en faire part ; et ledit Sieur Dagoust y étant à l’instant passé, les gens du roi, avec la permission dudit Sieur Dagoust, firent prévenir Monsieur le Président de Gourgue qu’ils demandaient à entrer, et Monsieur le Président de Gourgue en ayant fait part à la Compagnie, lesdits gens du roi furent mandés.
         Eux entrés et placés, debout et découverts, le procureur général du Roi portant la parole (attendu l’absence de Me Séguier premier avocat général qui s’étant trouvé incommodé était sorti du Palais), a dit que le Sieur Dagoust, capitaine au régiment des Gardes françaises et aide-major dudit régiment, revêtu du grand uniforme, était au parquet des huissiers et demandait à entrer pour faire part à la Cour d’ordres du Roi, et ont pris place en leurs bancs.
         Ledit Sieur Dagoust à l’instant mandé, les gens du roi présents, et entrés, après avoir fait à l’entrée du parquet de la Cour de profondes révérences à la Compagnie, se plaça ainsi que la Cour l’avait arrêté, entre Monsieur de Bourgevin et Monsieur de Fourmestraux, sur la banquette mise devant le banc de Messieurs les Conseillers clercs alors occupé par Messieurs les Ducs et Pairs, la Cour croyant que les ordres du roi dont il avait annoncé être le porteur lui étaient adressés, et non pas au Sieur Dagoust ; et ledit sieur Dagoust (sic), assis et découvert, a dit qu’il avait ordre du Roi d’arrêter en la grand’chambre et partout ailleurs  Messieurs Duval et Goislard Conseillers en la Cour ; sur quoi Monsieur le Président de Gourgue lui ayant demandé s’il avait un ordre par écrit, et répondu qu’oui, et s’étant levé, il le tira de sa poche et en fit lecture. Cet ordre était à peu près conçu en ces termes : « Il est ordonné au Sieur Dagoust capitaine de mes Gardes françaises de se rendre au Palais à la tête de six compagnies, de s’emparer de toutes les issues et d’arrêter dans la grand’chambre ou partout ailleurs Messieurs Duval et Goislard pour les mettre entre les mains de la prévôté de l’Hôtel », puis il ajouta qu’il était signé de la main même du roi. Ensuite, ayant demandé, en regardant Monsieur le Président de Gourgue, qu’on voulut bien lui indiquer ces Messieurs, ne les connaissant pas, Monsieur le Président de Gourgue lui dit qu’il fallait que la Cour délibérât sur cet ordre, l’usage étant tel dans toutes les occasions. Alors ledit Sieur Dagoust lui ayant dit qu’il ne connaissait point les formes de la Compagnie et que l’ordre lui enjoignait d’arrêter sur le champ Messieurs Duval et Goislard, qu’il sommait la Compagnie de les lui livrer. Mais Monsieur le Président de Gourgue lui ayant fait observer que l’ordre ne portait pas « sur le champ » et ne défendait pas à la cour de délibérer, ledit Sieur Dagoust répondit que ces ordres verbaux portaient que telle était l’intention du Roi et que si la Compagnie persistait à ne pas les lui indiquer, il sommait Monsieur le Président de Gourgue de lui signer son refus ; alors la Compagnie lui répondit qu’on ne pouvait exiger qu’elle livrât un de ses membres et un des Messieurs les Ducs et Pairs ajouta que quand on se chargeait de pareils ordres on devait les prendre assez clairs pour n’être pas embarrassés dans leur exécution, n’ayant pu penser, s’il avait cru pouvoir s’en charger, que la Cour lui livrerait ses membres et que s’il ne les connaissait pas, ce n’était pas à elle à les lui indiquer. Après quoi Monsieur le Président de Gourgue lui dit que l’ordre le regardait seul et que c’était à lui à l’exécuter. Sur quoi, le Sieur Dagoust lui ayant représenté que cela lui était impossible, ne connaissant pas Messieurs Duval et Goislard,  tous Messieurs s’écrièrent par acclamation « nous sommes tous Messieurs Duval et Goislard , faites nous  prisonniers, nous vous suivrons ». Alors le Sieur Dagoust dit qu’il allait se retirer pour en rendre compte à son supérieur.
         Et ledit Sieur Dagoust retiré, les gens du roi se levèrent et passèrent dans leur parquet, les chambres restant toujours assemblées pour attendre, conformément à l’arrêt du jour d’hier, le retour de Messieurs les députés qui arrivèrent à trois heures du matin ; et ayant pris place au moment même de leur arrivée, Monsieur le Premier Président dit qu’en exécution de l’arrêté de la Cour du jour d’hier il s’était transporté à Versailles avec Monsieur le Président Lefèvre et Monsieur le Président Bochart et Messieurs Barbier, Lefebvre, Robert et Amelot, lui, Monsieur le Premier Président dans sa voiture avec Monsieur le Président Lefevre et Messieurs Barbier et Lefebvre et Monsieur le Président dans la sienne avec Messieurs Robert et Amelot ; qu’arrivés à Versailles, ils s’étaient rendus chez Monsieur le Garde des Sceaux et qu’ayant appris qu’il était chez le roi, ils avaient été chez M. L’Archevêque de Sens qui était également chez le roi mais qu’ils y étaient restés pour l’attendre ; que Monsieur l’Archevêque de Sens,  revenu de chez le roi leur avait dit, lui ayant fait part de leur mission, que Monsieur le Garde des Sceaux leur rendrait la réponse du roi sur les onze heures du soir et qu’après être restés  quelque temps avec M. l’Archevêque de Sens, qu’ils avaient employé à lui exprimer la douleur dont la Compagnie était pénétrée, ils avaient été chez le garde des Sceaux qui leur dit qu’il attendait la réponse du roi ; que sur les minuit, environ une heure et demie après leur retour chez M. le Garde des Sceaux   avec lequel ils étaient restés dans son cabinet pour attendre la réponse du Roi, on la lui avait apporté et que M. le Garde des Sceaux leur ayant fait lecture de la réponse du roi portant que le roi ne recevrait point la délégation de son Parlement parce qu’on ne l’avait pas prévenu, ils s’étaient retirés, M. le Garde des Sceaux n’ayant pas voulu le leur donner par écrit, et étaient remontés dans leurs voitures pour Paris où ils ne faisaient que d’arriver.
         Après quoi Monsieur le Président de Gourgue a pareillement rendu compte de ce qui s’était passé pendant l’absence de Messieurs les députés dont il est fait mention ci-dessus. Et lesdits comptes rendus, la matière d’abord mise en délibération sur celui de Monsieur le Premier Président, les voix prises en la manière accoutumée lorsqu’il  n’y a point de rapporteur ainsi que cela est énoncé en la première délibération portée au présent procès-verbal ;
         Il a été arrêté que les gens du roi seraient chargés de se retirer par devant le roi pour savoir le jour, le lieu et l’heure où il lui plaira recevoir les très humbles et très respectueuses représentations que son Parlement a arrêté devoir lui faire à l’occasion des ordres qu’il avait donné pour arrêter Messieurs Duval et Goislard Conseillers en la Cour.
         Les gens du roi entrés, mandés et placés, debout et découverts, ledit Sieur d’Agout ayant permis d’entrer au parquet pour les avertir, et aux gens du roi de sortir de leur parquet pour entrer dans la grand’ chambre par la porte qui y communique, Monsieur le Premier Président a fait entendre le susdit arrêté, à quoi le procureur général du roi portant la parole, a dit qu’ils ne manqueraient pas d’obéir aux ordres de la Cour et se sont les gens du roi retirés.
         Eux retirés, et  la matière mise en délibération sur le compte rendu par Monsieur le Président de Gourgue de ce qui s’était passé pendant l’absence de Messieurs les députés, les voix prises comme il est d’usage  lorsqu’il n’y a point de rapporteur ainsi qu’il est énoncé à la délibération suivante.
         Il a été arrêté que la Cour consternée par la douleur dont elle est pénétrée, ne peut garder que le plus profond silence.
         Après cette délibération, la Compagnie s’étant aperçu, pendant qu’on prenait les voix, que M. le Duc de Luynes qui n’avait pu arriver au Palais que sur les huit heures du soir à cause  des douleurs que lui occasionnaient un accès de goutte qui s’était porté sur une de ses jambes ( corrigé en marge) de la violence des douleurs que lui avait occasionné un mal qu’il avait à la jambe, en souffrait encore de considérables, et d’autant plus vives que, malgré l’enflure de sa jambe et l’état de souffrance dans lequel il était, il avait passé la nuit (corrigé en marge : une partie de la nuit) au Palais, l’engagea à se retirer ; et M. le Duc de Luynes s’y étant déterminé, ne pouvant plus résister à l’excès de ses douleurs, se leva en témoignant à la Compagnie tous ses regrets d’être obligé de la quitter et se présenta pour sortir à la porte du parquet des huissiers qui donne dans la grande salle, persuadé que les défenses toujours subsistantes de ne laisser sortir qui que ce soit de la grand’chambre n’étaient pas assez rigoureuses pour qu’elles s’étendissent même aux personnes qui se trouveraient incommodées. Mais il s’était trompé car il éprouva de la part dudit Sieur d’Agoust les plus grandes difficultés pour s’en aller malgré l’assurance que lui donna M. le Duc de Luynes que la violence des douleurs le forçait seule à sortir et cela fut au point que le Sieur d’Agoust se permit de lever le manteau de M. le Duc de Luynes pour vérifier lui-même l’état où était sa jambe, et lorsqu’il fut passé, s’étant enfin déterminé à le laisser sortir, il réprimanda avec dureté le factionnaire qui était à la porte de la grand’chambre d’avoir souffert que Monsieur le Duc de Luynes fût entré dans la grande salle. ( corrigé en marge : En effet les huissiers ayant ouvert fort largement la porte du parquet, M. le Duc de Luynes sortit et les quatre ou cinq premiers grenadiers le lassèrent passer, mais à dix pas de la porte, le Sieur d’Agoust apercevant M. le Duc de Luynes, interpella ces grenadiers et leur demanda pourquoi ils avaient laissé sortir M. le Duc de Luynes. Alors M. le Duc de Luynes lui ayant dit qu’il avait mal à la jambe et qu’il allait se coucher, le Sieur d’Agoust ordonna aux officiers de laisser passer M. le Duc de Luynes, ordres qui furent portés à la grille du côté de l’hôtel de Monsieur le Premier Président, par où M. le Duc de Luynes sortit de l’enceinte du Palais.
         Ensuite vers les huit heures du matin, monsieur le Premier Président dit que les gens du roi demandaient à entrer.
         Eux mandés et entrés, toujours avec la permission du Sieur d’Agoust, et placés debout et découverts, le procureur général du roi portant la parole, a dit qu’ayant voulu sortir pour se rendre à Versailles en exécution des ordres que la Cour leur avait donné cette nuit, le Sieur d’Agoust s’y était opposé en leur disant qu’il avait ordre de ne laisser sortir qui que ce soit ;  qu’en conséquence le procureur général avait écrit à Monsieur le Maréchal de Biron pour  lui faire part de l’arrêté de la Cour ; que M. le Maréchal de Biron avait envoyé la lettre à M. le Baron de Breteuil, ministre et secrétaire d’Etat et que M. le Baron de Breteuil venait de lui écrire qu’il allait mettre sa lettre sous les yeux du roi et qu’il lui ferait savoir ses intentions. Et le procureur général ayant fait lecture de la lettre de M. le Baron de Breteuil, lesdits gens du roi se sont retirés.
         Après quoi, vers les huit heures, on remit successivement à Messieurs les Ducs et Pairs qui étaient au Palais une lettre du roi datée du cinq mai qui leur défendait de se rendre au Palais quand même ils y auraient été invités. Cette lettre avait d’abord été portée en leur hôtel et ensuite rapportée au Palais pour leur être remise pendant la séance. Ces Messieurs, après lecture de cette lettre, sont convenus entre eux de ne point se séparer du Parlement et environ une heure après, le Sieur d’Agoust leur fit donner verbalement avis qu’ils pouvaient sortir de la grand’chambre et que les passages leurs seraient ouverts. Sur quoi, Messieurs les Pairs s’étant consultés entre eux, ils ont déclaré qu’ils ne quitteraient point l’assemblée des chambres jusqu’à la fin de la séance.
         Ensuite, sur les onze heures du matin, Monsieur le Premier Président dit que les gens du roi demandaient à enter ;
         Eux mandés, entrés et placés, debout et découverts, le procureur général, qui avait à peine la force de prononcer, portant la parole, a dit que le Sieur d’Agoust était au parquet des huissiers et demandait à entrer pour faire part à la Cour d’ordres du roi, et tomba presque évanoui ; revenu à lui-même et ayant pris place, ainsi que les deux avocats généraux, M. le Premier Président a ordonné de faire entrer le Sieur d’Agoust, lequel étant entré, les gens du roi présents, vint à la barre de la Cour, son chapeau à la main, et après avoir salué la Compagnie, il s’avança dans le parquet, où, debout et découvert, il enjoignit de la part du roi à Messieurs Duval et Goislard de le suivre, toute la Compagnie gardant le plus profond silence, il déclara, après avoir réitéré son injonction, qu’il allait faire entrer le Sieur Larchier, exempt de robe courte, pour lui dire si Messieurs Goislard et Duval étaient présents à la séance et les lui faire connaître ; et la Compagnie gardant toujours le même silence, il se retira et alla à la porte de la grand’chambre qui communique avec le parquet des gens du roi, puis l’ayant ouverte, il fit entrer ledit Larchier et le conduisit à l’entrée du parquet où il lui fit  lecture d’ un ordre du roi qui enjoignait au Sieur Larchier de déclarer si Messieurs Duval et Goislard étaient présents à l’assemblée et de les indiquer. Ledit Larchier, consterné et tout troublé, porte son regard sur les bancs où Messieurs étaient placés et déclara qu’il ne voit pas Messieurs Duval et Goislard ; « vous m’affirmez, lui répliqua le Sieur d’Agoust, que vous ne voyez point ces Messieurs », et  le Sieur Larchier ayant affirmé à nouveau qu’il ne les voyait point, le Sieur d’Agoust interpelle une nouvelle fois la Cour et demande, en regardant le premier président, si Messieurs Duval et Goislard sont présents. Le même silence est gardé, mais sur le visage de ceux qui étaient dans l’assemblée, fut imprimée l’horreur que devait exciter une pareille question ; alors dit le Sieur d’Agoust, je vais me retirer et rendre compte de ce qui s’est passé ; et il se retire avec ledit Larchier qui sortit  avec lui par la porte qui communique avec le parquet des gens du roi.
         Ledit Sieur d’Agoust retiré, Messieurs Duval et Goislard, ainsi que tous Messieurs l’ayant pensé qu’il n’était de la dignité de la compagnie de compromettre ledit Larchier, conviennent de faire entrer le Sieur d’Agoust.
         Ledit Sieur d’Agoust mandé par la Cour et rentré, s’étant également avancé dans le parquet, Monsieur Duval, assis sur les hauts sièges, à la suite du banc où se placent Messieurs les Conseillers-Présidents des Enquêtes et Requêtes, et couvert, prenant la parole, a dit : « Vous venez d’être témoin de la générosité du Sieur Larchier qui n’est qu’un officier de robe courte. Je suis trop pénétré de reconnaissance pour l’exposer à être la troisième victime immolée du despotisme. Je vous déclare donc que je suis l’un des magistrats que vous cherchez. La loi me défend d’obéir aux lettres closes et aux ordres surpris du souverain. C’est pour obéir à la loi que je ne me suis pas nommé jusqu’à ce moment. Je sens enfin qu’il est temps de consommer le sacrifice que j’ai juré de lui faire aux pieds de ses saints autels. Je vous somme donc de me déclarer si dans le cas où je ne vous suis pas volontairement vous avez l’ordre de m’arracher par la force de la place que j’occupe en ce moment. »
         « Oui Monsieur, j’en ai l’ordre, répondit le Sieur d’Agoust, et je l’exécuterai ».
         « Lorsque vous en aurez tenté le moyen, répliqua Monsieur Duval, je verrai ce que je croirai faire ». Et le Sieur d’Agoust ayant déclaré qu’il allait exécuter ses ordres et ayant paru vouloir se retirer pour faire entrer ses soldats, Monsieur Duval dit : « C’en est assez ; pour ne pas exposer la Cour des pairs, le temple de la justice, le sanctuaire des lois à une plus grande profanation je cède à la force et je vais vous suivre ». Puis s’étant levé de son siège et découvert, il adressa la parole à Monsieur le Premier Président et lui dit : « Je vous prie, Monsieur, de permettre que je dépose dans le sein de la Cour la protestation que je fais contre les violences que l’on exerce en ce moment sur ma personne et dont je supplie la Cour de me donner acte, lui déclarant que je les regarde comme attentatoires à la liberté des citoyens en général et à celle des magistrats en particulier, qu’elles sont évidemment la suite des ordres surpris à un roi juste qui a déclaré ne vouloir régner que par les lois, que je cède à la force qui contraint mon corps sans enchainer ma conscience ».
         « J’ose aussi vous conjurer, ajouta-il, de ne pas vous laisser décourager par d’aussi grands malheurs ; oubliez-moi et ne vous occupez que de la chose publique. Je vous recommande tout ce qui m’est cher ; pour moi je puis vous protester que quel que soit le sort qui m’est réservé, jamais les promesses, les menaces, les tourments les plus affreux, la mort elle-même, ne pourront me faire abandonner un seul instant les principes de cette Compagnie, que je mettrai ma gloire à les professer jusqu’à ma dernière heure et qu’enfin je ne permettrai jamais aucune démarche qui ne soit digne d’un magistrat et d’un membre de la Cour des pairs.
         Puis s’étant incliné profondément, il salua Monsieur le Premier Président ainsi que Messieurs les Présidents et toute la Compagnie, après quoi il descendit pour joindre le Sieur d’Agoust qui l’attendait derrière le barreau du côté de la cheminée, Monsieur Duval conservant la plus grande sérénité au milieu des gémissements et des larmes de tous ceux qui composaient l’assemblée ; et la consternation fut telle après son enlèvement que pendant près d’une heure et demie que le Sieur d’Agoust mis de distance entre l’enlèvement de Monsieur Duval et celui de Monsieur Goislard, la Compagnie demeura dans le plus profond silence.
         Enfin, vers les une heure après midi, les gens du roi firent prévenir Monsieur le Premier Président qu’ils demandaient à entrer  et Monsieur le Premier Président en ayant fait part à la Compagnie, les gens du roi furent mandés.
         Eux entré et placés, debout et découverts, le procureur général portant la parole a dit que le Sieur d’Agoust était au parquet des huissiers et demandait à entrer pour faire part à la Cour d’ordres du roi, et ont pris place.
         Le sieur d’Agoust mandé et entré, les gens du roi présents, s’avance dans le parquet, son chapeau à la main, après avoir salué la Compagnie à l’entrée du parquet de la Cour, alors Monsieur Goislard, qui était sur le même banc où avait été assis Monsieur Duval, s’étant couvert, dit au sieur d’Agoust, en lui adressant la parole :
         « Je suis cet autre magistrat que vous cherchez ; il me tarde de subir le même sort que mon malheureux confrère et l’attente dans laquelle vous m’avez laissé depuis son enlèvement a été le plus cruel de mes maux ; comme lui je vous demanderai si dans le cas où je ne vous suivrai pas volontairement vous avez l’ordre de m’enlever de force de la place que j’occupe. Oui Monsieur, répondit le sieur d’Agoust. Comme lui, je cède à la force, continua M. Goislard ».
         Et s’étant levé et découvert, « Monsieur, dit-il en s’adressant à Monsieur le Premier Président, j’ai l’honneur de déposer dans le sein de la cour la même protestation que mon confrère contre les violences que l’on exerce sur moi ; je déclare que j’adhère à tout son contenu et je supplie la Cour de m’en donner acte. Ma jeunesse et mon expérience ne me donnent pas le même droit que Monsieur Duval de réclamer les mêmes sentiments de la Cour. Le zèle dont je suis animé pour le bien public, le nom que je porte et les services rendus par mes pères les réclament pour moi : je prie la Cour de croire que ni les promesses, ni les menaces n’ébranleront mon courage, que je verrai le billot devant moi et la hache levée sur ma tête, sans oublier les exemples que m’ont donné mes Pères et sans abandonner les principes que j’ai puisés dans le sein de la Cour ».
         Puis il descendit de sa place après avoir salué le Premier Président ainsi que tous Messieurs par de profondes inclinations, et la douleur même dans laquelle toute la Compagnie était plongée n’ébranlant point son courage, il vint avec la même fermeté trouver le sieur d’Agoust qui l’attendait dans le barreau du côté de la cheminée.
         Ledit Sieur d’Agoust sortit de la grand’chambre avec Monsieur Goislard ; comme il était encore dans le parquet des huissiers, qu’il avait oublié d’annoncer à la Cour que la garde allait être levée, est rentré seul dans la grand’chambre, ayant laissé Monsieur Goislard dans le parquet des huissiers, et ledit Sieur d’Agoust s’étant avancé jusqu’à la barre de la Cour, il dit qu’il avait oublié de prévenir la Cour  qu’elle était libre et qu’il allait faire retirer les gardes, mais que l’intention du roi était que les portes du Palais fussent fermées après la séance et qu’elles restassent gardées ; après quoi il s’est retiré.
         Ledit Sieur d’Agoust retiré, quelques-uns de Messieurs proposèrent avec toute la douleur dont la Compagnie était pénétrée d’insérer dans les représentations arrêtées hier matin cinq de ce mois le récit de tout ce qui s’est passé  depuis lesdites représentations et prièrent Monsieur le Premier Président de mettre cet objet en  délibération.
         La matière mise en délibération et les voix prises en la manière accoutumée lorsqu’il n’y a point de rapporteur ainsi que cela est énoncé au procès-verbal du vingt novembre dernier, a été fait l’arrêt suivant :
         « La Cour, vivement affectée du spectacle accablant de l’enlèvement de deux magistrats arrachés avec violence du sanctuaire de la justice, au milieu de gens armés qui ont violé l’asile de la liberté publique, a arrêté que les députés chargés de porter au roi les représentations arrêtées le cinq de ce mois, auront l’ honneur de représenter au seigneur roi qu’il aurait été attendri s’il avait pu être le témoin du morne et triste silence qui a suivi et accompagné l’exécution des ordres rigoureux faite au sein de l’assemblée la plus notable, et de la noble fermeté avec laquelle les magistrats enlevés  ont soutenu le coup qui les a frappés, dont les pairs de France et les magistrats ont partagé la sensibilité comme si cette même disgrâce eut été personnelle à chacun d’eux ; que ces sentiments sont l’expression naturelle de l’attachement et du respect qu’inspirent alors les membres du Parlement, les vertus du premier de ces magistrats cher à son corps, précieux à la Nation par des talents supérieurs, un zèle infatigable pour le service du roi et par sa passion vive et active pour la gloire du monarque, le maintien des lois et la liberté publique ; que le second de ces magistrats, jeune encore, a fait concevoir les espérances les plus flatteuses ; il semblerait que les talents personnels deviennent l’objet d’une persécution déclarée ; qu’il peut se faire que les talents soient craints par ceux qui ne sont point attachés au service du roi et à l’honneur du Parlement ».
         « Qu’il semble qu’on ait voulu humilier la magistrature en formant autour de la Cour des pairs un siège militaire qui ne se prépare que contre les places rebelles et non contre les magistrats qui n’opposent aux ennemis des lois que la force des raisons et des principes. »
         « Que ledit seigneur roi est supplié de rendre à leurs fonctions des magistrats aussi utiles au roi par leurs mérites que par leur attachement à la défense des maximes du Royaume ».
         Et l’assemblée a été continuée avec les pairs à demain sept de ce mois
         Après quoi la Cour s’est levée.
         D’Aligre
         De Gourgue
 
 L’  Histoire du siège du Palais  , célèbre opuscule publié peu de temps après l’événement, s’appuie sur le procès-verbal de l’Assemblée des chambres du 5  mai. On y en cite de larges extraits.
 
Du mercredi sept mai
mil sept cent quatre-vingt huit
du matin
toutes les chambres assemblées
 
                 Premier Président                                         
     M. Etienne François d’Aligre,                           
         Présidents                                                              
M. Louis François de Paule le Fèvre d’Ormesson
M. Jean Baptiste Gaspard Bochart de Saron                    
M. Arnaud Guillaume François de Gourgue               
M. Louis Le Peletier de Rozambo                               
M. Omer Joly de Fleury                                           
M. Pierre Gilbert de Voisins
M. Anne Louis Pinon 
M. Louis Michel Le Peletier de Saint Fargeau                                                                  
         Conseillers de la Grand’Chambre, Messieurs            
Duport, Nouet, Lefebvre, Dionis, Titon, Bougongne, de Glatigny, Bruant, Serre, d’Outremont, Fourmestraux, Tandeau,  Robert, Bourgevin, Lecoigneux, Fredy, Pasquier, Phelyppe, Camus, Barbier, Clement, Leriche, Langlois, Mauperché, Constance, Chuppin, Lambert, Clement, Dupuis, Amelot                            
         Messieurs Présidents des Enquêtes et Requêtes
Bourrée, Roland, Chabenat, Anjorant, Dutrousset, Dompierre, Le Rebours
         Messieurs Conseillers des Enquêtes et Requêtes
Masson, Dudoyer, Clement, Desponty,  Ferrand, Anjorant, Tabary, Favières, Boula, Brisson, Robert,  Huguet, Duport,  Brochant, Devilliers, Dupont, Merceron, Fagnier, Foullon, Oursin, Devilliers , Chasseing, De Fay, Talon, Lefevre, Salamon, Rossignol, Paris, Agard, Dupleix, Geoffroy, Cadot, Le Clerc, Berulle, Fourmestraux, Roger, Chaubry, Esmangard, Boissel, Lambert, Geoffroy, Barberé, La Blétonnière, Trudaine, Noblet, Bourgevin, Louis, Sahuguet, Sallier, Trudaine, Perré, Chartier, Chopin, Titon, Morel, Bourrée, Perrotin, Degars, Depont, Lechanteur, Roland, Le Noir, Boula, Robert, Hanmer, Duchesne, Dedelay, Pasquier, Tourolle, Sentier, Blondel, Devin
 
         Ce jour, les chambres assemblées suivant l’indication du jour d’hier, Monsieur le Premier Président a dit que Messieurs étaient instruits que le grand maître des Cérémonies avait apporté à la Cour une lettre de cachet du roi pour s’assembler en corps de Cour demain jeudi huit de ce mois au château de Versailles où le roi devait tenir son lit de justice à midi, la lettre de cachet ayant été portée dans les chambres en la manière accoutumée, et qu’il n’avait point assemblée des chambres à l’instant parce qu’il y avait une assemblée indiquée ce jour d’hui dix heures du matin avec Messieurs les Pairs par un arrêté du jour d’hier.
         Lecture faite de nouveau de la lettre de cachet du roi et la matière sur ce mise en délibération, il a été arrêté que conformément, aux ordres du roi la Compagnie se transporterait demain à Versailles en robes rouges et en corps de Cour pour s’y assembler au château, à l’effet d’assister au lit de justice que le roi doit y tenir et que Monsieur le Premier Président serait chargé de faire audit lit de justice les protestations ordinaires auxquelles seraient jointes des représentations, lesquelles, ainsi que les protestations, seront  rédigées par quatre commissaires qui se retireront à l’instant même en la chambre Saint-Louis.
         Monsieur le Premier Président a nommé pour commissaires Messieurs Lefebvre et Robert Conseillers de Grand’Chambre et Rolland, Conseiller-Président aux Requêtes du Palais, lesquels avec Monsieur le Président Lefèvre, ont passé à la chambre Saint Louis pour travailler à la rédaction desdites protestations et représentations, la Compagnie restant assemblée pour attendre le travail desdits Sieurs commissaires.
         Quelque temps après, Messieurs les commissaires ci-dessus nommés, rentrés en la grand’chambre, ayant pris place, il a été fait lecture des protestations et des représentations par eux rédigées et la matière mise en délibération, elles ont été adoptée ainsi qu’il suit :
« Sire,
« Votre Parlement, attendu le lieu où il plait à Votre Majesté de tenir son lit de justice et dans le cas où seraient portés en cette séance aucuns édits, déclarations ou lettres patentes ou autres objets qui n’auraient pas été communiqués à votre Parlement pour en être délibéré au lieu et en la manière accoutumée, ensemble au cas où il serait introduit des personnes étrangères et où, en votre présence, il serait demandé des suffrages qui ne pourraient être  donnés à voix haute et librement, votre Parlement ne peut, ne doit, ni n’entend donner son avis ni prendre aucune part à ce qui pourrait être fait dans la présente séance ».
         « Sire, tout annonce à votre Parlement une innovation totale dans la constitution de la Monarchie. Votre Parlement a cru pouvoir porter aux pieds du trône, ses alarmes et sa réclamation ; il arrête une députation ; aussitôt on exerce en votre nom, un acte d’autorité absolue contre deux magistrats dont la conduite irréprochable et consacrés toute entière à la conservation des droits de la Monarchie, semblait devoir mériter la bienveillance de Votre Majesté ; tandis que les députés de votre Parlement étaient aux pieds du trône à solliciter l’audience que les circonstances avaient déterminé à demander, le siège de la justice souveraine se trouvait investi par une troupe de gens armés qui commençaient  au milieu de la nuit l’acte de violence qui a été consommé le jour même au milieu de votre Parlement assemblé. On a conseillé à Votre Majesté de ne pas recevoir les députés de votre Parlement parce que Votre Majesté n’avait pas été prévenue par l’envoi des gens du roi, et lorsque le Parlement les a envoyés, on a conseillé à Votre Majesté de ne les pas recevoir. Ces disgrâces, ces efforts que l’on fait sous différentes formes pour empêcher la vérité de parvenir jusqu’au trône, n’annoncent que trop le changement de constitution que les ennemis de la Magistrature avaient tenté dès mil sept cent soixante-onze et qu’ils se flattent de pouvoir consommer en ce moment sous les dehors les plus spécieux ».
         « Votre Majesté arrivant au trône s’était concilié l’amour de son Peuple en rétablissant l’ordre antique et immémorial qui subsiste dans votre Royaume depuis plusieurs siècles. Sire, la Nation française n’adoptera jamais le despotisme qu’on veut aujourd’hui mettre dans vos mains et dont les premiers effets frappent dans toutes les parties du Royaume sur les magistrats les plus fidèles ; nous nous garderons bien, Sire, de détailler dans ce moment tous les malheurs particuliers qui nous affligent ; nous nous contenteront d’exprimer avec la plus respectueuse fermeté que les lois fondamentales de votre Royaume, que votre autorité ne peut être aimée qu’autant qu’elle sera tempérée par la justice et par la conservation des formes anciennes ; que la réclamation de votre Parlement pour que les impôts soient délibérés et consentis par la Nation assemblée en Etats généraux régulièrement convoqué et composés ne doit pas être le motif de l’innovation illégale dont la Magistrature entière est menacée ».
         « C’est l’intérêt de la Nation qui a déterminé tous et un chacun des membres de votre Parlement à ne participer en rien, soit en corps, soit par individu a aucune fonction qui pourrait être la suite des nouveaux projets, en quelque temps, en quelque lieu et avec quelque personne que ce  puisse être et à ne prendre place dans aucun corps qui ne serait pas la Cour elle-même composée des mêmes personnages et revêtue des mêmes droits. Telle est, Sire, la nature des principes de la Monarchie française que (sans le respect desquels) les avantages apparents ou momentanés dont on essayerait de masquer le danger des innovations, ne subsisterait qu’une illusion funeste aux principes qu’il n’est jamais permis de sacrifier ».
         « Cet objet est si important pour Votre Majesté et la tranquillité de ses états que cette considération absorbe en nous toute autre sentiment et nous laisse à peine la force de réclamer votre justice en faveur de ces magistrats enlevés récemment sous nos yeux avec des circonstance que nous n’osons vous peindre ».
         « Votre Majesté reconnaîtra tôt ou tard la justice de nos réclamations et dans quelque circonstance que se trouve votre Parlement, il se rendra à lui-même le témoignage qu’il n’a travaillé que pour son roi et pour la Nation ».
         Après quoi il a été arrêté que les chambres seraient assemblées vendredi prochain, dix heures du matin.
         Ensuite, Messieurs ont demandé qu’on fit entrer les gens du roi pour savoir si le roi leur avait fait savoir ses intentions sur la lettre écrite le jour d’hier par le procureur général  du roi au maréchal de Biron ; (décision prise à )  l’occasion des ordres que le Sieur d’Agoust, capitaine au régiment des Gardes françaises, leur dit avoir de ne laisser sortir qui que ce soit du Palais lorsqu’ils voulurent se retirer par devers le roi pour savoir le jour, le lieu et l’heure où il lui plairait recevoir les représentations arrêtées le cinq de ce mois sur les ordres donnés par ledit seigneur roi d’arrêter Messieurs Duval et Goislard, lettre que M. le Baron de Breteuil, ministre et secrétaire d’Etat, avait écrit à M. le Procureur général devoir mettre sous les yeux du roi.
         Les gens du roi mandés, entrés et placés, debout et découverts, Monsieur le Premier Président leur a dit que la Cour les mandait pour savoir si le roi leur avait fait connaître son intention sur la mission dont ils avaient été chargés hier relativement aux représentations arrêtées le cinq de ce mois à l’occasion des ordres donnés par le roi pour arrêter Messieurs Duval et Goislard Conseillers en la Cour.
         A quoi, Me Antoine Louis Séguier, avocat dudit seigneur roi portant la parole, s’étant couvert, ont dit que le roi n’avait pas voulu les recevoir et leur avait fait dire qu’il ferait savoir ses intentions
         Après quoi ils se sont retirés.
         Et la Cour s’est levée.
         D’Aligre
 
Flammermont, Remontrances op.cit.,  fait un résumé des séances des 5 et 7 mai pp. 747-749. Il aborde ensuite directement le lit de justice du 8 mai :
 
On n’a pas reproduit dans cette publication des P-V des Assemblées des chambres du Parlement de Paris  du 11 avril au 7 mai 1788 le procès-verbal  des préparatifs de ce lit de justice dans la mesure où il ne s’agit pas d’un procès-verbal d’Assemblée des  chambres. Cela n’enlève rien à l’intérêt du document qui présente le regard que porte le Parlement sur l’événement.
 
 


[i] On a toutefois régulé l’emploi des majuscules. Le rédacteur des P-V en fait un usage très excessif au point d’en rendre la lecture très difficile. On a également supprimé le « y » à la fin de certains mots finissant par « i », toujours pour faciliter la lecture. Le style parlementaire est déjà assez lourd !

[ii]  Note sur la composition du Parlement d’après l’Almanach royal 1788, pp. 301sq. et pour les pairs et princes, pp. 147 sq.
1 premier président
8 présidents
6 conseillers d’honneur
37 conseillers de Grand’Chambre, soit pour la Grand’Chambre, 58 magistrats
23 conseillers pour la première Chambre des Enquêtes ; 24 pour la deuxième ; 24 pour la troisième ; 14 conseillers pour la Chambre des Requêtes ; 8 conseillers-présidents des Enquêtes et Requêtes, soit deux par chambre, soit pour les Enquêtes et Requêtes, 93 magistrats.
4 princes du sang.
6 pairs ecclésiastiques et 38 pairs laïcs, soit 42 pairs
Soit un total théorique de 197 membres (on ne compte pas les magistrats honoraires).
            Mais il est rare qu’il y ait plus de 10 pairs en séance et le total des conseillers des Enquêtes et Requêtes tourne autour de la soixantaine, ce qui donne un total d’environ 120 présents.

[iii] P-V Assemblée des chambres du 20 novembre 1787, AN  X1B 8987 : «  Savoir, de Messieurs les Présidents, mais sans les nommer, Monsieur le Premier Président tenant son bonnet à la main et faisant à chacun d’eux une inclination, puis s’étant recouvert, du pair ecclésiastique, des pairs laïcs en commençant par celui revêtu de la plus ancienne pairie, de Monsieur Boula doyen et de ceux de Messieurs les Conseillers de Grand’Chambre qui étaient après lui sur le troisième banc, de Messieurs Titon et Bougongne qui occupaient les dernières places de chacun des deux bancs sur lesquels les pairs étaient placés dans l’enceinte du parquet et ensuite de celles des autres de Messieurs les Conseillers de Grand’Chambre qui étaient dans les bancs mis dans l’enceinte du parquet et sur celui de Messieurs les Présidents et Conseillers clercs aux hauts sièges, de Monsieur le Conseiller d’honneur, de Messieurs les Conseillers-Présidents des Enquêtes et Requêtes et enfin de Messieurs les Conseillers des Enquêtes et Requêtes ». 

[iv] P-V Assemblée des chambres du 7 décembre 1787, AN  X1B 8987 : « Après l’avis de Monsieur le Rapporteur, celles de Messieurs Boula doyen, Titon et Bougongne qui occupent les dernières places de chacun des trois bancs sur lesquels les pairs étaient placés, puis celles de Messieurs les Conseillers de Grand’Chambre qui étaient sur les bancs placés dans l’enceinte du parquet et ensuite celles des autres Messieurs les Conseillers de Grand’Chambre qui étaient sur les bancs de Messieurs les Présidents et conseillers clercs aux hauts sièges et sur ceux mis devant ledit banc de Messieurs les Conseillers clercs aux hauts sièges, du conseiller d’honneur, des conseillers-présidents des Enquêtes et Requêtes, des conseillers des Enquêtes et Requêtes, des ducs et pairs laïcs,  en commençant par celui revêtu de la dernière pairie et des pairs ecclésiastiques en suivant le même ordre d’érection de pairie, Monsieur le Président les nommant du nom de leur pairie et étant couvert, puis de Monsieur le Prince de Condé et de Monsieur le Prince de Bourbon princes du Sang mais sans les nommer, Monsieur le Premier Président tenant son bonnet à la main et faisant seulement à chacun une profonde inclination, et enfin celles de Messieurs les Présidents, aussi sans les nommer et découvert, leurs voix étant prises de  la même manière que celle des princes ».

[v] Michel Bottin, « Le budget de 1788 face au Parlement de Paris. Novembre 1787-Avril 1788 », in Etat, Finances et Révolution française, Comité pour l’Histoire économique et financière de la France, Paris, Imprimerie Nationale, 1991, pp. 67-79, à la note 23.

[vi] Il se tient souvent avant l’Assemblée des chambres une réunion de la Grand’ Chambre au cours de laquelle on reçoit les lettres patentes portées à l’enregistrement par le procureur du roi. Si l’objet est de peu d’importance la Grand’Chambre procède à l’enregistrement ; si l’affaire est importante la Grand’ Chambre arrête une Assembles des chambres dans la matinée ou plus rarement dans l’après-midi. Il est rare que des pairs soient présent dans ces séances de Grand’Chambre. C’est cependant le cas  le mercredi 30 avril : il y a d’abord eu une séance de Grand’Chambre après la seconde audience pour recevoir l’édit de création de la juridiction consulaire de Beauvais. Sont présents : le premier président, 16 conseillers et le duc de Praslin. On y décide de convoquer une seconde séance de Grand’Chambre immédiatement après pour enregistre l’édit, ce qui est fait sans difficulté. Sont présents : 3 présidents, 24 conseillers et 7 pairs ; ceux-ci sont sans doute en avance pour assister à l’Assemblée des chambres qui suit et qui avait été prévue pour dix heures !

[vii] « Seve » sur le Procès-verbal.

[viii] Mais il n’a pas eu d’assemblée des chambres les trois mars ! Le procureur général dans ses conclusions cite un extrait « Considérant que les entreprises de S.M. sur la magistrature ont évidemment pour cause le parti qu’a pris la cour de résister à deux impôts désastreux, de se reconnaître incompétente de subsides, de convoquer l’assemblée des états généraux, de réclamer la liberté individuelle des citoyens » et indique qu’il sera « rendu compte le lundi 5 mai ». Voir la note qui suit. Il s’agit donc de l’arrêté, retouché par une main malveillante, de l’arrêté du 3  mai.
Trois questions : pourquoi la Cour ne l’a-t-elle pas précisé ? Qui a aussi rapidement diffusé l’extrait ? Qui a retouché le texte ?
[ix] Les conclusions du procureur général sont placées avant le procès-verbal de l’Assemblée des chambres du 3 mai. Voici le P-V de cette partie de la séance :
« Du lundi cinq mai mil sept cent quatre-vingt huit
Du matin
Les chambres assemblées les pairs y séant
            « Ce jour toutes les chambres assemblées les pairs y séant, les gens du roi sont entrés et Me Antoine Louis Séguier avocat général dudit seigneur roi portant la parole, ont dit :
            Monsieur,
            Nous venons de prendre communication de l’imprimé que la Cour nous a fait remettre. Outre la clandestinité et le défaut de nom de l’imprimeur et du lieu de l’impression, nous avons remarqué des mots supprimés et qui sont remplacés par des lettres capitales, en sorte que par cette altération criminelle et cette abréviation aussi insidieuse que criminelle, il semble qu’on ait cherché à donner le change au public et à présenter un sens directement opposé aux véritables intentions de la Cour. Elle en est trop pénétrée du respect qu’elle doit à son roi et donc elle ne s’écartera jamais pour se permettre de pareilles expressions ; et sa fidélité exige non seulement un désaveu authentique mais une flétrissure éclatante. Elle se doit à elle-même cette espèce de réparation publique et à la France un témoignage solennel de la pureté de ses sentiments.
            Nous avons pris sur cet imprimé des conclusions par écrit que nous laissons à la Cour avec ledit imprimé.
            Et se sont les gens du Roi retirés après avoir laissé le tout sur le bureau.
            Eux retirés.
            Vu l’arrêté de la Cour du trois mai présent mois, toutes chambres assemblées les pairs y séant.
            Vu pareillement un imprimé ayant pour titre : Arrêté. Commençant par ces mots, « La Cour, toutes les chambres assemblées » et finit par ceux-ci « dont il rendra compte lundi 5 mai ». Dans lequel imprimé se trouve notamment la phrase suivante : « Considérant que les entreprises de S.M. sur la magistrature ont évidemment pour cause le parti qu’a pris la cour de résister à deux impôts désastreux, de se reconnaître incompétente de subsides, de convoquer l’assemblée des états généraux, de réclamer la liberté individuelle des citoyens ». Ledit imprimé sans nom d’imprimeur ni du lieu de l’impression contenant cinq pages et demie ensemble les conclusions du procureur général du roi, oui le rapport de M. Gabriel Tandeau, conseiller, la matière mise en délibération.
            La Cour a ordonné et ordonne que ledit imprimé sera lacéré et brûlé dans la cour du Palais, au pied du grand escalier d’icelui, par l’exécuteur de la haute justice comme contenant une falsification insidieuse contraire au respect du Roi et faite à dessein d’imputer à la Cour des sentiments et des expressions incompatibles avec le profond respect pour la personne sacrée du Roi, dont la Cour ne s’écartera jamais et ne cessera jamais de donner l’exemple aux autres citoyens à quelque extrémité qu’elle se trouve réduite. Enjoint à tous ceux qui ont des exemplaires de la apporter au greffe de la Cour pour y être supprimés, fait défense à tous les libraires, imprimeurs d’imprimés, de de vendre et débiter ledit imprimé et à tous les colporteurs distributeurs et autres de le colporter ou distribuer à peine d’être poursuivis extraordinairement et punis selon la rigueur des ordonnances, ordonne qu’à la requête du procureur général du roi  et par devant le conseiller rapporteur que la Cour commet à cet effet, il sera informé contre les auteurs, imprimeurs et distributeurs dudit imprimé, pour l’information faite et communiqué au procureur général du roi être par lui requis et par la Cour ordonné ce qu’il appartiendra. Comme aussi ordonne que le présent arrêt sera lu et publié sur le champ les portes ouvertes.
D’Aligre »
            « Et ledit jour, cinq heures de relevée, ledit imprimé ayant pour titre : Arrêté. Commençant par ces mots, « La Cour, toutes les chambres assemblées » et finit par ceux-ci « dont il rendra compte lundi 5 mai », a été en exécution de l’arrêt de ce jour, lacéré et brûlé par l’exécuteur de de la haute justice au pied du grand escalier en présence de nous Dagobert Etienne Ysabeau écuyer, l’un des greffiers de Grand’Chambre, assisté de deux huissiers de la Cour.
Ysabeau » 
 
 
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