Henri Isaïa (1943-2017)

 et l’Histoire du droit des Finances publiques

 

 
 
Henri Isaïa a pratiqué les Finances publiques de 1967 à 2003, d’abord comme enseignant de droit public à la Faculté de droit de Nice puis à partir de 1990 comme magistrat à la Cour administrative d’appel de Nantes. On ne résumera pas ici en quelques lignes cette double carrière au service du droit mais le décès d’Henri Isaïa est l’occasion de mettre en valeur son apport à l’Histoire du droit des Finances publiques à travers les trois volumes d’études qu’il a initiées et coordonnées, avec l’économiste Jacque Spindler, de 1986 à 1988.
La démarche scientifique empruntée par les coordonnateurs de ces ouvrages mérite en effet d’être soulignée tant elle était nouvelle. Elle remettait en question la frontière qui sépare l’histoire du droit du droit positif, particulièrement ici du droit public.  La recherche historique juridique est en effet généralement assurée par les historiens du droit, pas par leurs collègues positivistes, même si les publicistes font toujours un peu d’histoire dans leurs enseignements et leurs recherches, le plus souvent pour les besoins d’une introduction. Rares sont en tous cas ceux qui le font comme un moyen de mise en perspective dans le cadre d’une recherche. Les exigences du droit positif écartent presque nécessairement l’intérêt de l’histoire. C’est donc un véritable défi qu’Henri Isaïa a relevé en faisant travailler ses collègues publicistes sur un champ historique.
 D’autant plus que Henri Isaïa poursuivait un objectif ambitieux. Il voulait aborder dans cette œuvre collective l’histoire de sa discipline différemment, comme un moyen de contrebalancer le positivisme ambiant. Il souhaitait éclairer, le « processus historique de sédimentation du droit ».  Son projet, auquel il faut pleinement associer Jacques Spindler, a rassemblé plus d’une trentaine d’auteurs, dont vingt et un publicistes, cinq économistes et quatre hauts-fonctionnaires.
On doit saluer à la fois le but et la méthode. D’abord parce que Henri Isaïa a fait sauter le cloisonnement entre l’Histoire du droit et les disciplines de droit positif. En second lieu parce que cet engagement historien des publicistes, mais aussi celui des praticiens et des économistes, repoussait la frontière de l’histoire vers les périodes contemporaines ; ainsi, des réformes qui étaient encore il y a peu de temps dans l’actualité se retrouvaient mises en perspective historique. Là où les historiens du droit peinaient à atteindre la fin du XIXe siècle, Henri Isaïa, et Jacques Spindler, s’engageaient sans complexe vers le XXIe siècle. On peut certes regretter qu’un seul historien du droit -l’auteur de ces lignes- ait participé à l’aventure mais force est de constater que tous les contributeurs de cette œuvre ont emprunté avec talent les voies et moyens de l’histoire du droit des Finances publiques. Et ce n’est pas le moindre des mérites des concepteurs de ces ouvrages que d’avoir provoqué ces conversions ! L’auteur de ces lignes, lui-même, peut -et doit- témoigner de sa propre conversion et de l’attention que lui prêta Henri Isaïa dans sa quête de l’histoire du droit budgétaire.
Mais il ne suffit pas de constater l’originalité de l’œuvre. Il faut aussi chercher à comprendre le ressort profond qui a animé la démarche d’Henri Isaïa. Peut-être est-ce tout simplement son sujet de thèse. Henri Isaïa a en effet soutenu en 1973 une thèse sur la personnalisation de l’impôt sur le revenu. Le sujet avait une forte épaisseur historique puisqu’il portait sur la période 1918-1972. Peut-être, aussi, son directeur de thèse, Louis Trotabas, a-t-il influencé cet intérêt pour la perspective historique ? Ce maître des Finances publiques avait le goût de l’histoire politique et constitutionnelle du XIXe siècle. La dédicace adressée au Professeur Trotabas dans la préface du troisième volume n’est pas de pure forme.
Il en ressort une histoire novatrice qui s’écarte des approches traditionnelles, financières et fiscales, pour aborder l’Histoire des Finances publiques de façon résolument juridique. L’expression « histoire du droit des Finances publiques » caractérise cette position. Les textes fondateurs ou majeurs qui appuient les commentaires et analyses ne permettent pas de douter de l’orientation juridique de cette histoire. Celle-ci se présente comme une histoire des Finances publiques de la période contemporaine qui réussit à mettre en perspective les réformes de la Ve République jusqu’à la fin des années 1980.
Cette Histoire du droit des Finances publiques fait aujourd’hui partie des ouvrages de référence de la discipline. Ses contributions, marquées au sceau de l’histoire, ne vieilliront pas et des générations de chercheurs viendront encore pendant longtemps les consulter. C’est pour souligner cette richesse scientifique et aussi pour en accroître la visibilité sur la toile que je publie ci-dessous la liste des contributions. Que cet hommage à Henri Isaïa prolonge ainsi son œuvre.
 
Michel Bottin, janvier 2018
 
 

Histoire du droit des finances publiques. Vol. 1. Les grands textes commentés du droit budgétaire et de la comptabilité publique, Etudes coordonnées par Henri Isaïa et Jacques Spindler, Economica, 1986, 443 p.

 
H. Isaïa et J. Spindler, Avant-propos, pp. 1-2.
 
I.                   Les grands textes de la période classique
 
Michel Bottin, Introduction historique au droit budgétaire et à la comptabilité publique de la période classique, pp. 3-31.
 
Lysiane Cartelier et Hubert Charles, A la rencontre du droit et de l’économie : la fondation du droit budgétaire, pp. 35-57.
 
Jacques Magnet, La comptabilité publique à l’âge classique, pp. 58-74.
 
Textes annexés :
Ordonnance du roi concernant la comptabilité et la justification des dépenses publiques (14 septembre 1822), pp. 76-78.
Ordonnance du roi portant règlement général sur la comptabilité publique (31 mai 1838), pp. 79-140.
Décret impérial portant règlement général sur la comptabilité publique (31 mai 1862), pp. 141-222.
Loi du 10 août 1922 relative au contrôle des dépenses engagées, pp. 223-224.
 
II.                Les grands textes de la période moderne
 
Huguette Durand et Joël Pascal Biays, L’avant-projet de loi organique portant réforme budgétaire élaboré par la Commission présidée par le contrôleur général Jacomet (juin 1949-juillet 1952), pp. 227-248.
Texte en annexe, pp. 249-269.
 
Jacques Basso et Jean-Marie Rainaud, Le décret organique du 19 juin 1956 déterminant le mode de paiement du budget de l’Etat, pp. 270-287.
Texte en annexe, pp. 288-309.
 
Joël Molinier, L’ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances, pp. 310-330.
Texte en annexe, pp. 331-344.
 
Paul Guerrier, Le décret du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique et le décret du 13 novembre 1970 relatif à la déconcentration du contrôle financier, pp. 345-380.
Texte en annexe, pp. 381-425.
 
Henri Isaïa et Jacques Spindler, Le droit budgétaire et la comptabilité publique à l’approche du XXIe siècle : essai d’analyse prospective, pp. 426-443.
 
 

 Histoire du droit des Finances publiques. Vol 2.  Les grandes étapes de l’évolution de la fiscalité d’Etat. Textes à l’appui, Etudes coordonnées par Henri Isaïa et Jacques Spindler, Economica, 1987, 690 p.

 
H. Isaïa et J. Spindler, Avant-propos, pp. 5-6.
 
I.                   L’impôt sur le revenu
 
Henri Isaïa et Jacques Spindler, La création d’un système d’imposition des revenus, pp. 13-46.
Textes en annexe :
Loi du 29 mars 1914 concernant la contribution foncière des propriétés bâties et non bâties et l’impôt sur le revenu des valeurs mobilières, pp. 47-60.
Loi du 15 juillet 1914 portant fixation du budget général des dépenses et des recettes de l’année 1914, pp. 61-76.
Loi du 31 juillet 1917 portant suppression des contributions personnelle-mobilière, des portes et fenêtres et des patentes et établissement d’un impôt sur les diverses catégories de revenus, pp. 77-89.
 
Pierre Beltramme, L’apparition de l’impôt sur les sociétés et l’unification de l’impôt sur le revenu des personnes physiques, pp. 91-112.
Textes en annexe :
Décret du 9 décembre 1948 portant réforme fiscale, pp.113-132.
Loi du 28 décembre 1959 portant réforme du contentieux fiscal et divers aménagements fiscaux, pp. 133-154.
 
Pierre Goyard, L’adaptation de la fiscalité des entreprises aux exigences de l’économie moderne, pp. 155-172.
Texte en annexe :
Loi du 12 juillet 1965 modifiant l’imposition des entreprises et des revenus de capitaux mobiliers, pp. 173-188.
 
Bernard Plagnet, La consécration par le droit fiscal de la définition économique du revenu ? pp189-206.
Texte en annexe :
Loi du 19 juillet 1976 portant imposition des plus-values et création d’une taxe forfaitaire sur les métaux précieux, les bijoux, les objets d’art, de collection et d’antiquité, pp. 207-218.
 
II.                L’impôt sur la dépense
 
Patrick Boisselier et Robert Teller, Vers la neutralité des taxes sur le chiffre d’affaires : la création de la taxe sur la valeur ajoutée, pp. 221-242.
Texte en annexe :
Loi du 10 avril 1964 portant réforme fiscale, pp. 243-252.
 
Georges Egret, L’élargissement du champ d’application de la taxe sur la valeur ajoutée, pp. 253-270.
Texte en annexe :
Loi du 6 janvier 1966 portant réforme des taxes sur le chiffre d’affaires et diverses impositions d’ordre financier, pp. 271-296.
 
François Labie, L’harmonisation de la T. V. A. dans le cadre de la Communauté économique européenne, pp. 297-324.
Textes en annexe :
6eme directive du Conseil des communautés européennes du 17 mai 1977 en matière d’harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sue le chiffre d’affaires. Système commun de la taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme, pp. 325-370.
Loi du 29 décembre 1978 : Loi de finances rectificative pour 1978, pp. 371-385.
 
III.              L’impôt sur le capital
 
Alexandre Kurgansky, Les fondements du régime actuel des droits d’enregistrement, pp. 388-414.
Texte en annexe :
Loi du 22 frimaire an VII sur l’enregistrement, pp. 415-460. 
 
Cyrille David, L’opposition du réalisme économique et du droit civil en matière de droit d’enregistrement des sociétés, pp. 461-482.
Texte en annexe :
Loi du 12 juillet 1965 modifiant l’imposition des entreprises et des revenus de capitaux immobiliers, pp. 483-484.
 
Jean-Loup Hay, L’impôt général et actuel sur le capital : soixante-dix ans de débat pour cinq ans d’expérimentation, pp.485-504.
Texte en annexe :
Loi du 30 décembre 1981 : loi de finances pour 1982, 505-514.
 
IV.             L’administration fiscale
        
Dominique de La Martinière, L’évolution des structures de l’administration fiscale, pp. 517-528.
Texte en annexe : Loi du 6 janvier 1948 relative à certaines dispositions d’ordre fiscal, pp. 529-530.
Décret du 16 avril 1948 relatif à l’organisation de l’administration centrale du ministère des finances, p. 531.
 
V.                Le contentieux fiscal
 
Serge Passeron, La recherche d’un équilibre entre les pouvoirs de l’Administration fiscale et les droits du contribuable, pp. 535-574.
 
Christian Laroche, La structure et la nature du contentieux d’imposition, pp. 575-592.
Textes en annexe :
Loi du 27 décembre 1963 portant unification ou harmonisation des procédures, délais et pénalités en matière fiscale, pp. 593-612.
Loi du 29 décembre 1977 accordant des garanties de procédures aux contribuables en matière fiscale et douanière, pp. 613-621.
 
Michel Bazex, Les origines et l’évolution du partage des compétences entre les juridictions judiciaires et administratives, pp. 623-654.
Texte en annexe :
Décret de l’Assemblée nationale des 6 et 7 septembre 1790 sur la suppression des anciens offices et tribunaux, pp. 65-660.
 
Conclusion
 
Pierre Llau, Perspectives d’évolution de la fiscalité d’Etat en France (1945-1985), pp. 663-688.
 
Bibliographie, pp. 689-690.
 
 

Histoire du droit des finances publiques. Vol. 3. Les grands thèmes des Finances locales, Etudes coordonnées par Henri Isaïa et Jacques Spindler, Economica, 1988, 599 p.

 
 
H. Isaïa et J. Spindler, Avant-propos, pp. 3-4.
 
Introduction
 
Robert Hertzog, L’éternelle réforme des finances locales, pp. 9-93.
 
I.                   Le droit budgétaire et comptable
 
Michel Bottin, L’autorisation budgétaire, pp. 97-126.
 
Loïc Philip, Le contrôle des actes budgétaires, pp. 127-156.
 
Paul Guerrier, La comptabilité du secteur public local, pp. 157-264.
 
II.                Les ressources
 
Thierry Lambert, L’assiette des impôts locaux : notes pour une recherche historique, pp. 267- 292.
 
Jacques Grosclaude, L’impôt foncier : mythe ou panacée ? pp. 293-316.
 
François Labie, Les concours financiers de l’Etat, pp. 317-380.
 
Louis Balmond et Michel Paillet, L’emprunt local. pp. 381-465.
 
III.              Les charges
 
Michel Paul, Les fonctions budgétaires, pp.469-490.
 
Gilbert Orsoni, Les dépenses obligatoires, pp. 491-518.
 
Michel Bouvier et Marie-Christine Esclassan, Les interventions économiques des collectivités locales, pp. 519-540.
 
Conclusion
 
Henri Isaïa et Jacques Spindler, Développement local et autonomie financière des collectivités décentralisées : quelques réflexions sur les perspectives d’avenir, pp. 543-599.
 
 
 
 
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