Unité nationale et unité budgétaire sous la Révolution
 
 
 
« L’Etat est un, les départements ne sont que les sections d’un même tout »
 
Approche révolutionnaire d’un principe budgétaire. 1789-1794
 
 
 
Pour citer : Michel Bottin, « L’Etat est un, les départements ne sont que les sections d’un même tout. Approche budgétaire d’un principe révolutionnaire. 1789-1794 », in Etudes et documents VI, Comité pour l’Histoire économique et financière de la France, Imprimerie Nationale, Paris, 1994, pp. 191-206.
 
 
         Le principe d’unité et d’indivisibilité de l’Etat s’affirme progressivement sous la Révolution, entre 1789 et 1793, d’abord en réaction contre le pluralisme juridique provincial de l’ancienne France, ensuite contre le courant fédéraliste. C’est au cœur du débat sur l’organisation territoriale et la répartition des compétences, départementales en particulier, qu’il s’est développé de la façon la plus féconde. Thouret, maître d’œuvre de la réforme de décembre 1789 sur l’administration du royaume, a parfaitement fait ressortir dès le mois de novembre 1789 l’absolue nécessité de bâtir la Constitution sur ce principe d’unité territoriale, « loi suprême qui lie et subordonne les différentes parties au tout. L’intérêt de ce Tout peut seul déterminer les lois constitutionnelles ; et rien de ce qui tiendrait aux systèmes, aux préjugés, aux habitudes, aux prétentions locales ne peut entrer dans la balance »[1].
         Le propos éclaire la réforme des 14 et 22 décembre 1789 portant division du territoire en communes, districts et départements. Il est repris avec plus de netteté encore par l’« instruction sur la formation des Assemblées représentatives et des corps administratifs » du 8 janvier 1790 : « L’Etat est un. Les départements ne sont que les sections d’un même tout »[2].
         Placés dans l’étroite dépendance du roi et de l’Assemblée, les départements étaient investis de très larges compétences en matière d’administration générale : répartition de l’impôt direct, application des lois, surveillance des districts et communes, maintien de l’ordre, travaux publics, etc. L’étendue des compétences, l’élection des administrateurs, la suppression des intendants, ont parfois conduit à penser que la réforme était résolument décentralisatrice. On a vu à travers l’opinion de Thouret qu’il n’en était rien et que les Constituants n’ont songé à aucun moment prendre en compte l’intérêt particulier et à faire des départements des centres de décision[3]. Ils ne sont, ainsi que le précise Jean-Baptiste Target, l’ancien avocat au parlement de Paris, député du Tiers, que des « agents de l’exécutif »[4].
         On sait comment, au cours des mois qui suivent, les départements emploieront parfois ces compétences au service de l’intérêt local, attitude dénoncée par les partisans de l’unité intégrale comme « fédéraliste ». L’élaboration du texte de la Constitution du 3 septembre 1791 donnera l’occasion de renforcer le principe d’unité pour éviter une telle dérive. C’est Rabaut-Saint-Etienne qui réclamera le 9 août 1791 cette mise au point : « Afin qu’on ne puisse jamais dans la Constitution trouver un argument pour une division en Républiques fédératives, je demande que ce principe-là soit consacré et qu’il soit dit : le royaume est un et indivisible. Son territoire est distribué en départements. Chaque département en districts, chaque district en cantons »[5].
         Comment s’est traduite en matière financière cette soumission au Tout national ? La section 3 du décret du 22 décembre 1789 en renferme les principes : l’administration départementale exerce des compétences fiscales « sous l’inspection du corps-législatif » ; ce contrôle se double pour les matières d’administration générale d’une approbation royale[6]. Seule l’« expédition des affaires particulières de tout ce qui s’exécute en vertu de délibérations déjà approuvées » ne nécessite pas l’ « autorisation spéciale du roi »[7]. Peu de voix se feront entendre au cours des débats pour demander davantage d’autonomie[8].
         Le financement des dépenses était réalisé au moyen d’assignations autorisées sur le produit des contributions nationales (art. 1). Dépourvus de ressources propres, départements et districts -à la différence des communes- se trouvaient donc dans la totale dépendance de l’Assemblée. Celle-ci pouvait néanmoins les autoriser à établir un impôt spécial ou à faire un emprunt pour une dépense particulière « sauf à pourvoir à l’établissement des moyens propres à leur procurer les fonds nécessaires au paiement des dettes et des dépenses locales, et aux besoins imprévus et urgents » (art.6). Cette dernière mesure contient en germe le possible développement d’un financement local pour des besoins locaux, même sous contrôle étroit de l’Assemblée.
         Et si on assurait le paiement des dépenses départementales au moyen d’impositions locales ? La question est donc posée dès le mois de décembre 1789 ; il deviendra de plus en plus tentant de profiter de cette ouverture de la loi : le Trésor public en sera soulagé d’autant… et les administrateurs tenus de se limiter au strict nécessaire, sous peine de mécontenter leurs administrés, contribuables et électeurs. A l’automne 1790, le système de la dotation directe par le Trésor public est ainsi concurrencé en certains domaines par l’imposition spéciale.
         Au printemps 1791, la part du financement direct se réduit. Les dépenses des départements -et des districts- sont assurées au moyen de centimes additionnels aux impôts directs. Le pas est franchi. Un « fonds particulier des départements » apparaît en marge du budget général de l’Etat pour regrouper l’ensemble des recettes et des dépenses départementales. L’unité budgétaire, déjà touchée par la création de la caisse de l’Extraordinaire, se trouve à nouveau altérée par cette innovation. Mais, orientation plus lourde de conséquences, chaque département est maintenant en mesure -toujours sous contrôle étroit du roi et de l’Assemblée- d’organiser son budget particulier.
         L’évolution tournera court. D’abord parce que la détresse des finances interdira toute régulation du système. Ensuite et surtout, parce que les partisans de l’unité absolue y décèleront un germe de fédéralisme. Deux bonnes raisons de mettre fin à l’expérience budgétaire départementale.
 
Le financement des dépenses départementales par la dotation et
l’imposition spéciale
                                                                        
               Le décret du 22 décembre 1789 mettait à la charge du département un ensemble de charges concernant le logement et les indemnités des personnels de l’administration départementale, le « soulagement des pauvres et des mendiants », les ateliers de secours pour chômeurs, les encouragements à l’agriculture et à l’industrie et surtout, les dépenses de travaux publics[9]. Des dispositions ultérieures y ajouteront les dépenses des palais de justice et des prisons.
               Ce décret offrait, on l’a vu, deux possibilités de financement de ces dépenses, l’une générale, au moyen de dotations par le Trésor, l’autre exceptionnelle, par l’impôt local ou l’emprunt. Les deux possibilités furent utilisées parallèlement à partir du printemps et de l’été 1790, époque où les commissions intermédiaires des états et des assemblées provinciales laissent la place aux nouvelles administrations.
 
Les dotations
 
               Le premier mode de financement fut inauguré par un décret du mois de mai 1790 qui mettait à disposition de chaque département une somme de 30.000 livres « pour être employée en ateliers de secours »[10]. Un autre décret, du 16 décembre 1790, accordait un fonds de 15 millions de livres « pour subvenir aux dépenses des travaux de secours », en faveur de la « classe indigente »[11].  Cette masse était divisée en deux parts : 6.640 000 livres à répartir de façon égale entre les 83 départements, soit 80.000 livres par département et 8.360.000 livres à répartir entre les départements les plus défavorisés. Les instructions adressées par ordre du roi aux directoires de département insistaient sur « l’utilité des dépenses » et demandaient aux départements de fournir toutes les instructions pour leur emploi en « s’élevant au-dessus de l’amour propre du moment »[12]. Les travaux ne devaient être entrepris que dans les seuls lieux où l’utilité générale les appelait[13]. Seules ces dépenses seraient approuvées.
La répartition des 8.360.000 livres restantes fut réalisée par un décret du 16 juin 1771 qui ventilait 2.600.000 livres entre les départements jugés les plus défavorisés et réservait 5.760.000 livres à employer ultérieurement selon les mêmes critères[14]. A la demande de certains députés, tel Ramel-Nogaret, qui s’inquiétaient de ce que cette dernière répartition ne profitât une nouvelle fois qu’aux seuls départements défavorisés, La Rochefoucault-Liancourt, rapporteur du projet, objecta que certains départements, non compris dans la première distribution, étaient assez riches pour s’en passer, tel celui du Nord[15].
 
Les impositions spéciales
 
Le second mode de financement se situe tout à l’opposé. Ce n’est plus l’Assemblée qui ventile une somme mais le département -ou le district- qui est autorisé à imposer ses contribuables pour une opération déterminée : le premier exemple de cette méthode de financement apparaît dans le décret du 3 décembre 1790 qui définit les conditions auxquelles les corps administratifs pourront être autorisés à établir des impositions ou des emprunts[16] : on y précise, article 2, que « les impositions ou emprunts ne pourront avoir lieu sans autorisation spéciale du Corps législatif ». Les emprunts « ne seront autorisés que dans le cas où l’imposition ne pourrait avoir lieu sur les districts par des circonstances particulières, telles que les surcharges momentanées d’impôts, des événements de grêle, inondations, incendies ou autres » (art.4). Le décret précise que l’imposition spéciale est possible en particulier pour financer les frais de déplacement à la « fédération générale » qui s’est tenue à Paris le 14 juillet. L’Assemblée autorise les administrations de département à approuver et à homologuer les délibérations des districts imposant les sommes nécessaires.
La situation la plus fréquente concerne le logement des corps administratifs de département et de district et les dépenses de personnel et de secrétariat. Deux décrets, l’un du 2 septembre 1790, l’autre du 16 octobre 1790, définissent le mode de financement de ces dépenses.
Le décret du 2 septembre fixe les traitements des administrateurs de directoire, de département et de district[17] et demande aux directoires de former « un état par aperçu des sommes auxquelles ils estimeront que leurs frais de service doivent être économiquement réduits[18].
Les districts devaient adresser leurs états aux départements, et ceux-ci à l’Assemblée. Provisoirement, les directoires de département disposaient d’une somme de 10 000 livres pour frais de loyer, salaire des commis et « menues dépenses de l’année[19] ». L’article 9 prévoyait des « frais de premier établissement », d’un maximum de 3.000 livres pour les départements et de 1.000 livres pour les districts [20]. Enfin, l’Assemblée établissait la règle de l’imposition des dépenses de district -corps administratif et tribunal- sur les contribuables de la circonscription. Cette dernière disposition éclaire la volonté de l’Assemblée en matière de dépenses locales ; deux constatations s’imposent : d’abord elle accepte de faire financer un poste, important, de dépenses locales par des recettes locales ; ensuite elle applique cette règle aux seuls districts, pas aux départements. L’Assemblée en attend deux avantages : d’une part, elle fait apparaître le caractère local de l’imposition et évite d’autant une augmentation de l’impôt national ; d’autre part, elle met en évidence, aux yeux des contribuables du district, ce que coûte leur administration. Or, les députés estiment, de façon unanime, qu’il y a trop de districts et qu’il convient d’en réduire le nombre. L’Assemblée ne peut prendre en charge des dépenses aussi considérables… et superflues. Elle attend une réaction et une prise de conscience de la part des corps administratifs : soit une demande de suppression[21], soit au moins un fonctionnement économique aux frais des administrés, « simplicité patriotique qui fait la vraie décoration des élus du peuple »[22].
 
Le contrôle étroit exercé par l’Assemblée
 
 Le décret du 16 octobre 1790 règle la délicate question du logement des corps administratifs[23]. Ceux-ci ne sauraient utiliser, par une sorte de droit de succession, ceux employés auparavant à loger les commissaires départis, gouverneurs, commandants, administrations d’états provinciaux. Seules les villes qui justifieraient avoir par le passé payé de leurs deniers tout ou partie de ces immeubles pourraient en reprendre la propriété. Les autres « édifices » étaient considérés comme biens nationaux [24].
Sans doute l’Assemblée considère-t-elle, dans un souci d’économies, que ces immeubles, souvent hôtels particuliers, sont trop vastes et trop beaux pour les administrations locales et qu’il est préférable de les mettre en vente. Dès lors où loger les corps administratifs ? La première solution est de les installer dans les hôtels de ville ou dans les palais de justice, lorsque ceux-ci sont assez vastes pour accueillir deux, voire trois ou quatre administrations, celle de la ville, celle du département et celle du district, ainsi que le tribunal[25]. Peu de chefs-lieux de département et de district offrent une telle possibilité. Dans la plupart des cas il faudra acheter un bâtiment approprié, soit approximativement 300 à 400 locaux, principalement pour loger directoires et tribunaux de districts. La mise à disposition à la Nation des biens du Clergé offre, un peu partout, de nouvelles possibilités d’installation, dans des couvents principalement. L’article 5 prévoit ainsi que les administrations qui ne trouveraient pas à se loger dans les hôtels de ville ou palais de justice s’installeront dans les biens nationaux qu’elles achèteront ou loueront « aux frais de leurs contribuables respectifs »[26].
Ces deux décrets serviront de base de travail au Comité d’Emplacement des tribunaux et des corps administratifs de l’Assemblée. Mais bientôt la règlementation devait se révéler insuffisante, de nombreuses administrations s’étant installées de leur propre autorité dans des bâtiments nationaux. Tel était le cas du département de la Corrèze. L’affaire est évoquée à l’Assemblée le 5 février 1791 : le rapporteur du Comité, Prugnon, veut définitivement mettre les choses au point : « Je viens, di-il, proposer à l’Assemblée, non pas de loger mais de déloger un département (rires) »[27]. Il demande l’annulation de la décision du directoire de Corrèze parce que son installation a été faite sans autorisation et que le Corps législatif ne peut être « l’instrument passif des directoires ». Il rappelle l’article 6 du décret du 16 octobre qui impose d’envoyer à l’Assemblée « un mémoire expositif de ses vues » et d’y joindre « un plan et devis estimatif ». Prugnon souhaite, d’une part que l’on prenne un décret interdisant toute acquisition sans autorisation, sinon, précise-t-il, les départements iront loin : ils ont en général une tendance très décidée à envahir des pouvoirs qui ne peuvent être à eux et à s’établir, sans la plus petite cérémonie, dans les édifices nationaux les plus vastes, et ils prennent communément ceux qui ont de très beaux jardins. A cet égard, le désirerais que le Comité de Santé fût chargé de déterminer jusqu’à quel point le grand air est nécessaire à l’esprit des administrateurs ». Prugnon souhaite ensuite qu’on prononce, « dans les termes les plus exprès », que les corps administratifs ne pourront même « s’établir provisoirement dans un édifice national quelconque, qu’après avoir reçu l’attache du Corps législatif. Le motif en est palpable : on connaît bien l’instant où un corps administratif entre dans un édifice national ; mais celui où il est possible de l’en faire sortir n’est pas aussi connu. D’ailleurs, c’est un édifice condamné à être invendu, car quel est le citoyen qui cherchera à évincer un corps administratif ? »[28].
L’adjudication réalisée le 29 décembre dernier au profit du directoire de Corrèze est donc nulle pour défaut d’autorisation et absence de plan de financement. Le Comité d’Emplacement a ainsi mis les choses au point. Fort de cette décision, Prugnon propose un décret accroissant le contrôle du Corps législatif sur le logement des administrations et leur imposant de rendre compte dans les quinze jours de la façon dont ils se sont logés lorsque cela sera le cas[29]. Un député approuvant la position du Comité d’Emplacement, rappelle une nouvelle fois « cette tentation des corps administratifs à se bien loger » et ajoute, dans l’optique d’une réduction du nombre de districts, qu’il faudrait distinguer entre les « districts immuables et les districts précaires : une acquisition convient aux premiers, un bail de peu d’années est le lot des autres ». A propos de tous les corps administratifs établis sous l’empire de l’urgence, le même député estime que « si leur erreur a pu être tolérée pour le moment, elle est si voisine d’un grand abus, qu’il devient très instant de la faire cesser ». Le projet de décret de Prugnon est amendé en ce sens et adopté[30].
Les autorisations accordées, par le Comité d’Emplacement pour les directoires de district et de département ainsi que pour les tribunaux de district seront données à partir de cette base règlementaire : autorisation par l’Assemblée, devis estimatif, vente ou location selon les cas, limitation au strict nécessaire -jamais de jardins ! -, financement au moyen d’une imposition spéciale sur les contribuables du district ou du département, évaluation par experts[31]. Ce poste de dépenses est assurément un des plus étroitement surveillés par l’Assemblée. Les expressions utilisées au cours des débats expriment une méfiance extrême vis-à-vis des corps administratifs[32].
Ce second mode de financement n’en comporte pas moins un avantage pour les départements et les districts : il suppose une démarche budgétaire de prévision et d’autorisation de la dépense et de la recette, ce que n’implique pas la dotation directe.
 
Le financement des dépenses départementales par les centimes additionnels
 
Le système de financement des dépenses départementales par mise à disposition de fonds ou par contribution spéciales était, dans l’esprit du législateur, une solution provisoire. 1790 avait été en matière budgétaire une année de transition. 1791 devait être celle de la mise en place du nouveau système fiscal. Le financement des dépenses des départements devait logiquement trouver une solution dans ce cadre là. Non sans retards, parfois importants, les nouvelles lois fiscales furent votées au cours de l’hiver 1790-1791 : la contribution foncière le 23 novembre ; la contribution mobilière le 13 janvier ; les nouveaux droits d’enregistrement et des hypothèques le 5 décembre ; la contribution des patentes le 2 mars et le tarif des douanes le 2 mars également[33]. En évitant d’entrer dans le moindre détail et en tenant compte des inévitables incertitudes en matière de rendement, le Comité d’Imposition parvenait dans le courant du mois de décembre à présenter les grands équilibres du budget 1791. Dans son intervention du 6 décembre La Rochefoucault, rapporteur du Comité, distingue deux sortes de dépenses publiques : « Les unes devront être faites par le trésor public, soit pour les frais généraux du gouvernement, soit pour l’acquittement des intérêts de la dette ; les autres seront faites dans les divers départements »[34]. Le Comité d’Imposition propose et réussit à faire adopter une position de principe : la distinction entre dépenses générales et dépenses des départements. Il reste beaucoup plus vague en ce qui concerne les recettes et ne précise pas si aux dépenses des départements doivent correspondre des recettes de département.
 
Le « fonds particulier » des départements
 
Le 14 janvier 1791, Lebrun rapporteur du Comité des Finances, apporte quelques éclaircissements sur la question. Commentant « l’aperçu spéculatif » du premier trimestre 1791, il précise que les dépenses des départements et des districts sont estimées à 3.500.000 livres, en tenant compte de toutes les charges que les décrets antérieurs ont depuis un an transféré sur les départements. Le financement par les départements et districts n’a pu encore être mis en pratique ; « ce n’est que pour 1791 que cet ordre nouveau doit commencer, avec le système généralisé que vous allez créer pour 1791. Jusque là les administrations sont sans revenus et sans moyens ; il faut donc que leur établissement premier et les frais intermédiaires soient portés sur la masse commune. Mais ce sera une sage et nécessaire opération, il faudra que toutes ces avances soient restituées par les départements »[35].
Ce principe de mise à disposition par le Trésor aux départements est consacré par le décret des 18-25 février 1791 qui règle les fonds nécessaires aux dépenses de l’année[36]. Un « fonds particulier » de 56.700.000 livres est établi pour acquitter dans les départements les dépenses d’administration, de la justice et des frais des prisonniers, des corps administratifs, des grands chemins, de l’entretien des bâtiments publics, de la perception des impôts et des secours aux hôpitaux »[37]. Il était spécifié que cette mise à disposition n’emportait « l’approbation d’aucun article particulier desdites dépenses ; aucun emploi des fonds publics ne pouvant être alloué que d’après les décrets que l’Assemblée a rendus ou rendra sur chaque article »[38].
Les principes de base du nouveau système de financement des dépenses mise à la charge des départements et des districts sont donc définis : le Trésor avance les sommes correspondantes à des dépenses autorisées, les corps administratifs remboursent. Cependant, ni le rapport de Montesquiou, ni le débat qui a suivi n’apportent de précisions permettant de savoir jusqu’où s’étend la maîtrise budgétaire de l’Assemblée en matière de dépenses de département, et surtout aucun élément ne permet de définir la notion correspondante de recettes départementales.
 
Les recettes des départements
 
Le problème du financement des dépenses des départements est étroitement lié à celui du montant de la recette fiscale générale. Pendant plusieurs mois les députés ont espéré qu’il serait suffisant pour acquitter l’ensemble des dépenses, y compris celles des départements. Au mois de mars 1791 il faut déchanter : les dépenses s’accumulent, alors que, pour des raisons de principe, les députés s’opposent à une augmentation correspondante des nouveaux impôts. Que penserait l’opinion publique si, d’augmentation en ajustement, on parvenait à un taux d’imposition voisin ou supérieur à celui pratiqué avant 1789 ? ! Pour résoudre ce casse-tête, les députés vont combiner un principe et une technique : le principe consiste à faire financer les dépenses d’établissement et de fonctionnement des départements par les contribuables concernés au moyen d’une imposition locale. La technique est celle des sous pour livre additionnels utilisée dans le cadre de l’ancienne fiscalité pour augmenter un impôt existant, tenir compte de l’inflation ou permettre un ajustement.
Le 15 mars 1791 La Rochefoucault, au nom du Comité des Contributions publiques, propose ainsi d’affecter toute la contribution foncière au Trésor public « et d’ajouter à ce principal 47 millions, formant 3 sols 11 deniers pour livre », aux dépenses des départements. Celles-ci se montent à 56.300.000 livres, la différence (9.300.000) étant répartie par le Trésor lui-même en faveur des départements ayant des besoins supérieurs. Situation provisoire précise le rapporteur, qui pourra évoluer l’année suivante, besoins et recettes étant mieux connus. Tel est l’objet de l’article 2 du décret proposé par le Comité[39].
 La discussion de cette proposition achoppe sur le problème de l’augmentation fiscale : certains députés calculent que la charge risque de dépasser celle de l’ancienne fiscalité ; on décide alors de ne pas dépasser le cinquième du revenu national, évalué d’après de savants calculs -au demeurant contestés par plusieurs députés- à 1.200 millions de livres, ce qui donne une contribution foncière de 240 millions[40]. Le 16 mars, La Rochefoucault propose, sur la base d’une intervention de Ramel, de fixer un maximum de sous additionnels par département : 4 sous pour livre pour la foncière, 2 sous pour la mobilière. C’est l’objet du nouvel article 5[41]. La discussion reprend sur le dépassement du cinquième de la richesse nationale. D’Estournel menace : « Si vous établissez des sous additionnels pour livre, il est certain qu’au lieu de faire payer le cinquième du revenu national, vous ferez payer le quart et peut-être le tiers. Je suis convaincu qu’il y a tel ou tel département où l’imposition foncière sera plus considérable qu’elle ne l’était sous l’ancien régime »[42]. Le vote est ajourné.
Le 17 mars, La Rochefoucault propose une nouvelle rédaction et réussit à la faire adopter en l’assortissant d’un article 3 précisant que « tout contribuable qui justifierait avoir été cotisé à une somme plus forte que le sixième de son revenu foncier à raison du principal de la contribution foncière aura droit à une réduction »[43]. Folleville fait remarquer qu’on « propose de taxer au sixième tandis que la contribution sera du cinquième par les sous additionnels »[44]. Defermon, de son côté, s’inquiète de l’augmentation que va subir la mobilière du fait de ses deux sous additionnels[45].
Face à ces critiques, plusieurs députés soulignent l’intérêt des sous additionnels : Lachèze estime que c’est le meilleur moyen de « s’assurer de la réduction des districts et des tribunaux en leur montrant le poids de certaines dépenses »[46]. Boissy d’Anglas apporte une preuve concrète de cet effet bénéfique : depuis que l’Assemblée a décidé que les dépenses des corps administratifs seraient à la charge des départements, certains ont réduit le nombre de leurs districts et donc de leurs tribunaux : c’est le cas de l’Ardèche où de sept districts en est passé, non sans difficultés, à quatre. Il ne faut pas pénaliser les départements qui ont fait cet effort en aidant ceux qui n’en ont fait aucun, sinon « les peuples auraient raison de se plaindre »[47]. Malès ajoute qu’il fallait « que les sous additionnels fussent portés sur le même rôle que le principal et qu’ils y fussent mis par colonne, afin que chaque contribuable, en payant sa cote, voie qu’il paye tant pour les établissements publics, tant pour l’administration des districts, tant pour le juges… »[48]. Opinion résumée plus sèchement par Gaultier-Biauzat, sous les applaudissements de ses collègues : « Il faut faire sentir le poids de ces établissements »[49].
Le principe de l’imposition par les sous additionnels ainsi adopté, c’est Folleville qui apporte la dernière retouche en obtenant qu’on fixe les sous additionnels à la même quantité pour la foncière et pour la mobilière : quatre sous maximum pour chacune d’elles (art. 5). Au cas où cela serait insuffisant, on ferait appel à la Caisse de l’Extraordinaire (art. 6)[50].
Le décret du 9-15 mai 1791 fixe les sommes à avancer par le Trésor aux 83 départements. Au dernier article (art. 6) il prend soin de préciser que les directoires « prendront l’engagement de les faire remplacer au Trésor national sur le produit des sous pour livre additionnels à imposer au marc la livre des contributions de 1791 et opèreront en effet ce remplacement en 1791 comme si les rôles avaient été faits aux époques ordinaires »[51].
 
La centralisation budgétaire
 
Le budget de 1791 n’a pas fait l’objet d’une présentation générale détaillée. Seuls les aperçus trimestriels fournissent quelques précisions, mais de façon très fragmentaire et incomplète. Le budget du « fonds particulier » des départements ne peut donc être analysé à partir des sources budgétaires et comptables[52]. Il ne permet pas de savoir jusqu’à quel niveau d’exécution s’exerce le contrôle de l’Assemblée et du roi sur les dépenses des départements. Seules quelques règlementations particulières -telles celles des dépenses de logement des corps administratifs comme on vient de le voir- permettent de pallier cette lacune. Ce sont les textes règlementaires relatifs aux Ponts-et-Chaussées qui offrent le plus de renseignements et comme, en outre, les dépenses de voirie et de circulation constituent, de beaucoup, le poste le plus important des districts et des départements, il est possible de les présenter à titre d’exemple.
Trois séries de dispositions éclairent la façon dont les départements peuvent employer les fonds affectés à ces dépenses : une loi du 31 décembre 1790-19 janvier 1791 définit les conditions auxquelles les ingénieurs ordinaires des Ponts-et-Chassées peuvent être mis au service des départements : un an au moins, davantage si les départements le souhaitent, mais à leurs frais[53]. Une instruction du ministre de l’Intérieur du 21 janvier 1791 définit les règles de partage des avances faites aux départements par la loi des 16-19 décembre 1790 portant attribution des 15 millions de secours : les directoires doivent dresser la liste de leurs besoins ; le ministre séparera alors ceux qui doivent être exécutés sur les fonds du Trésor et ceux qui sont à la charge des départements[54]. Enfin, « l’instruction concernant le service des Ponts-et-Chaussées adressée par ordre du roi aux directoires de département »[55] définit les fonds à appliquer à ces travaux départementaux selon des principes assez voisins de ceux régissant « les travaux des routes qui s’exécutaient ci-devant au moyen de la corvée ou d’une prestation représentative » : les directoires de département adressent annuellement, courant janvier, un état des dépenses qu’ils ont décidé d’imposer sur leur circonscription et la liste des travaux correspondants ; ces états sont visés par les ingénieurs ordinaires et ingénieurs en-chef en poste dans le département. « On observera qu’ils ne doivent contenir que des propositions d’emploi des fonds que pour les ouvrages dont les projets ont déjà été approuvés ou au moins adressés à l’administration centrale des Ponts-et Chaussées, en même temps que ces états d’indication. Ces mêmes états seront examinés par cette administration et renvoyés aux différents directoires après avoir été approuvés par le roi ; ce sera en vertu de cette approbation que seront faites toutes les dispositions pour l’ouverture de la campagne et que les autorisations nécessaires seront transmises aux directoires de districts par ceux des départements »[56]. La décision n’appartient donc pas aux directoires. Le contrôle de l’exécution non plus, puisque les ingénieurs sont chargés de suivre les travaux et de dresser annuellement un état général. Ils sont en outre chargés de délivrer aux entrepreneurs les certificats d’acompte « à mesure de l’exécution des travaux ». La centralisation est évidente. Il n’en reste pas moins vrai que les administrations délibèrent sur le montant de l’imposition à affecter aux travaux. Ici encore apparaît, de façon embryonnaire, la possibilité d’une démarche budgétaire particulière.
 
Le budget départemental contesté
 
Les principes budgétaires laborieusement dégagés au cours de l’hiver 1790-1791 ne pourront être mis en œuvre. Les prévisions ne pourront être respectées, rendant impossible l’élaboration du budget de 1792. On multipliera les expédients et les financements par la Caisse de l’Extraordinaire. En matière de dépenses départementales, on poursuivra la pratique des avances et des secours, au coup par coup, mais bien en de deçà des besoins réels : dès le mois de décembre 1792, peu après l’élection de la Convention, les nombreux rapports parvenus à Roland, le ministre de l’Intérieur, dénoncent le mauvais état des routes[57]. Dubois-Crancé prévoit que « sous peu de jours toutes les routes seront impraticables. Je demande que l’on forme un nouveau comité composé de douze membres et qui sera nommé Comité des Ponts-et-Chaussées, auquel on renverra tous les objets relatifs aux routes »[58]. Le 28 janvier 1793, la composition du nouveau comité est publiée[59]. La surveillance, par la Convention, s’accentue à mesure que s’intensifie le mouvement fédéraliste.
Face à ces difficultés, la Convention, réagit, parfois au coup par coup, en accordant par exemple au département de l’Eure une avance de 50.000 livres « à charge de remboursement dans les quatre mois sur le produit des sous additionnels »[60], et plus rarement en accordant un secours général : sous la pression des députés girondins, la Convention accorde ainsi le 6 février 1793 une aide de six millions -le Comité n’avait prévu que trois- aux départements. Lesage demande même que l’Assemblée évite toute surveillance pointilleuse : il faut que « les administrateurs puissent employer cette somme, car nous la croyons plus utile à la République et aux indigents. En prescrivant l’emploi vous risquez de faire de très grandes fautes. Vous ne devez pas administrer. Vous ne connaissez pas les localités, les besoins de communes. Les administrateurs des départements doivent avoir votre confiance puisque le peuple en a nommé les membres. Laissez-les donc déterminer la manière la plus utile d’employer ces fonds ». Réaliste, l’Assemblée retient l’idée et la formule dans un article 4 : « Les départements auront jusqu’au 1er septembre prochain pour rendre compte de l’emploi des sommes qu’ils ont reçues »[61]. Pour la tendance fédéraliste c’était là un succès.
Après le coup de force des Montagnards du 2 juin et l’insurrection fédéraliste du début de l’été 1793, puis sa réduction par la Convention, le rapport de force change. Les administrations de département sont durement sanctionnées. On en connaît les étapes les plus marquantes : le décret du 14 frimaire an II (4 décembre 1793) supprime les conseils de département ainsi que les procureurs généraux syndics et réduit les pouvoirs des directoires à la « répartition des contributions entre districts, à l’établissement des manufactures, des grandes routes et canaux publics et à la surveillance des domaines nationaux ». « Tout ce qui est relatif aux lois révolutionnaires et au salut public n’est plus de leur ressort »[62].
Le décret du 16 frimaire an II ( 6 décembre 1793) va plus loin en transférant la compétence départementale en matière de grandes routes à l’Etat : « Tous le travaux publics seront faits et entretenus au frais de la république à compte du 1er nivôse ; en conséquence, tous les grands chemins, ponts et levées, seront faits et entretenus par le Trésor public »[63]. Il ne restait plus qu’à interdire aux directoires toute intervention en matière de voirie. C’est ce que propose Barère à la Convention au nom du Comité de Salut public le 21 ventôse an II (11 mars 1794). Il y dénonce la « foule de volontés hétérogènes » qui concourent à ces travaux. Il faut bannir les « dépenses vaines ordonnées par l’esprit de localité » et « les objets plus fastueux qu’utiles ». Un plan unique permettra de perfectionner les communications « jusqu’aux moindres ramifications de la république » afin de lui conserver son unité, son indivisibilité. Seul un établissement central est un rempart « efficace contre le fédéralisme ». Il faut « détruire le fédéralisme par la centralisation des travaux publics [...] Si on livrait les fonds publics pour les travaux à la disposition de chaque département vous ne verriez plus d’établissement national mais des institutions départementales : au lieu de 32 provinces que comptait le despotisme, la république dénombrerait 86 Etats »[64]. La mesure est adoptée et une commission, dotée de tous les pouvoirs ministériels est placée à la tête des Travaux publics. Il n’y a plus, en matière de travaux publics la moindre ouverture budgétaire départementale.
Déchargés du poste de dépenses le plus important, les centimes additionnels deviennent alors sans intérêt. Le décret du 19 fructidor an II (5 septembre 1794), au début de la phase thermidorienne de la Convention, supprime la distinction « entre principal et sous pour livre additionnels pour les dépenses des départements et des districts ». « Lesdits sous pour livre sont réunis au principal pour ne former qu’une seule masse et être versés indistinctement au trésor public »[65]. Désormais, « les frais d’administration des départements et des districts, et ceux des tribunaux et juges, font partie des dépenses générales de la République » (art.2). Les articles suivants règlementent -et perfectionnent- la définition des besoins des départements : les directoires formeront un état annuel des dépenses fixes et variables de leur circonscription (art.3). Ces états seront adressés dans la première décade de vendémiaire à la Commission des Administrations civiles, police et tribunaux, qui en retour, après avis du Comité des Finances adressera à chaque directoire le double arrêté par elle avec autorisation de délivrer les mandats (art. 4)[66]. Les départements ne sont plus que de simples prolongements de l’administration de l’Etat.
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La poussée décentralisatrice -girondine- qui s’était développée dans le cours de l’année 1790 en matière budgétaire départementales -sur la base des dépenses de département et des centimes additionnels perçus sur les contribuables locaux- a donc été bloquée. La Convention accomplit ainsi, de part et d’autre de Thermidor, le projet unitaire que le second Comité de Constitution avait formé dès l’automne 1789. Le principe d’unité et d’indivisibilité ne pouvait être transgressé. Les départements n’étaient effectivement que « les sections d’un même tout ».
 
 
 


[1] Archives parlementaires (AP), 1ère série, T. IX, p. 655, 3 novembre 1789.

[2] J. B. Duvergier, Collection des lois, Paris, 1864, T.1, pp. 103-104.

[3] L’analyse des opinions émises depuis un siècle sur cette question serait riche d’enseignements … et de contradictions ! Un point récent dans Marie-Vic Ozouf-Lemarinier, La formation des départements, Paris, 1989, pp. 79-107. Plus nette encore, l’analyse de Jean-Jacques Clère dans le Dictionnaire historique de la Révolution française, direction Soboul, Surrateau et Gendron, PUF, Paris,1989, art. « Département » : « La création des départements illustre la volonté centralisatrice des constituants ».

[4] AP, T. X, 23 novembre 1789, p. 227.

[5] AP, T. XXIX, p. 301.

[6] Article 5, section 3 du décret du 22 décembre 1789, Duvergier, op.cit. T. 1, p. 91 et Instructions sur la forme des assemblées représentatives et des corps administratifs du 8 janvier 1790, Duvergier, op.cit. T. 1, p. 194. Cf. aussi AP, T. X, p. 359, 3 décembre 1789.

[7] Art. 5, ibidem.

[8] AP, T. X, p. 227. Eléments de bibliographie et approche d’ensemble dans Michel Bottin Dictionnaire encyclopédique de finances publiques, dir. Loïc Philip, articles : « droit budgétaire (formation historique) » ; « centimes additionnels » ; « budget (notions historique et politique) », 2 vol., Economica, Paris, 1991.

[9] Duvergier, op.cit. T. 1, pp. 91 et sq.

[10] Collection générale des lois, Imprimerie royale, Paris, 1792, T. 2, 2ème partie, p. 1063.

[11] Ibidem, p. 1057.

[12] Ibidem, p. 1062.

[13] Ibidem, p. 1059.

[14] AP, T. XXVII, p. 273 sq., 16 juin.

[15] Ibidem, pp. 299-300, 18 juin.

[16] Duvergier, op.cit. T. 2, p. 79.

[17] Duvergier, op.cit. T. 1, pp. 318 sq., art 3 et 4.

[18] Ibidem.

[19] Ibidem, art. 8.

[20] Ibidem.

[21] Dès la fin de l’année 1790 plusieurs décrets prononcent d’importantes réductions de districts.

[22] Duvergier, op.cit. T. 1, p. 400.

[23] Ibidem, p. 469.

[24] Ibidem, art. 1.

[25] Ibidem, art. 2,3 et 4.

[26] Ibidem, art 5.

[27] AP, T. XXII, p. 754.

[28] Ibidem.

[29] AP, T. XXII, p. 29, 7 février 1791.

[30] Collection générale des lois, op.cit., T 3, 1ère partie, p. 491.

[31] Les Archives parlementaires, op. cit. offrent une vue d’ensemble de la question : entre février et août 1791, l’Assemblée vote une trentaine de décrets concernant le logement des corps administratifs.

[32] La nature de l’opération a fait l’objet de controverses. L’« acquisition » ou la « location » par les directoires et le paiement au moyen des seules contributions spéciales payées par les contribuables de la circonscription implique-t-elle l’existence d’une personnalité civile en faveur des districts et des départements, et en cas d’acquisition un droit de propriété ? Les auteurs du XIXe siècle ont écarté cette idée qui, selon l’opinion de Ducrocq, cadre « assez mal avec les sentiments bien connus de l’Assemblée constituante », Th. Ducrocq, Cours de droit administratif, Paris, 1905, T. 6, pp. 129 sq.

[33] Frédéric Braesch, Les exercices budgétaires 1790 et 1791 d’après les Comptes du Trésor, Nancy, 1934, p. 43.

[34] AP, T. XXI, p. 261.

[35] AP, T. XXI, p. 230.

[36] Collection générale des lois, op.cit., T. 3, 1ère partie, p. 765.

[37] Article 1 du décret, Duvergier, op. cit., T. 2, p. 239. Montesquiou, rapporteur, avait promis 59 millions et la prise en charge par les départements, également des dépenses relatives « aux enfants trouvés et aux dépôts de mendicité », AP, T. XXIII, p. 273, 18 février 1791.

[38] Ibidem, article 5.

[39] AP, T. XXIV, p. 91, 15 mars 1791.

[40] Ibidem, p. 95.

[41] AP, T. XXIV, p.131, 16 mars.

[42] Ibidem, p. 138.

[43] Ibidem, p. 145, 17 mars.

[44] Ibidem, p. 147.

[45] Ibidem, p. 148.

[46] Ibidem.

[47] Ibidem, p. 149.

[48] Ibidem, p. 149. Sur cette attitude, assez généralement partagée, cf. Vida Azimi, « Heur et malheur des salariés publics sous la Révolution », in Etat, finances et économie pendant la Révolution française, Actes du colloque de Bercy, 1989, Comité pour l’Histoire économique et financière de la France, Imprimerie nationale, Paris, 1991, p. 196.

[49] AP, T. XXIV, p. 149.

[50] Ibidem, p. 150. Un article 7 établit le même système de sous additionnels en faveur des communes pour pourvoir « à la rétribution et aux taxations de leurs receveurs ».

[51] Duvergier, op.cit. T. 2, p. 453.

[52] Braesch, op. cit., qui a travaillé d’après les comptes du Trésor, fournit fort peu d’éléments sur cette question du « fonds particulier des départements ». Quelques indications p. 65.

[53] Duvergier, op.cit. T. 2, pp. 377-378.

[54] Ibidem, p. 378.

[55] Ibidem, pp. 377 et sq.

[56] Ibidem, p. 381.

[57] AP, T. LV, 24 décembre 1792, p. 375.

[58] AP, T. LVII, 16 janvier 1793, p. 424.

[59] Ibidem.

[60] AP, T. LVIII, p. 278, 6 février 1793.

[61] AP, T. LIX, p. 279, 6 février 1793.

[62] Article 5, section 3, Duvergier, op. cit., T. 6, pp. 317 sq.

[63] Duvergier, op.cit. T. 6, p. 326, art. 1.

[64] AP, T. LXXXI, p. 336, cité par Roland Debbasch, Le principe révolutionnaire d’unité et d’indivisibilité de la République, Economica, et P.U. Aix-Marseille, 1988, p. 183.

[65] Duvergier, op.cit. T. 7, p. 331.

[66] Ibidem.

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