EMS Rapetti

                                                      

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Nicolas Rapetti

Du Collège de France aux embûches politique niçoises

 

 

Pour citer : Michel Bottin, « Nicolas Rapetti. Du Collège de France aux embûches politique niçoises in  Nice Historique, L'année 1860. Chroniques de l'annexion, 2010, pp. 244-265.

 

         Sur la grande scène du théâtre de l’annexion de Nice à la France les rôles sont déjà distribués depuis longtemps. Faire entrer un nouveau personnage n’est pas facile surtout lorsqu’il vient des coulisses. Pierre-Nicolas Rapetti[1] secrétaire du sénateur Pietri envoyé de Napoléon III pour organiser les opérations d’annexion mérite t-il les feux de la rampe ? Sans doute si on considère que Rapetti n’est pas un simple secrétaire personnel. Il est « secrétaire de la mission » dévolue à Pietri. A ce titre il prend une part active aux événements du printemps 1860. Rapetti occupe un poste de responsabilité. D’ailleurs les deux hommes ont été choisis avec soin par l’Empereur. Celui-ci a pu apprécier leurs qualités de négociation, de fidélité et de discrétion l’année précédente alors qu’ils accomplissaient des missions plus ou moins secrètes en Italie[2].

         Rapetti est resté un mois et demi à Nice en compagnie de Pietri, du 27 mars au 17 juin[3]. Il a rencontré pendant cette période beaucoup de personnes, des partisans de l’annexion comme des adversaires. Son caractère affable et ses bonnes manières lui ont valu d’être apprécié des Niçois au point qu’il a pu croire un moment qu’il pourrait y faire une carrière politique. Ce projet lui a paru d’autant plus cohérent avec l’action qu’il venait d’accomplir qu’il était Antibois par son père adoptif et qu’Antibes faisait maintenant partie du même département que Nice. Le nouveau département des Alpes-Maritimes étant lui-même une conséquence directe de l’annexion, Rapetti était ainsi doublement chez lui, en tant que fondateur et en tant qu’Antibois. Il se rapproche du « parti français » de Nice, de Carlone, de Tiranty, de Juge, d’Avigdor et d’autres dont il partage les vues sur l’avenir de Nice et devient leur contact parisien le plus proche à partir de l’été 1860. Il attend en retour le soutien de ses amis niçois pour une éventuelle candidature à Nice.

         Rapetti est à cette époque chef de bureau au Ministère d’Etat et chargé de la publication de la correspondance de Napoléon I. Ce poste, apparemment secondaire, est en fait politiquement sensible. Cette correspondance est un enjeu politique majeur. Il faut rechercher, trier et classer une correspondance extrêmement abondante et diverse. Napoléon III et son proche entourage sont directement concernés. Rapetti bénéficie de leur confiance. Cette fonction ministérielle lui permet de côtoyer quotidiennement les plus hauts personnages de l’Etat. Il pense, à partir de cette position, pouvoir être utile à Nice et au département des Alpes-Maritimes.

         Mais l’ambition de Rapetti doit aussi être éclairée par d’autres considérations plus profondes. Rapetti est un bonapartiste aux convictions ancrées qui pense avoir le devoir de s’engager ainsi pour servir l’Empire, mieux que d’autres ne pourraient le faire à la même place. Ce ne sont pas tellement ses activités à la Correspondance de Napoléon I qui peuvent justifier une telle prétention. Ce sont plutôt ses anciennes fonctions de professeur au Collège de France où il a enseigné pendant sept ans l’histoire du droit et les législations comparées. Il n’a pu poursuivre. Les événements politiques en ont décidé autrement. Mais la réputation est restée. Et les regrets aussi. Il y aurait aussi une forme de reconnaissance dans une carrière politique.

Né « sous le drapeau de la France »

         Pierre-Nicolas Rapetti, est né à Bergame en Italie le 9 novembre 1811[4] dans une famille originaire du Montferrat très engagée aux côtés de la France au cours de la Révolution et du Premier Empire. Ses oncles maternels ont été assassinés pendant les troubles qui ont accompagné la conquête de l’Italie du Nord par les Français. L’un d’eux était podestà d’Asti. Nicolas est le fils de Bartolo Rapetti, alors aide chirurgien-major au 84e régiment de ligne et de Giovanna Piceni. Son régiment était alors stationné à Bergame en Lombardie. Bartolo Rapetti dirigera par la suite d’importants établissements hospitaliers et deviendra professeur de médecine à l’Université de Turin[5]. La chute de l’Empire met la famille Rapetti dans de grands embarras tant au plan matériel qu’intellectuel. Nicolas est envoyé en France en 1823[6] pour y faire ses études. Il est accueilli par son parrain[7] Nicolas Trastour[8], un chirurgien militaire originaire d’Antibes qui a fait toutes les campagnes de Napoléon. Il terminera sa carrière comme chef du service chirurgical de l’hôpital de Toulon de 1816 à 1840. Trastour, qui a épousé la mère de Nicolas[9], veuve de Bartolo, l’adoptera en 1834[10].

          Nicolas Rapetti fait ses études secondaires au collège communal de Toulon[11] puis ses études supérieures à la Faculté de droit de Paris où il obtient sa licence. On le retrouve bientôt « avocat à la cour »[12]. Le fait qu’il soit né en Lombardie, une région sous domination autrichienne depuis 1815, ne semble pas avoir jusque-là posé de difficultés. Ainsi qu’il le précisera en 1839 dans une déclaration destinée à établir un domicile en France, « il croit pouvoir se considérer comme français à un double titre » : comme né d’un père, non pas étranger, mais « auquel la réunion du pays avait donné cette qualité » de français ; ensuite « comme étant né sous le Drapeau français, c'est-à-dire en France » [13]. Le jeune Nicolas n’a assurément jamais pensé qu’il n’était pas français. Il sera pourtant conduit à demander sa naturalisation. Peut-être y a-t-il eu une difficulté relativement à l’exercice de la profession d’avocat dont l’accès était interdit aux étrangers[14] ? De toute évidence la démarche lui est pénible. Il doit préalablement faire une déclaration de domicile, alors qu’ il réside en France depuis plus de quinze ans. Le délai pour obtenir les lettres de naturalisation ne court qu’à compter de cette déclaration. Il est de 10 ans[15]. Rapetti ne peut pas attendre. Heureusement il peut bénéficier de la loi du 14 octobre 1814 qui permet d’abréger ce délai pour les étrangers nés dans un pays alors sous la souveraineté de la France. Il sera naturalisé en 1843[16]. L’épreuve, administrative mais surtout morale, avait été rude. Il en fit un sujet de réflexion et bientôt un sujet de thèse sur la condition de l’étranger. Il soutient en 1841.

         Rapetti, attiré par l’histoire du droit, a entretemps changé d’orientation. Il a découvert cette discipline encore toute nouvelle en suivant les cours de François Poncelet[17], premier titulaire de la chaire d’histoire du droit crée en 1819[18]. Il est séduit par un enseignement qui élargit la formation juridique jusqu’alors bornée à la seule pratique du droit. La discipline est alors balbutiante. Quelques études commencent à peine à la baliser. Mais Rapetti est sans fortune[19]. Comment en faire son métier alors que dans les années 1830 les postes ne dépassent pas la dizaine pour toute la France ?

Un pionnier de l’histoire du droit 

         Rapetti fut encouragé dans cette voie par quelques puissantes protections scientifiques. On remarque ainsi que les deux témoins de moralité qui appuient sa demande de naturalisation[20] sont d’une part Guillaume Hello, « avocat général à la  Cour de Cassation » et constitutionnaliste renommé[21] et d’autre part Joseph Ortolan « professeur à la Faculté de droit de Paris », spécialiste de législation pénale comparée[22]. Mais comme le dira plus tard Rapetti lui-même[23], c’est à Pellegrino Rossi[24], professeur d’économie politique puis de droit constitutionnel au Collège de France qu’il devait le plus. C’est avec son appui et ses recommandations que Rapetti pénètre peu à peu dans le cercle restreint des collaborateurs de revues  et d’encyclopédies juridiques.

         Dès 1837 Rapetti collabore ainsi à l’Encyclopédie Nouvelle de Leroux et Raynaud en y rédigeant plusieurs entrées[25]. La même année il publie quatre articles sur Romagnosi[26]  et le Compte rendu des leçons de M. Rossi sur le droit constitutionnel au Collège de France[27] dans le Journal général des tribunaux[28] dirigé par Wolowski[29]. En 1838 il publie dans la très  renommée Revue de législation et de jurisprudence une étude sur les avoueries au moyen âge[30]. La même année Rapetti est sollicité par le Comité historique des monuments écrits pour participer à la publication des documents originaux d’histoire du droit laissés par Henri Klimrath[31] précocement décédé en 1837. La proposition du Comité portait sur la publication de trois ouvrages de droit coutumier français, Li Livres de jostice et de plet, le Conseil à un ami de Pierre de Fontaines et l’Ancien coutumier de Normandie[32].  Rapetti rend l’année suivante son rapport sur le premier de ces manuscrits. Deux membres du comité, Tocqueville et Dupin, estimèrent que le manuscrit était sans intérêt et ne méritait pas l’édition. Les autres, Cousin, Blondeau, Mignet et Rossi firent au contraire valoir que le rapport de Rapetti mettait bien en valeur le document et qu’il fallait lui en confier l’édition[33].

         La réputation de Rapetti s’affermissait. Il était resté en contact avec son maître Poncelet. L’idée d’une collaboration éditoriale prit progressivement corps. Poncelet, qui souhaitait mettre à la disposition des étudiants, comme prolongement de ses cours, un manuel simple et clair en confia le soin de le faire à Rapetti, « son élève ». En fait Poncelet « se contenta de signer de son nom et d’en retrancher les textes et les renvois qui donnaient à l’œuvre de M. Rapetti une apparence et d’érudition »[34]. Le Précis d’histoire du droit civil en France de Poncelet et Rapetti parut en 1838[35]. L’ouvrage apparut comme un utile complément à l’Histoire du droit français de Firmin Laffériere, soit qu’il aborde d’autres questions, soit qu’il replace plus nettement l’action de l’Eglise dans la construction de l’ordre social[36]. « M. Rapetti joint à la connaissance approfondie des textes, une rare sagacité, une imagination brillante et un style remarquable par sa pittoresque concision » dira le compte rendu critique de la Revue de législation et de jurisprudence qui ajoute « M. Poncelet doit se féliciter d’avoir rencontré un interprète aussi habile des leçons qu’il professe à la faculté »[37].

         Avec régularité Rapetti continue d’étoffer son dossier scientifique. En 1839 il rédige pour l’ Encyclopedie du droit de Sebire et Carteret, en collaboration avec Rossi, l’entrée « Aubaine »[38] puis en 1840 l’entrée « Barreau » dans le Dictionnaire encyclopédique de la France dirigé par Philippe Le Bas[39] et une collaboration aux Annales de la France, sous la direction du même Le Bas. Rapetti y traitait « l’histoire de nos institutions religieuses, politiques et judiciaires » ; il était qualifié dans l’introduction de l’ouvrage de « jeune savant déjà connu par ses travaux remarquables sur l’histoire du droit français »[40].

         Ce long parcours, jalonné de publications souvent appréciées et, bien entendu, la puissante protection de Rossi, permettaient à Rapetti d’espérer un poste dans l’enseignement. Une opportunité survient en 1841 avec la vacance de la chaire d’Histoire et des législations comparées d’Eugène Lerminier au Collège de France. Lerminier occupait cette fonction depuis 1831 et son enseignement soulevait de plus en plus de difficultés en raison de son engagement politique. Lerminier tente ainsi sans succès de se faire élire à Strasbourg sous le patronage d’Odilon Barrot en 1836 puis se rapproche du second ministère Molé du 15 avril 1837 et obtient un titre de maître des requêtes en service extraordinaire. Cette faveur[41], accordée par un « ministère de laquais », ainsi que l’opposition qualifie le ministère Molé, déchaîne la colère du Quartier latin qui lui fait payer son ralliement par des chahuts incessants pendant trois ans. Au mois d’octobre 1840 Lerminier demande un congé d’un an[42].

Le Collège de France 

         Rapetti y voit une opportunité. Mais il n’est pas docteur. Le sujet sur lequel il travaille a pris du retard à mesure que les sollicitations de publications se multipliaient. La thèse, en deux parties, est finalement soutenue en juillet 1841[43]. La Revue étrangère et française de législation qui en fait la critique note que « les deux dissertations de M. Rapetti sortent de la classe ordinaire de celles qui se publient ordinairement en France pour obtenir le grade de docteur en droit »[44].

         C’est dans ces conditions que Nicolas Rapetti est choisi comme suppléant par les professeurs du Collège de France. Le ministre ne fut même pas informé. Il approuvera le choix à la fin du mois de novembre 1841[45]. Rapetti y enseigne de 1841 à 1848 successivement, l'Histoire du droit romain et de son influence sur la formation civile et politique de la France ancienne, l’Histoire du droit canonique, l’Histoire de la propriété suivant le droit féodal et le droit civil de l’ancienne monarchie, l’Histoire comparée du droit public chez les peuples anciens et modernes, Les développements historiques de la coutume dans les législations modernes[46].

         Son cours d’histoire du droit canonique a particulièrement marqué les contemporains[47]. Rapetti y apparaît proche de Lammenais et de Buchez et y présente un catholicisme propre à maîtriser les tendances nouvelles de la société, ce qui a pu rendre Rapetti suspect aux révolutionnaires mais aussi aux catholiques eux-mêmes en raison de ses approches démocratiques. Il a su par ailleurs, grâce à un style « froid et érudit », éviter les perturbations provoquées par un Quartier latin toujours prêt à s’enflammer, ce que n’avait pas su faire son prédécesseur Lerminier.

         En 1848 Lerminier décide de reprendre ses enseignements, pensant que son affaire était oubliée. Mais les étudiants l’en empêchent. Le cours est suspendu et les administrateurs du Collège décident de nommer un nouveau titulaire[48]. Le 16 février 1849 Rapetti présente sa candidature[49]. Dans une longue lettre il fait valoir ses activités passées au Collège, ses engagements auprès des étudiants, son dévouement à l’institution et ses succès auprès du public. Il y explique aussi les raisons qui l’ont empêché de publier ses cours. « Le loisir nécessaire à un pareil travail, je ne l’ai jamais eu pendant les huit années de ma suppléance. Il me fallait subvenir au labeur spécial de l’enseignement. Il me fallait surtout me procurer par des profits dus à des occupations étrangères à l’enseignement, des ressources complémentaires, indispensables à la position, presque toute de peine et d’honneur, que j’occupais auprès de vous ». Il a toutefois publié depuis 1841, allègue t-il, mais sous la forme d’études ou d’articles dans des périodiques ou des ouvrages collectifs: Revue de législation et de jurisprudence, Le Correspondant, le Dictionnaire encyclopédique de la France de le Bas[50]. Rapetti fait également état du Livre de justice et de plet dont il vient enfin de terminer la préface le 15 octobre 1848[51] mais ne peut en présenter l’édition. Il avoue d’ailleurs dans cette préface avoir acquitté « un peu tard » la tâche qu’on lui avait confiée en 1838[52].

         On doit en effet constater que Rapetti a moins publié lorsqu’il était au Collège de France qu’avant. La préparation des cours n’explique pas tout. Il a en effet également publié « dans la presse quotidienne judiciaire et politique, où, explique t-il, tout en combattant pour ce que je reconnaissais comme vrai, juste et utile, je souffrais d’éparpiller une activité que je devais toute entière à la tâche de l’enseignement »[53]. Rapetti veut dire ici qu’il fit du journalisme politique dans La Patrie, quotidien bonapartiste, dont il fut le directeur avec Albert Maurin. Il s’en retira en 1848[54]. On pourrait ajouter, mais Rapetti n’en dit pas un mot, qu’il lui est même arrivé de publier sous le pseudonyme de « Lucio »[55] dans le mensuel « Le génie des femmes »[56],  une revue qui souhaitait mettre en valeur les qualités des femmes dans les domaines des arts, des sciences et de la littérature. Son directeur était Cellier du Fayel, professeur à l'Athénée royal de Paris[57], un établissement autrefois renommé qui avait décliné jusqu'à disparaître[58]. Cellier et quelques autres tentaient de le ranimer. On comprend que Rapetti ait préféré l'anonymat.

         Ce que Rapetti présentait à l'appréciation des membres du Collège de France n'était en effet peut-être pas totalement satisfaisant, comparé aux dossiers d’autres candidats. D’autant plus qu’il avait publié dans Le Correspondant une longue étude sur la « Liberté de l’enseignement »[59] où il s’employait à critiquer sévèrement un récent ouvrage de Troplong sur la question[60]. La polémique fut plutôt aigre. Contre Troplong qui affirmait le rôle central de l’Etat, Rapetti démontrait que « la liberté d’enseignement est fondamentale ». Le droit d’enseigner n’a pas d’origine « régalienne ». Rapetti terminait ainsi son étude : « Gardons la liberté de la famille, sauvons la liberté d’enseignement »[61]. S’attaquer ainsi à Troplong était peut-être imprudent. Troplong, membre depuis 1840 de l’Académie des sciences morales et politiques et historien du droit à ses heures. Troplong qui deviendra pair de France, président de la cour de Cassation, sénateur et membre du conseil privé de l’Empereur[62].

         Pour cette élection, Rapetti trouvait en face de lui Charles Cros, Charles Chambellan et Eugène Laboulaye[63]. La candidature du premier pouvait être facilement écartée[64]. Celle du second était plus pertinente[65]. Laboulaye lui, présentait cinq ouvrages d’histoire du droit : sur la publicité foncière, sur Savigny, sur la condition des femmes et sur les lois criminelles des Romains[66]. Il l’emporte sur Rapetti, 14 voix contre 3[67]. Rapetti en compensation est nommé maître de conférences de droit privé dans la nouvelle « Ecole d’administration », créée le 8 mars 1848 et placée sous la protection du Collège de France. Rapetti était également examinateur pour cette école dans les départements du midi[68]. L’Ecole d’administration est supprimée en 1849.

Le service de l’Empire 

         L’élection le 10 décembre 1848 de Louis Napoléon Bonaparte à la présidence de la République fut accueillie avec une immense satisfaction par Rapetti. Il vit en lui, écrivit-il à son ami le Prince Georges Bibesco, souverain de Valachie dans les années 1840,  la seule personne capable de « gouverner la révolution » ; la seule personne capable d’inspirer confiance au peuple, aussi bien pour empêcher le retour de la révolution que pour « réaliser les améliorations sociales auxquelles il aspirait »[69].

         Rapetti se rapprocha donc du pouvoir. Le coup d’Etat du 2 décembre 1851 devait lui donner l’occasion de se mettre au service du régime. Il est chargé de la publication du Recueil des adhésions adressées au prince Président à l’occasion de l’Acte de décembre 1851[70]. On avait rassemblé ici, sous ce titre pudique, tous les soutiens manifestés à l’occasion du coup d’Etat. Rapetti n’y attacha pas son nom mais chacun savait la part qu’il y avait prise. Sa fidélité était récompensée. Elle lui valut en 1853 d’être nommé à la Commission de colportage au ministère de l’Intérieur[71]. Il y perçoit 2400 francs par an. L’emploi est supprimé, en même temps que plusieurs autres, en août 1860[72].

         Rapetti est également à partir de 1854 secrétaire de la Commission créée le 7 septembre de cette année et présidée par le maréchal Vaillant pour rassembler et publier la correspondance de Napoléon I. La commission, placée sous la présidence du maréchal Vaillant, dépendait du ministère d’Etat dirigé par Achille Fould. Rapetti y était à ce titre chef de bureau avec un traitement de 6000 francs[73]. La commission sera par la suite rattachée aux Archives de l’Empire en 1859. Elle sera réformée en 1863 à la suite de dysfonctionnements et placée sous la présidence du Prince Napoléon Jérôme. Rapetti demeurera secrétaire avec un traitement de 8000 puis de 10000 francs[74]. Elle cessera ses fonctions en 1869 après avoir publié 32 volumes en quinze années de travail[75].

         Rapetti poursuit parallèlement ses activités dans le journalisme. Il est attaché à partir de 1853 à la rédaction du Moniteur universel. Il y publie des critiques et des comptes rendus d’ouvrages[76] ; des études aussi : sur Les débiteurs à Rome à Rome[77], sur le procès des Templiers[78]. Il publie également en 1855 dans la Nouvelle biographie universelle des Frères Didot une notice sur Jacques Cujas[79]. De toute évidence Rapetti n’a pas perdu tout espoir de revenir au Collège de France. Il étoffe, à l’occasion, son dossier scientifique.

         Une opportunité se présente après le décès de Xavier de Portets[80] qui laisse vacante la chaire de Droit de la nature et des gens. Rapetti trouvait en face de lui Chambellan et Adolphe Franck, professeur de philosophie à la Sorbonne et membre de l’Académie des sciences morales et politiques, section philosophie[81]. L’assemblée des professeurs du Collège de France plaça Rapetti au premier rang avec onze voix contre six à Franck qui était le candidat du ministre de l’Instruction publique Hyppolite Fortoul[82]. Franck, qui avait pris la suite de Portets pour assurer l’intérim[83], était d’une certaine façon désavouée par ses collègues du Collège de France. On notera que Franck était philosophe et qu’il s’agissait d’une chaire de droit. Rapetti pouvait être de son côté satisfait par la confiance que lui témoignait l’institution sept ans après son départ. Mais le ministre, sollicité par l’Académie des Sciences morales et politiques, accepta  que celle-ci fît une seconde présentation. L’Académie désigna Franck après deux tours de scrutin. Le ministre choisit Franck[84].  Rapetti apprécié au Collège de France n’avait pas que des amis à l’Académie. On ne peut s’empêcher de voir dans cet échec la main de Troplong.

         Rapetti poursuit donc son travail à la Correspondance de Napoléon I. Tout en continuant à publier au gré de ses goûts et de ses passions. Il s’intéresse ainsi à Antoine Lemaistre, l’avocat janséniste[85], après avoir lu l’ouvrage que lui consacre Oscar de Vallée[86]. Il en fait en 1857 un commentaire élogieux dans un opuscule[87] tout en élargissant l’approche. Les préoccupations universitaires semblent s’estomper.

         Le changement se confirme l’année suivante La publication des Mémoires du maréchal Marmont en 1857 vient complètement perturber son travail. Marmont, qui a joué un rôle militaire de premier plan dans de nombreuses campagnes militaires du Premier Empire, décide le 30 mars 1814, alors que les armées alliées encerclent Paris, de rompre le combat et d’entrer en négociation avec les Alliés. Il signe la capitulation le 31 mars et se retire avec ses troupes en Normandie au mépris de tous les ordres donnés par l’Empereur. La trahison est avérée. Pourtant à la mort de Marmont en 1852 on a pu entendre ici et là des commentaires minimisant, voire excusant ou justifiant l’action de Marmont. La publication annoncée de ses Mémoires était attendue comme un événement politique. Ils paraissent en 1857. Rapetti en fidèle gardien de la mémoire napoléonienne réagit avec d’autant plus de force que ces Mémoires remettent subtilement en cause, page après page, toute l’action de Napoléon.  Il commence par donner quelques analyses au Moniteur puis publie en 1858, uniquement sur les événements du printemps 1814, un ouvrage extrêmement documenté[88].

         Tous ces services passés et récents, tous rendus pour la plus grande gloire de l’Empire, valaient bien la légion d’honneur. Rapetti est fait chevalier par décret du 30 juillet 1858. Complètement accaparé par les débats qui entourent la publication de son livre sur Marmont il néglige d’accomplir les formalités exigées pour pouvoir porter la décoration. Le secrétaire général de la chancellerie de la Légion d’honneur le fera sèchement remarquer au ministre d’Etat[89].

Missions en Italie 

         La campagne militaire qu’entreprend Napoléon III au printemps 1859 en Italie du nord marque profondément Rapetti. Il ne peut demeurer passif à Paris alors que cette guerre n’est, à ses yeux, que la suite de l’aventure italienne de Bonaparte. Il demande donc un congé de trois mois, sans retenue de traitement. Dans la lettre qu’il adresse au ministre d’Etat le 10 mai 1859 il avance toutes les raisons possibles pour justifier son départ.  Il fait valoir que sa famille est originaire du Piémont et « quelle a même payé cher son attachement à la cause de la France. Je connais, poursuit-il, les habitudes de l’esprit italien si difficile à pénétrer pour les étrangers et je ne voudrais pas paraître trop présomptueux en disant que j’ai l’espoir de pouvoir être de quelque utilité pour le service de l’Empereur. Mon travail aux Archives de l’Empire ne souffrira pas de mon absence. M. le Directeur général veut bien consentir à mon départ. D’ailleurs je ne cesserai pas de travailler à ma tâche officielle lorsque je me trouverai sur les lieux qui ont gardé tant de traces de l’Empereur Napoléon I de 1796 à 1814. Je recueillerai bien des documents qui ont pu jusqu’ici échapper aux recherches bénévoles des chancelleries italiennes. Je serais heureux de pouvoir joindre à cette mission qui est dans mes fonctions, l’honneur de transmettre à Votre Excellence les renseignements qu’il lui plaira de me demander pour Elle-même ou pour le Moniteur»[90].

         Sans doute tout cela n’est-il pas faux. Mais Rapetti, comme le montre la suite des événements, a d’autres raisons, plus politiques, de vouloir partir en Italie. Il dira plus tard, parlant de ce voyage, qu’il était «  à la suite de l’armée »[91]. L’expression ne permet pas de cerner ses fonctions exactes mais elle est assez pudique pour cacher bien des choses. On peut ainsi noter que Rapetti  est toujours accompagné de Pierre Marie Pietri, l’ancien Préfet de police de Paris.  Il est clair que leur mission relève du renseignement et entre dans le cadre de la politique des nationalités que ne cesse de prôner le proche entourage de Napoléon III. L’Autriche est directement concernée et la guerre que mène la France aux côtés des Sardes n’est qu’un aspect de la question. Le prince Napoléon Jérôme est un des principaux animateurs de cette politique. C’est un proche de Pietri. Tous deux sont frères dans la loge Bonaparte[92] où d’ailleurs on trouve aussi Henri Conneau médecin personnel et très proche ami de l’Empereur dont il fut compagnon de cellule au fort de Ham. Lui aussi est passionné par l’aventure politique italienne[93].

         Tous ces personnages[94] sont en Italie à partir du printemps 1859. Les activités de Pietri et de Rapetti, par nature discrètes, ne passent pas totalement inaperçues. Les journaux piémontais signalent ainsi la présence de Pietri à Turin à la mi-juillet 1859[95]. On note aussi qu’il rencontre Kossuth à plusieurs reprises  à Turin. La Gazette de Savoie, qui fait état d’une de ces rencontres à l’hôtel Trombetta de Turin qualifie même Pietri de « chef de  la police impériale en Italie ». Un lecteur, peut-être Kossuth lui-même ou un proche, corrige quelques jours plus tard. Pietri est peut-être chef de la police mais ce n’est pas à ce titre que le chef de l’insurrection hongroise le rencontre. Il traite avec lui parce que Pietri est l’interlocuteur chargé des « relations de l’Empereur avec l’émigration hongroise » [96]. The Rambler, qui note également ces contacts, qualifie, sans doute plus exactement, Pietri de « head of the secret agents of Emperor in Italy » et précise qu’il agit pour le compte du Prince Napoléon[97]. La question de la Légion hongroise[98] qui combat aux côtés des armées franco-sardes est épineuse. Elle risque de faire dégénérer la guerre en conflit européen. Mais le Prince Napoléon fait de la cause hongroise une priorité. Cavour a de sérieuses craintes. Dans une lettre du 26 mai 1859 il fait dire par Pietri au Prince Napoléon qu’il faut être prudent[99].

         Les contacts se poursuivront après l’armistice de Villafranca. Le Prince Napoléon est chargé par l’Empereur de maintenir ses relations avec Kossuth et l’émigration hongroise. C’est Rapetti qui sert d’intermédiaire. Kossuth adresse, de Londres, son courrier à Rapetti. Il y montre l’intérêt que la France peut avoir à une Hongrie indépendante. Dans une lettre adressée le 6 janvier 1860 à Rapetti il explique que la Hongrie peut servir de contrepoids en Europe centrale. Dans une autre lettre du 8 février il souligne que la France ne gagnerait rien à voir la Hongrie se jeter dans les bras de la Russie[100].

         Pietri et Rapetti ont effectué en Toscane une grande partie de leur mission en Italie à la suite de l’armée. Le grand-duc Léopold II a été contraint de quitter le pouvoir en avril 1859. Le Prince Napoléon y a envoyé une division du 5e corps d’armée[101] qu’il commande pour éviter une contre attaque autrichienne. Nos deux agents rentrent avec les troupes après l’armistice de Villafranca. Au début du mois d’août Pietri séjourne à Nice pour raisons de santé[102]. Mais en septembre ils retournent en Toscane, peut-être avec le projet secret de placer le Prince Napoléon sur le trône du duché. C’est une des solutions évoquées à l’époque[103]. On note d’ailleurs qu’on trouve un peu partout de nombreuses inscriptions « Vive Napoléon Jérôme roi d’Etrurie »[104]. Après la paix de Zurich du 11 novembre 1859, « il prof. Rapetti » et Pietri sont toujours en Toscane, ou y sont revenus, cette fois pour y faire du renseignement dans une perspective d’annexion du duché au royaume sarde[105].

         Rapetti et Pietri ont donc été très tôt dans le secret à propos des contreparties que l’Empereur était prêt à demander pour l’ annexion de la Toscane. Rapetti précise qu’en 1859 lorsqu’il était «  à la suite de l’armée avec M. Pietri », ils avaient « pour instructions de dire partout et en toute occasion que nous ne voulions pas un pouce de territoire italien »[106]. Il s’agissait de dire le contraire de ce que les responsables officiels proclamaient trop facilement. « Nos ministres officiels en Italie ne savaient rien. C’était une cacophonie étrange entre leurs dire et les nôtres, M. Pietri et moi »[107]. On doit noter que l’incertitude durera longtemps. Au début de l’année 1860 Cavour  signale à son ministre de la guerre que « la France et l’Angleterre sont d’accord pour ne vouloir ne nous donner que Parme et les Légations ; celles-ci seraient sous la haute souveraineté du pape à qui un tribut serait payé. La Toscane serait un royaume séparé  sous un prince de la maison de Savoie. La France aurait la Savoie ». On ne parle pas de Nice[108]. Une dépêche d’Arese[109] à Cavour du 21 février  1860 confirme les réticences de l’Empereur et expose les difficultés diplomatiques d’une annexion par Turin de la Toscane[110]. La situation ne se débloque qu’au début du mois de mars et l’annexion de Nice ne devient possible qu’après le vote des Toscans les 11 et 12 mars 1860 en faveur d’une annexion par le royaume de Sardaigne.

Les amis niçois de Rapetti 

         Rapetti et Pietri, qui ont suivi de très près toutes ces péripéties diplomatiques, sont particulièrement prêts à organiser les opérations d’annexion de Nice à la France, suite en quelque sorte de l’annexion toscane. L’Empereur leur confie donc cette mission. Ils arrivent à Nice à la fin du mois de mars. « M. Pietri n’avait pas de titre » rappelle Rapetti. Lui était « secrétaire de mission »[111]. Rapetti prend soin de préciser que cette mission était tout à fait officielle. « Nous avions commissions et blancs-seings et nous avons montré nos pouvoirs à l’autorité sarde. Nous sommes arrivés le lendemain de  la scène du Théâtre Royal et M. Pietri m’a laissé seul deux ou trois jours pour aller demander à M. Cavour à Turin quel était au juste son jeu dans l’affaire de Nice »[112].

         Les deux envoyés s’installent à l’Hôtel de France. Rapetti organise le travail de Pietri, en particulier les réceptions des délégations et des personnalités. Il reçoit lui-même également beaucoup de quémandeurs. Il délivre des certificats à ceux qui ont rendu des services en faveur de l’annexion[113]. C’est lui aussi qui tient la caisse des fonds affectés à l’opération. On le voit par exemple rembourser à un notable niçois les frais de drapeaux et de cocardes de sa délégation[114]. Face à l’accusation du « parti italien » d’avoir employé des agents français pour faire de la propagande en faveur de l’annexion Rapetti se défend : « Nous n’avions pas d’agents, seulement des messagers pour porter des médailles, des rubans et des bulletins de vote »[115].

Une fois la mission terminée Rapetti quitte Nice en même temps que Pietri pour Paris. Il y retrouve la correspondance de Napoléon I. Sans doute attend-il davantage. Pietri a fait part autour de lui de sa grande satisfaction. Dès son retour à Paris il écrit au ministre d’Etat pour solliciter une promotion : Rapetti « a été, dit Pietri, mon collaborateur le plus actif et le plus intelligent et les services signalés qu’il a rendus » durant ses deux missions en Italie « sont de nature à lui mériter les sympathies et les encouragements du gouvernement de l’Empereur ». Les qualités de Rapetti sont d’ailleurs bien connues : « Ancien suppléant au Collège de France, M. Rapetti a les connaissances les plus variées et je n’apprendrai rien à Votre Excellence en le signalant comme un des publicistes et jurisconsultes qui connaissent le mieux notre législation civile, criminelle et administrative, ainsi que les législations comparées et le droit public européen. Esprit élevé et sagace, sa place est marquée au Conseil d’Etat et je n’hésite pas à affirmer qu’en l’appelant comme maître des requêtes l’Empereur et votre ministère y auront un sérieux et brillant représentant de plus […]  Et en attendant que Votre Excellence puisse faire droit à cette demande, je sollicite pour M. Rapetti le croix d’officier de la Légion d’honneur »[116]. Rapetti obtiendra la croix, le 6 juillet 1860[117], mais pas la promotion au Conseil d’Etat.

 En attendant Rapetti s’intéresse toujours aux affaires de Nice. Il est resté particulièrement en relation avec les tenants du « parti français » avec lesquels il semble avoir quelques connivences, particulièrement Tiranty, Carlone et Juge. Les lettres adressées par Auguste Carlone au correspondant à Paris du Messager de Nice, Albin Mazon, montrent que si Pietri semble prendre ses distances avec Nice à mesure que le temps passe, Rapetti  cherche à conserver le contact.  « Veuillez, demande-t-il à Carlone, bien me rappeler au bon souvenir de M. Juge, de M. Canis, de M. Sauvan, de M. Pollan, de M. Prosper Girard, de M. Boutau et de tous nos autres amis »[118].

Rapetti est mécontent de la façon dont on organise les nouveaux pouvoirs à Nice. Et il le fait savoir autour de lui à Paris sans beaucoup de retenue. Paulze d’Ivoy, le tout nouveau préfet des Alpes-Maritimes, finit par l’apprendre et s’élève contre ces critiques. Passe encore pour celles, nuancées et retenues de Pietri. Mais «  il n’en est peut-être pas de même de M. Rapetti qui en outre est, comme tous les écrivains, sensible à l’éloge dans une proportion qui dépasse les bornes […] Il semble admettre, de la meilleure foi du monde, que depuis son départ, Nice est à la veille de ne plus respirer »[119].

         A Paris Rapetti voit assez régulièrement Mazon. Ils échangent des nouvelles de Nice. Mazon à la demande de Carlone le sollicite fréquemment pour qu’il pousse Pietri à intervenir dans tel ou tel dossier. Mazon et Carlone sont particulièrement préoccupés par la question des annonces légales que le Messager de Nice n’a pu obtenir. Rapetti, qui connaît bien ces services du ministère de l’Intérieur est évidement sollicité. Il avoue rencontrer des obstacles.  Au début du mois d’août Mazon annonce la bonne nouvelle à Carlone : « Rapetti vient de renouer de bons rapports avec la direction de la presse au ministère de l’Intérieur[120]. Il m’a promis de nous aider de tout son pouvoir sur la question des annonces légales »[121].

Rapetti fait en effet son possible pour rendre service. Le Messager de Nice ne reçoit pas le Moniteur universel ? Qu’à cela ne tienne il obtient un service gratuit. Ou encore lorsqu’il apprend que Carlone a l’intention d’écrire une histoire de l’annexion ; aussitôt Rapetti redevient professeur et s’empresse de lui donner des conseils : « Cette page d’histoire doit être écrite et nul ne peux mieux l’écrire que vous. Selon moi vous devez mettre beaucoup de documents en cette histoire, tous les documents de telle sorte que votre récit ne soit que la préface d’un recueil de documents expliqués. Le danger de votre oeuvre c’est l’imminence des passions du moment. En faisant un recueil de pièces vous évitez ce danger et tout en vous satisfaisant, vous fondez une oeuvre historique qui ne passera pas avec les circonstances. Si vous me permettez un conseil, c’est d’être d’une extrême indulgence pour les fautes et les personnes contraires et d’attribuer à chacun le mobile le plus généreux qu’il soit possible d’imaginer ; et quand un mobile de cette nature ne peut absolument pas être allégué, ne rien dissimuler, mais tout dire en invoquant pour excuse ce trouble, cet esprit d’égarement qui s’élève de tous les grands changements et surprend parfois les hommes dont les intentions sont les plus honnêtes. Je veux enfin que vous fassiez non un pamphlet, une accusation mais un vrai récit historique, destiné à durer, calme, impartial, lumineux, serein comme l’éternelle raison qui règne en l’histoire. Excusez mon audace de vous donner des conseils que vous ne me demandez pas. Mais je tiens à vous et mon amitié va au devant des périls que vous rencontrerez. Ecrivez-moi dans un petit moment de loisir et croyez bien, Monsieur, à mes sentiments d’affection et de haute estime. A vous. Rapetti »[122].

Rapetti sait aussi qu’il peut compter sur Carlone pour être son contact niçois. C’est dans ces termes qu’il lui annonce le passage à Nice de l’inspecteur général de la Librairie, un nommé Gallix : « C’est le secrétaire de l’ancienne Société du Dix-Décembre[123] dont vous avez dû dire du mal dans le temps. Mais c’est oublié ! Nous sommes tous Français, et bons Français. M. Gallix est chargé d’une mission de confiance. Renseignez-le de votre mieux en songeant que chacune de vos paroles doit porter, et point de soupçons ombrageux. Des notions sûres, précises, claires. Insistez pour affirmer que l’on doit tendre à Nice à développer l’intelligence qui est vive et naturelle»[124]. Rapetti préparerait-il quelque chose, pour lui ou pour un autre, en employant les services de fidèles amis bonapartistes ?

         Il ne confie pas tout à Carlone même si la lettre qu’il lui écrit pour le féliciter de son succès lors du voyage de l’Empereur à la mi-septembre et de sa nomination au grade de chevalier de la Légion d’honneur montre une certaine connivence entre les deux hommes. : « Mon Cher Monsieur Carlone. Voilà acquittée une des dettes de notre cause qui me tenaient le plus à coeur. Je vous savais proposé depuis longtemps mais on n’est jamais assez sûr de la justice ou de la politique. Heureusement c’est à l’Empereur lui-même qu’on s’est adressé ! S.M. vous a vu et entendu et votre succès a été assuré. Nul ne s’en réjouit plus que moi. Recevez les félicitations bien cordiales que je vous envoie. Votre discours est fort bien, digne de servir de préface au grand travail qu’il sollicite et qu’il annonce»[125].

Ambitions électorales 

         A l’approche des élections législatives prévues pour les 9 et 10 décembre 1860, Rapetti entre donc en campagne. De loin parce qu’il est à Paris. Mais il peut compter sur ses amis niçois. Il a toutefois quelques doutes. Il ne tient pas à affronter le maire de Nice ou quelque notable de poids. Il en fait part à Mazon le 1er décembre : « Si M. Malausséna est sur les rangs, je n’y suis pas. Si M. Pollonais ou M. Avigdor ont l’un ou l’autre des chances de succès, je ne veux pas m’opposer et je ne suis pas candidat. Il ne faut pas que je sois battu, que les souvenirs de l’annexion soient flétris en ma personne»[126].

Le Messager de Nice du 1er décembre soutient sa candidature : « M. Rapetti est d’Antibes et personne n’a oublié la capacité, le tact et la modération dont il a fait preuve dans les circonstances délicates qui ont accompagné l’annexion. M. Rapetti s’est acquis de véritables titres aux sympathies et à la reconnaissance de nos populations. Devant une telle candidature présentant de pareilles garanties nous n’hésitons pas à sortir de notre réserve […] En donnant hautement notre adhésion à la candidature de M. Rapetti nous croyons répondre au sentiment public et nous ne doutons pas  que nos prévisions ne reçoivent bientôt du suffrage universel une éclatante confirmation »[127]. Le lendemain, 2 décembre, Rapetti apprend que Lubonis, l’ancien gouverneur provisoire, est candidat. Il retire aussitôt sa candidature et demande conseil à Mazon : « Ménagez-moi l’avenir. Le titre de conseiller à Nice est-il aisément accessible pour moi ? »[128].

Le 4 décembre Rapetti avoue ne pas savoir ce qui s’est exactement passé. « Selon les apparences, le ministère à Paris est étranger à ce qui s’est passé à Nice à mon sujet. Cette candidature du gouvernement est une improvisation, ce me semble, de la préfecture »[129]. C’est à n’y rien comprendre : « M. Paulze d’Ivoy est tellement battu en brèche à Paris et M. le Sénateur Pietri et moi nous l’avons si souvent défendu en toute occasion que je me perds en conjectures sur les causes d’un pareil mauvais vouloir. Le Pays de ce soir publie la proclamation de M. Paulze d’Ivoy annonçant que l’administration à Nice n’a point de candidat, qu’elle restera impartiale, etc. Et Le Pays fait cette publication pour démontrer la nouvelle attitude que le gouvernement entend avoir désormais dans les élections […] Le Pays contredit donc l’assertion de M. Paulze d’Ivoy pour la candidature de M. Lubonis »[130]. Rapetti ne comprend que peu à peu les dessous de l’affaire. Il l’explique dans une lettre à Mazon du 23 décembre : « Il me semble bien que c’est ma candidature qui a eu la vertu de faire surgir un candidat officiel, nonobstant la promesse faite solennellement qu’il n’y en aurait pas. J’ajoute un autre symptôme moins conjecturel, c’est que j’ai écrit à M. Paulze d’Ivoy une lettre amicale dans laquelle je mettais à sa discrétion ma candidature conditionnelle, et M. Paulze d’Ivoy ne m’a fait l’honneur de me répondre sur un seul mot de regret »[131].

La déception de Rapetti est grande. Le 12 décembre il remercie Carlone pour son soutient et sa fidélité : « J’ai appris ce que vous avez fait pour moi à l’occasion de mon aventure. Votre bonne amitié m’est précieuse. J’y comptais et je ne vous remercie même pas. Vous avez compris qu’aucune sotte ambition ne m’a poussé en cette affaire et vous m’avez tendu la main de loin. Mon amour pour votre pays, en effet, avait seul inspiré ma résolution, qui me coûtait beaucoup. Je ne gloserai pas sur les étranges choses qui se sont passées à mon occasion. A quoi bon ! J’ai trouvé tous mes amis fidèles. Voilà qui me console et m’enorgueillit. Le reste c’est de la politique et j’y trouve encore un avantage, c’est d’y voir clair. Je sentais depuis longtemps un obstacle dans mes démarches pour les affaires de Nice. D’où cela me venait-il ? Je ne comprenais pas. Je comprends maintenant. Mais gardez cela pour vous. Comme ce méchant petit sentiment ne peut manquer de s’éteindre ce serait lui donner plus de corps qu’il n’en a que de s’en occuper. Tout s’arrangera »[132]. Rapetti vient de se rendre compte qu’il est tombé dans un traquenard. Il n’avait pas encore compris que Paulze d’Ivoy était favorable au « parti italien » et que sa candidature n’était pas souhaitée.

 Il reste les élections cantonales de la fin de l’année. Rapetti demande conseil à Carlone. « Quelques personnes songent à moi pour le Conseil général. Qu’en pensez-vous ? Dites le moi franchement. Je ne veux rien devoir à l’intrigue ». « Selon moi les Niçois doivent prendre comme un gage un de ces hommes qui sont venus à eux pour l’Annexion et qui sont partis tout chargés d’espérance. On devrait me prendre. Cela se comprend-il ? Si cela ne se comprend pas n’en parlons plus »[133]. Le 23 décembre il dit à Mazon qu’il est décidé à se présenter à Nice dans le canton ouest pour les élections des 29-31 décembre et 7 janvier ; il a écrit à Paulze d’Ivoy, qui dit-il « n’a aucune raison de m’être contraire ». Il n’y a plus qu’une difficulté, il n’est pas propriétaire et donc pas éligible. « J’ai écrit chez moi à Antibes pour prier mon beau père[134] de me céder une partie d’immeuble. J’espère que cela se fait en ce moment et que je serai sur les rôles des contributions directes. Ayant les biens de ma famille adoptive dans ce département, je n’y suis pas étranger. Ce que j’ai fait à Nice ne me rend pas étranger non plus. Je sais bien que la loi prise à la lettre peut fournir quelque objection mais le bon sens et l’esprit de légalité sont pour moi et je compte bien que M. le Préfet n’usera pas de rigueur envers moi »[135]. Sa candidature sera finalement recevable. Rapetti quitte Paris et vient faire une courte campagne, surtout pour s’assurer des soutiens indispensables. Un billet de Tiranty à Carlone du 27 décembre, l’avant-veille du premier tour, laisse apparaître la faiblesse des forces : « Mon cher Auguste, à 5 heures cet après-midi on se réunit chez moi quai Masséna, 5. Il s’agit de Rapetti, Boutau et toi. Tache de t’y trouver. Tout à toi. V. Tiranty »[136].

Mais Rapetti et ses amis manquent d’informations. Carlone avait demandé des renseignements, tant pour lui-même que pour Rapetti, au sous-préfet de Puget-Théniers Auguste Pietri, un neveu du sénateur Pietri. Celui-ci lui avait répondu le 19 décembre qu’il n’avait pas de renseignements sur les candidatures déclarées. Il déconseillait la candidature de Rapetti et conseillait à Carlone d’écrire à son oncle à Paris[137].

Rapetti apprend finalement qu’il doit affronter Prosper Girard, un ardent partisan de l’annexion, ancien président du tribunal de Commerce, ancien vice gouverneur de Nice au lendemain du plébicsite aux cotés de Lubonis et adjoint de François Malausséna à la mairie de Nice. La partie était disproportionnée. Girard pouvait prendre des voix tant du côté de l’ancien « parti italien » que du côté de l’ancien « parti français ». Rapetti se désengage, mais trop tard pour ne pas apparaître sur les bulletins de vote. Après le premier tour il écrit dès le 3 janvier au Messager de Nice pour faire part de sa non candidature : « Je ne suis pas du tout candidat pour le Conseil général des Alpes-Maritimes. Je vous prie de bien vouloir l’annoncer dans votre journal. Quelques amis avaient songé à moi pour cette candidature, je les remercie de tout cœur. Je suis et serai toujours heureux de me vouer aux intérêts d’un département où  j’ai ma famille et auquel m’attachent des souvenirs bien précieux  pour moi. Mais dans les circonstances actuelles j’avais écrit à Nice pour que mon nom ne fût pas proposé ou qu’il fût retiré s’il avait été mis en avant »[138].

Son nom se trouva tout de même sur les bulletins de vote le lundi 7 janvier. Rapetti obtint 52 voix contre 637 à Girard[139]. On ne peut s’empêcher d’y voir une manœuvre de la préfecture et de l’entourage « italien » de Paulze d’Ivoy. L’occasion était trop belle de pouvoir ridiculiser ainsi un aussi fidèle soutien du « parti français ». 

         Rapetti reprend son travail à la Commission de la correspondance de Napoléon. Fidèle à ses habitudes il a parallèlement d’autres occupations : il est « chef de section aux Archives impériales »[140], « bibliothécaire du Palais du Luxembourg »[141] et on peut penser que ce n’est pas tout. Il voit encore Mazon de temps à autre. Celui-ci constate qu’ « il se préoccupe beaucoup moins de ce qu’on fait à Nice », mais , ajoute-t-il, « c’est toujours un charmant garçon »[142].

         Rapetti sera reconduit comme secrétaire dans la deuxième commission présidée par le prince Napoléon en 1863. Celle-ci cesse ses fonctions le 31 décembre 1869. La qualité du travail accompli par Rapetti sera unanimement saluée par les contemporains et la postérité. Albert Du Casse, dans le Supplément à la correspondance de Napoléon I qu’il publie en 1887, soulignera l’action de Rapetti « âme, cheville ouvrière » de la Commission[143]. Dans l’immédiat, Rapetti espère toujours une nomination au Conseil d’Etat. Le Prince Bibesco assure qu’ « en 1870, il allait être nommé conseiller d’Etat, son nom figurait au décret soumis à la signature de l’Empereur, quand la tourmente étrangère s’abattit sur la France »[144].

         Rapetti est alors âgé de 59 ans. Il se retrouve sans emploi et a peu près démuni de moyens. Il trouvera appui et amitié chez le Prince Geoges Bibesco, fils de l’ancien souverain de Valachie, historien renommé et membre associé de l’Académie des sciences morales et politiques [145]. Il fréquente alors les relations de la maison. C’est dans cet environnement mondain qu’il trouve une ascendance nobiliaire dans la famille de son père adoptif « le comte de Trastour , allié à la maison des Grimaldi »[146]. Pour tous il est maintenant « comte Rapetti de Trastour ». Il fut entouré par les Bibesco avec attention jusqu’à sa mort. Il décède pieusement le 28 juillet 1885[147]. Le chroniqueur de la Gazette anecdotique, littéraire, artistique et bibliographique[148] se souvient que le comte Rapetti était « un beau vieillard, très bienveillant, causeur infatigable quand la conversation s’engageait sur l’histoire ». A quoi on ajoutera le témoignage du Prince Bibesco, même s’il est marqué par l’amitié : « On pouvait à toute heure, ouvrir ce livre vivant à la page qu’on désirait consulter, avec le sentiment de sécurité absolue d’y trouver le renseignement cherché   Il parlait des Pandectes, du droit coutumier, du Code civil ou du droit canon avec la même facilité, la même érudition, la même profondeur de vues que s’il eût vécu à chacune de ces époques. C’est que le comte Rapetti n’avait rien de superficiel ; la nature en le traitant en enfant gâté, lui avait donné non seulement cette puissante organisation intellectuelle qui faisait de lui un homme supérieur, mais elle s’était plu à développer encore en lui le goût de l’explorateur, l’amour des fouilles en quelque sorte dans le travail »[149].

 

 

 

 

 

 


[1] Les Niçois ont offert à Rapetti un magnifique sous-main en marqueterie locale  en remerciement de son action pour Nice. Ce cadeau a attiré l’attention de Lucien Mari, trésorier de l’Académia Nissarda et fin connaisseur de cet art. Pourquoi les Niçois auraient-il offert un tel présent à un simple secrétaire ? La découverte de Pierre-Nicolas Rapetti est partie de là. Elle devait réserver quelques surprises. Je tiens à remercier Lucien Mari et Paul-Louis Malausséna pour l’aide apportée à ce travail. Sur la marqueterie niçoise : Lucien Mari, « Marqueteurs et marqueterie à travers les expositions du XIXe siècle », Nice Historique, 2006, pp. 55-79 ; Paul-Louis Malausséna et Lucien Mari, « La marqueterie niçoise au XIX siècle », Nice Historique, 2006 pp. 81-92. 

[2] Cf. infra. Michel Bottin, « Le "parti français" après l’annexion. Chronique de la vie politique niçoise d’après la correspondance d’Auguste Carlone (juin-décembre 1860) », Nice Historique, numéro spécial du CLe anniversaire de l’annexion, 2010.

[3] Ernest Hildesheimer, « La réunion de Nice à la France vue à travers la correspondance du ministère français des Affaires étrangères », Nice Historique, 1960, pp. 92-140. Ugo Bellagamba, « Pierre-Marie Piétri, l'homme dans le clair-obscur de l'annexion. », Nice Historique, numéro spécial du CLe anniversaire de l’annexion, 2010.

[4]  Archives nationales, 3822 X 3, dossier de naturalisation, extrait du registre des déclarations faites par les étrangers, XIe arrondissement de Paris, 2 juillet 1839. C’est aussi la date donnée par le Prince Bibesco, un proche de Rapetti. Prince Georges Bibesco, Le comte Rapetti, sa vie, ses œuvres, suivi du discours prononcé sur sa tombe, Paris, 1885, 39 p. Quérard donne la date du 27 novembre 1812. Entrée « Rapetti Pierre-Nicolas » dans La France littéraire ou dictionnaire bibliographique des savants, historiens et gens de lettres, par J.-M. Quérard, T XI, Paris, 1854-1857.

[5] « Rapetti Pierre-Nicolas », La France littéraire,Quérard, op. cit.

[6] Archives Nationales, 3822 X 3, rapport du 18 février 1841.

[7] Prince Bibesco, op.cit. p.4.

[8] Nicolas Trastour, veuf de Jeanne Marie Picena native d’Isola d’Asti, né à Antibes fils de feu Jean Trastour, pharmacien à Antibes et de Claire Jaubert, décédé  le 18 décembre 1864. Etat civil Antibes. Jeanne Picena est très probablement la mère Nicolas Rapetti, épouse de Barlolo. Bibesco, op. cit, p. 3, dit que Nicolas est le fils de Giovanna Piceni. Jeanne est donc mariée en secondes noces avec Trastour. Trastour a participé à toutes les campagnes de l’Empire. Il est officier de la Légion d’honneur et conseiller municipal d’Antibes. Journal de Nice du 22 décembre 1864.

[9] Jeanne Marie Picena. Rapetti parle de Trastour comme étant son « beau-père ». Arch. dép. Ardèche, 52 J 382, 23 décembre 1860, lettre de Rapetti à Mazon.

[10] Revue de thérapeutique médico-chirurgicale, 1865, p. 85.

[11] Bibesco, op. cit. et Quérard, op. cit.

[12] C’est le titre qu’il porte dans le Précis de l’Histoire du droit civil français de Poncelet et Rapetti paru en 1838.

[13] Archives nationales, 3822 X 3, dossier de naturalisation, extrait du registre des déclarations faites par les étrangers, XIe arrondissement de Paris, 2 juillet 1839.

[14] Dupin Aîné, Profession d’avocat. Recueil de pièces concernant l’exercice de cette profession, T. 1, 1832, pp. 694 sq.

[15] Loi du 22 frimaire an VIII.

[16] Archives nationales, 3822 X 3, dossier de naturalisation.

[17] Catherine Lecomte, « Poncelet François-Frédéric », Dictionnaire historique des juristes français, XIIe-XXe siècle, dir. Patrick Arabeyre, Jean-Louis Halpérin et Jacques Krynen, PUF, Paris, 2007.

[18] Madeleine Ventre-Denis, « La première chaire d’histoire du droit à la Faculté de droit de Paris », Revue historique de droit français et étranger, 1975, pp. 596-622.

[19] Bibesco, op. cit., p. 36.

[20] Archives nationales, 3822 X 3, dossier de naturalisation, extrait du registre des déclarations faites par les étrangers, XIe arrondissement de Paris, 2 juillet 1839.

[21] Christian Chêne, « Hello Charles-Guillaume », Dictionnaire historique des juristes français,op. cit.

[22] Catherine Lecomte, « Ortolan Joseph-Elzéar », Dictionnaire historique des juristes français,op. cit.

[23] Lettre à l’Administrateur du Collège de France, 26 février 1849, Bibesco, op. cit., p. 10.

[24] Nicolas Rapetti, « Rossi », Dictionnaire encyclopédique de la France, par Philippe Le Bas, Paris, 1845, tome 12, pp. 156-163. Alfred Dufour, « Rossi Pellegrino », Dictionnaire historique des juristes français, op. cit. Rossi sera nommé pair de France en 1839.

[25] 1836-1841, 8 tomes. Entrées « code », « barreau », etc

[26] Juriste italien appelé à Milan en 1806 par le gouvernement du royaume d’Italie pour y réformer la législation. Il fut en particulier rapporteur d’un projet de code de procédure criminelle. Ortolan, Cours de législation comparée. Analyse du cours 1830-1840, Paris, 1841, p. 50.

[27] « Rapetti Pierre-Nicolas », La France littéraire,Quérard, op. cit.

[28] Journal  général des tribunaux, 26 août, 14 septembre, 27 octobre et 18 novembre 1837.

[29] Jean-Pierre Alline, « Wolowski Louis-François-Michel-Raymond », Dictionnaire historique des juristes français, op. cit.

[30] 1838, tome 9, pp. 124-132. Il s’agit d’un compte rendu critique sur l’ouvrage du Baron de Saint Genois, Histoire des avoueries en Belgique.

[31] Frédéric Audren, « Klimrath Henri », Dictionnaire historique des juristes français, op. cit.

[32] Extrait des procès-verbaux des séances du Comité historique des monuments écrits, Paris, 1850, p. 127, séance du 1re mars 1838, p. 127.

[33] Ibidem, séance du 16 juin 1839, p. 132.

[34] « Rapetti Pierre-Nicolas », La France littéraire, Quérard, op. cit.

[35] Paris, Joubert, 1838, 120 pages. Réédition Bruxelles, 1839, 122 pages.

[36] Revue des deux mondes, T. 16, 1838, p. 396.

[37] Revue de législation et de jurisprudence, 1838, T. 8, p. 80.

[38] « L’article ne porte pas le nom de Rapetti ». Quérard, op.cit.

[39] Dictionnaire en 12 volumes, 1840-1845.

[40] Annales historiques de la France, dir. Philippe Le Bas, T. 1, Paris, 1840, p. V.

[41] Qui « n’apporta à M. Lerminier aucun bénéfice matériel et ne coûta pas un sous au budget », Revue des deux mondes, T. 20, 1839, p. 877.

[42] Frédéric Audren et Georges Navet, « Notes sur la carrière d’Eugène Lerminier au Collège de France (1831-1849) », Revue d’histoire des sciences humaines, 2001/1 n° 4, pp. 57-67 aux p. 61-62. et également Georges Navet, « Eugène Lerminier (1803-1857) : de la science du droit comme synthèse de l’histoire et de la philosophie », Revue d’histoire des sciences humaines, 2001/1 n° 4, pp. 33-56.

[43]  Les étrangers, en droit romain et en droit français et La condition des étrangers en droit romain et en droit français. La thèse a été soutenue à Rennes les 8 juin et 31 juillet 1841 et publiée, Imprimerie de Vatar, Revue étrangère et française de législation, de jurisprudence et d’économie politique, T.9, Paris, 1842, pp. 516-518.       

[44] Ibidem, p. 516.

[45] Frédéric Audren et Georges Navet, « Notes sur la carrière d’Eugène Lerminier, op. cit., p. 62.

[46] Voir les plans détaillés des cours dans Bibesco, op. cit., pp. 10-18.

[47]  La Revue indépendante, T. 6, Paris, 1845, pp. 469 sq. en fait une critique élogieuse.

[48] Frédéric Audren et Georges Navet, « Notes sur la carrière d’Eugène Lerminier, op. cit., p. 64.

[49] Bibesco, op. cit., pp. 9-20.

[50] Entrées « Parlement », « Propriété », « Rossi », « Servage », Dictionnaire encyclopédique de la France, par Philippe Le Bas, Paris, 1840-1845, au T. 12, 1845, p. IV.

[51] Li Livres de jostice et de plet, Paris, 1850. Préface de Rapetti de 52 pages.

[52] Ibidem, p. VI.

[53] Bibesco, op. cit., p. 20.

[54] Jules Brisson et Félix Ribeyre, Les grands journaux de France, Paris, 1862, p. 59.

[55] Georges d’Heilly, Dictionnaire des pseudonymes, 2e éd, Paris, 1869, p. 200.

[56] Le génie des femmes, journal publié par Cellier du Fayel, n° 1, janvier 1844.

[57] Quérard, La France littéraire, op.cit.

[58] W.Ducket, dir., Dictionnaire de la conversation et de la lecture, 2e édition, T.2, Paris, 1840.

[59] Le Correspondant, T. 10 à T. 14, 1844-1846.

[60] Du pouvoir de l’Etat sur l’enseignement d’après l’ancien droit public, 1844.

[61] Le Correspondant, T. 14, p. 882.

[62] Caroline Gau-Cabbée, « Troplong Raymond-Théodore », Dictionnaire historique des juristes français, op. cit.

[63] Jean-Jacques Clère, « Laboulaye Edouard René Lefebvre de », Dictionnaire historique des juristes français, op. cit.

[64] Simon Charles Henri Cros, « docteur en droit, professeur de l’Université », auteur d’une Théorie de l’homme intellectuel et moral. Félix Fénéon, Oeuvres plus que complètes, présentation par Joan U. Halpérin, Droz, Genève, 1970, p. 596. La théorie de l’homme intellectuel et moral connaîtra plusieurs rééditions. Simon Charles Cros est le père de Charles Cros, le physicien inventeur du paléographe.

[65] Charles Alphonse Chambellan, Droit romain : de usucapionibus. Droit français : la prescription, thèse, 1837 et Etudes sur l’histoire du droit français, 1848. Il a été, comme Rapetti, professeur de droit privé à l’Ecole d’administration.

[66] A partir de sa bibliographie, Wikipedia.

[67] Frédéric Audren et Georges Navet, « Notes sur la carrière d’Eugène Lerminier, op. cit., p. 64.

[68] Quérard, op. cit.

[69] Bibesco, op. cit., p. 7.

[70] Quérard, op. cit.

[71] Patrick Lahorie, Contrôle de la presse, de la librairie et du colportage sous le Second Empire, 1995, p. 456. Rapetti  y perçoit un traitement de 2400 francs.

[72] Archives nationales, F 18/310.

[73] Archives nationales, correspondance de Napoléon, F/70/321 et 322.

[74] Ibidem.

[75] Jacques-Olivier Boudon, «  Un monument de papier à la gloire du Premier Empire : l’édition de la correspondance de Napoléon I sous le Second Empire », Archives et nations dans l’Europe du XIX siècle, dir. Bruno Delmas et Christine Nougaret, Etudes et rencontres de l’Ecole des Chartes, 2004, pp. 171-185.

[76] Sur l’Histoire de Cent ans de César Cantu (19 septembre 1854) ; sur les deux premiers volumes de l’Histoire de France d’Henri Martin ( 1 mai 1855) avec une importante polémique entre Rapetti et Henri Martin ; sur Montaigne de Bigorie de Laschamps (24 juillet 1855) ; sur la biographie d’Amédée Renée sur Olivier Cromwell ( 20 décembre 1855) ; sur l’ouvrage de Beccaria Des délits et des peines, nouvelle édition, introduction par Faustin Hélie (24 août 1856) ; sur l’Histoire des théories et des idées morales dans l’Antiquité de M. J. Denis (27 juin 1857) ; etc.

[77] Quérard, op. cit. L’étude est parue « en feuilletons » au cours du mois d’avril 1853. « L’auteur a depuis refondu cette étude. L’ouvrage, plus complet et augmenté notamment de la traduction d’un travail analogue  de M. de Savigny, est prêt d’être achevé et l’auteur se propose de le publier prochainement ». Il ne le sera pas.

[78] Les frères du Temple. Episodes de l’histoire du XIVe siècle. Première partie, L’arrestation. Paru en feuilleton en janvier et février 1854. Rapetti a suspendu la publication de la suite « jusqu’à ce qu’il fût muni des documents qui lui manquaient » ? Quérard, op. cit.

[79] T. 2, col. 592-606, 1855.

[80] Il était également professeur à la Faculté de droit de Paris. Guy Antonetti, «  La Faculté de droit de Paris à l’époque où Boissonnade faisait ses études », Revue internationale de droit comparé, 1991, p. 343.

[81] Adolphe Franck, 1809-1893, est déjà l’auteur en 1855 de plusieurs ouvrages de philosophie historique

[82] Quérard, op. cit. et Journal d’Hippolyte Fortoul, ministre de l’Instruction publique, publié par Geneviève Massa-Gille, T. 2, Droz, Genève, p.175 ; en note, Massa-Gille  dit que Rapetti fut choisi par le Collège de France « par antisémitisme ».

[83] Lettre de Franck du 15 décembre 1855, Séances et travaux de l’Académie des sciences morales et politiques, T. 15, 1856, p. 444.

[84]  Franck, 25 suffrages sur 26 comme premier candidat. Pour le second candidat, Chambellan, 13 suffrages, Rapetti 7 et 5 ax æquo. Au second tour pour le choix du second candidat, Chambellan 17 et Rapetti 7. Séances et travaux de l’Académie des sciences morales et politiques, T. 15, 1856, p. 447.

[85] 1608-1658. Fils d’Isaac Lemaistre et de Catherine Arnault, fille aînée de Antoine Arnault, « solitaire » à Port-Royal.

[86] Antoine Lemaistre. Etude sur l’éloquence judiciaire au XVIIe siècle, Paris, 1856.

[87] Nicolas Rapetti, Antoine Lemaistre et son nouvel historien, Paris, 1857, 59 p. Vallée répond dans une nouvelle édition, augmentée d’une longue introduction, en soulignant le « magistral travail de M. Rapetti sur le précédent ouvrage », Oscar de Vallée, Antoine Lemaistre et ses contemporains, Paris, 1858,

[88] 474 pages, La défection de Marmont en 1814, Paris, 1858.

[89] Archives nationales, légion d’honneur, F/70/118. Lettre  du 19 juillet 1860. 

[90] Archives nationales, F 18/310.

[91] Mazon, « Notes inédites » suivies des commentaires d’Auguste Carlone, publiés par Paul Messié, Nice Historique, 1960, p. 190, note 1.

[92] Yves Hivert Messeca, Napoléon, Lucien, Plon Plon et les autres. La maçonnerie officielle sous le Second Empire, par le web. 

[93] Né à Milan en 1803 d’Alexandre Conneau, né à Béziers, receveur de la Couronne du royaume d’Etrurie et de Thérèse Raucher, née à Nice. Conneau a fait ses études de médecine à Florence et s’est d’abord établi à Rome.

[94] Faut-il ajouter Franceschini Pietri, le neveu de l’ancien préfet de police de Paris ? Il est secrétaire de l’Empereur ; il le suit en Italie en 1859 et est à partir de cette époque le dépositaire des chiffres du souverain. Adrien Duchesne de Gillevoisin, duc de Conegliano, Le Second Empire. La Maison de l’Empereur, 1891, reprint 2005, p. 122.

[95] L’Ami de la religion, T. 2, 1859, p. 259.

[96] Revue de presse de L’Ami de la religion, 1859, p. 379.

[97] Septembre 1859.

[98] Archives nationales, 400 AP/132, Kossuth, lettres à propos de la Légion hongroise servant en Italie. Pour mention ; non consulté.

[99] André Lorant, Le compromis austro-hongrois et l’opinion française en 1867, Droz, Genève, 1971, p. 28.

[100] Ibidem, p. 30.   

[101] Archives nationales, 400 AP/117, journal de l’état-major général du 5e corps d’armée en Italie commandé par le Prince Napoléon, mai-juin 1859. Pour mention ; non consulté.

[102] L’Avenir de Nice du 4 août 1859.

[103] Ernesto Ravviti, Delle recenti aventure d’Italia, Venezia, 1864

[104] L’Ami de la religion  du 16 août 1859.

[105] Cronaca degli avvenimenti d’Italia nel 1859 compilata per cura di Antonio Zobi, vol. 2, Firenze, 1860, p. 610. N.C. Marescotta, Il Professor Giuseppe Montanelli e gli esclusive, Firenze, 1860, p. 115.

[106] Albin Mazon, « Notes inédites » suivies des commentaires d’Auguste Carlone, publiés par Paul Messié, Nice Historique, 1960, pp.181-221 à la p. 190, note 1.

[107] Ibidem.

[108] Robert Latouche, Histoire de Nice, T2, Nice, 1954,  p 12.

[109] Ami de Napoléon III et intermédiaire entre l’Empereur, Cavour et Victor Emmanuel II.

[110] Robert Latouche, Histoire de Nice, op. cit., p. 12.

[111] Albin Mazon, « Notes inédites », op. cit., p. 203, note 1.

[112] Albin Mazon, « Notes inédites », op. cit., p. 200, note 1.

[113] Marc Ortolani, « Le voyage de Napoléon III à Nice, une consécration symbolique de l’annexion », Nice Historique, 2010.

[114] Michel Bottin, « Le "parti français" après l’annexion. Chronique de la vie politique niçoise d’après la correspondance d’Auguste Carlone (juin-décembre 1860) », op. cit.

[115] Albin Mazon, « Notes inédites », op. cit., p. 208, note 2.

[116] Lettre du 22 juin 1860, Archives nationales, légion d’honneur, F/70/118. 

[117] Ibidem.

[118] Arch. dép. Alpes-Maritimes, 7 J 36, lettre de Rapetti à Carlone, 24 août 1860.

[119] Henri Courrière, L'Etat, la nation et la petite patrie. La vie politique à Nice et dans les Alpes-Maritimes de 1860 à 1898 : genèse d'un département français, genèse d'un département français, thèse, Université de Nice, 2008, volume 4, annexes.

[120] La Gueronnière.

[121] Arch. dép. Alpes-Maritimes, 7 J 34, lettre de Mazon à Carlone, 4 août 1860.

[122] Arch. dép. Alpes-Maritimes, 7 J 36, lettre de Rapetti à Carlone, 12 décembre 1860.

[123] Organisation bonapartiste de soutien à l’action de Louis-Napoléon Bonaparte élu président de la République le 10 décembre 1848.

[124] Arch. dép. Alpes-Maritimes, 7 J 36, lettre de Rapetti à Carlone, 17 septembre 1860.

[125] Ibidem

[126] Arch. dép. Ardèche, 52 J 382, 1 décembre 1860, lettre de Rapetti à Mazon. Lettre envoyée le 2 avec l’annonce de son retrait à la suite de la candidature de Lubonis.

[127] Le Messager de Nice, 1er décembre 1860.

[128] Arch. dép. Ardèche, 52 J 382, lettre de Rapetti à Mazon, 1 décembre 1860.

[129] Arch. dép. Ardèche, 52 J 382, lettre de Rapetti à Mazon, 4 décembre 1860.

[130] Ibidem.

[131] Arch. dép. Ardèche, 52 J 382, lettre de Rapetti à Mazon, 23 décembre 1860.

[132] Arch. dép. Alpes-Maritimes, 7 J 36, 12 décembre 1860, lettre de Rapetti à Carlone.

[133] Ibidem.

[134] Son père adoptif a épousé sa mère, veuve de Bartolo Rapetti, son père.

[135] Arch. dép. Ardèche, 52 J 382, 23 décembre 1860, lettre de Rapetti à Mazon.

[136] Arch. dép. Alpes-Maritimes, 7 J 36, 27 décembre 1860, billet de Tiranty à Carlone.

[137] Ernest,Hildesheimer, Fonds Auguste Carlone. Inventaire analytique de la sous-série 7 J, Nice, 1972, p. 28, 7 J 92.

[138] Le Messager de Nice, 6 janvier 1861. Donc à la veille du second tour.

[139] Arch. dép. Alpes-Maritimes, 3 M 199.

[140] Brisson et Ribeyre, Les grands journaux, op. cit., p.59.

[141] Louis Figuier, Exposition et histoire des principales découvertes, Paris, 1862, p. 291.

[142] Arch. dép. Alpes-Maritimes, 7 J 34, lettre de Mazon à Carlone, 18 août 1861.

[143] Dans l’introduction de l’inventaire des papiers de Nicolas Rapetti, Archives Nationales, AB AX 5348, une boîte de papiers entrés en 2007 et qui concerne essentiellement cette correspondance. Non consulté.

[144] Prince Bibesco, op. cit, p. 38.

[145] « qui subvint aux derniers besoins du comte Rapetti », Bulletin du bibliophile et du bibliothécaire, 1900, p. 185.

[146] Bibesco, op. cit., p. 36. Les sources antiboises sont muettes sur ce point.

[147] Bibesco, op. cit.

Le prince Georges Bibesco, 1834-1902, est le troisième fils du prince Geoges Bibesco (1805-1873) hospodar (souverain) de Valachie de 1843 à 1848 et, comme membre du Divan, chargé de la réorganisation de la Moldo-Valachie en 1857. Il est un historien militaire de renom et membre associé de l’Académie des Sciences morales et politiques. Il a épousé en 1875 Valentine de Caraman-Chimay. C’est le père de Georges Valentin Bibesco, le pionnier de l’aviation, époux de la romancière Marthe Bibesco (1886-1973). Celle-ci a déposé ses archives à l’Université du Texas. On y trouve plusieurs cartons concernant Rapetti. Ce fonds n’est pas utilisé dans cette étude : Archives de la Princesse Bibesco, University of Texas, Austin, The Harry Ranson Humanities Research HRC : series IV, sub-series C, Rapetti Collection (1768-1866), box 350-box 366.

[148] Volume 20, p. 66.

[149] Bibesco, op. cit., p.35.

 

 

 

 

 

     

 
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