Nice région Sénat Histoire et mémoire
 
  
Le Sénat de Nice
 
Histoire et mémoire
 
(1614-2014)
 
 
 
 
Pour citer : Michel Bottin, « Introduction. Le Sénat de Nice. Histoire et mémoire. 1614-2014 »,  in Actes de la de la Journée d’études du 8 mars 2014 organisée à l’occasion du Quatrième centenaire de la fondation du Sénat de Nice, par la Ville de Nice, le Département d’Histoire du droit de l’Université Nice-Côte d’Azur, le Laboratoire ERMES. Edité par l’Acadèmia Nissarda en 2021, pp. 13-31.
 
 
           
           
Le 8 mars 1614, le duc de Savoie Charles-Emmanuel Ier établissait à Nice une cour souveraine chargée de rendre la justice civile et criminelle en dernière instance et d’appliquer les lois ducales dans son ressort. Ses compétences s’exerçaient sur un ensemble régional comprenant ce que nous appelons aujourd’hui le comté de Nice mais aussi la vallée de Barcelonnette en Haute-Provence, la haute vallée de la Stura et le versant piémontais du Mercantour, le marquisat de Dolceaqua dans l’arrière-pays de Vintimille, et enfin la principauté d’Oneglia, le marquisat de Maro et le comté de Prela, possessions de la Maison de Savoie enclavées dans le territoire de la République de Gênes. Cette création faisait de Nice une capitale régionale et plaçait son sénat sur le même plan que ceux de Chambéry et de Turin établis respectivement en 1536 et 1561[1].
            Les raisons de cette création paraissent claires. Le texte d’établissement met en avant les difficultés des plaideurs obligés de franchir de hautes montagnes, enneigées pendant une grande partie de l’année, pour porter leurs appels au Sénat de Turin. La Ville de Nice réclamait cette réforme depuis longtemps et le duc Emmanuel-Philibert, père de Charles-Emmanuel Ier, n’y semblait pas opposé.
 
Mais une telle création avait un coût, financier évidemment, mais surtout politique. Elle amputait le ressort du Sénat de Turin et relativisait l’importance des deux sénats existants, l’un et l’autre justifiés par leur statut de capitale du duché, l’ancienne, Chambéry, et la nouvelle, Turin. Enfin, juridiquement, la création niçoise était une entorse majeure au principe de base de l’administration du duché qui distinguait les provinces « en deçà des monts » de celles situées « au-delà des monts ». Les premières relevaient du Sénat de Turin, les secondes du Sénat de Chambéry. Nice et les territoires avoisinants faisaient partie de la première catégorie. L’enjeu politique et administratif était donc considérable. Les raisons avancées dans les lettres patentes de création sont trop pratiques et trop techniques pour justifier, à elles seules, une pareille transformation. Il faut chercher plus loin.
 
L’affaire Annibal Grimaldi de Beuil
            Au plan politique d’abord. On doit replacer la création du Sénat de Nice dans le contexte de la politique conduite à Nice par le puissant Annibal Grimaldi, comte de Beuil, gouverneur de Nice et du comté. Celui-ci, en poste depuis 1591, est en outre un seigneur féodal fortement possessionné dans la montagne de Nice. Il est devenu au fil des ans la plus influente personnalité de la province. Le duc a quelques bonnes raisons de craindre une dérive, et peut-être une sécession. Les relations qu’entretient Annibal Grimaldi avec le roi de France constituent en effet une menace. Les indices se sont accumulés mais ce sont les troubles causés à Nice à l’automne 1613 par une partie de la jeunesse à l’occasion d’un charivari très politique contre un agent du duc qui poussèrent celui-ci à intervenir. Charles-Emmanuel Ier se déplace à Nice au début du mois de janvier 1614, au cœur de l’hiver, officiellement pour inspecter les fortifications et pour participer au carnaval. Mais le duc est trop fortement accompagné pour qu’on puisse penser un seul instant qu’il s’agit d’un simple déplacement : 400 suisses, 300 mousquetaires et 200 arquebusiers sont prêts à engager l’épreuve de force en cas de besoin. Mais dans l’immédiat la priorité est à la diplomatie et aux bonnes manières. Le duc rencontre Grimaldi à plusieurs reprises, fait le point des questions, l’assure de son appui ... Et l’invite à Turin.
            Parallèlement le duc réunit au palais ducal une assemblée des représentants de la province et leur annonce sa volonté de créer un sénat. L’accueil et évidemment très favorable. Le duc fait sur le champ publier les lettres patentes de création du sénat et, sans perdre de temps, fait venir de Turin les cinq magistrats composant la nouvelle cour, toujours en plein hiver. Les partisans du comte de Beuil sont désarçonnés tant par les faveurs prodiguées à Grimaldi que par la création du sénat. Le 16 mars une procession solennelle à travers les rues de Nice clôt l’opération politique. Le duc y apparaît entouré des autorités municipales et de nombreuses personnalités. Les nouveaux sénateurs portent la robe rouge et sont précédés de la masse d’argent symbole de leur autorité. Le lendemain le sénat tient sa première réunion dans la maison Maletta, à côté du palais ducal.
             Le duc reste à Nice jusqu’au 25 avril, début de la Semaine sainte. En partant il nomme un nouveau gouverneur et demande à Annibal Grimaldi de le suivre à Turin accompagné de sa famille. C’est le sénat qui est chargé de faire exécuter ces ordres et de prendre les mesures nécessaires pour neutraliser, par la surveillance ou l’arrestation, toutes les personnes au service du gouverneur. Ce qui sera fait avec efficacité et sans débordement. La nouvelle cour inaugurait ses fonctions par une magistrale opération de maintien de l’ordre. Une page de l’histoire de Nice venait de se tourner.
 
Aux origines d’une région niçoise
            Au plan institutionnel ensuite. La création du Sénat de Nice est en effet un des événements institutionnels majeurs de l’histoire de Nice. Elle fait passer Nice d’un statut de capitale provinciale à celui de capitale régionale. D’abord parce que la nouvelle institution réunit dans un même ressort des territoires ligures et des territoires provençaux, situation remarquable au regard de l’érudition historique de l’époque ; en paraphrasant l’historien niçois Gioffredo on peut dire que les premiers sont « d’Italie », les seconds sont « de France ». Ensuite parce que, dans l’esprit du duc et de ses juristes, ce ressort n’est pas encore borné.
 Côté français, il est une avancée en Provence et sert de base aux prétentions du duc pour étendre son influence jusqu’à Brignoles et même jusqu’à Aix. Il a échoué dans ce projet en 1591. Le sénat doit l’aider à reprendre sa politique de frontières dans de bonnes conditions. La condamnation à mort en 1621 d’Annibal Grimaldi de Beuil par le Sénat de Nice pour trahison, et la redistribution de ses fiefs presque tous frontaliers avec le royaume de France, est une première étape de cette politique.
Du côté de la République de Gênes, le duc développe une ambitieuse politique territoriale sur des bases féodales. La prise de possession en 1577 de la principauté d’Oneglia par achat aux Doria est une étape décisive de cette progression. D’autres fiefs suivront jusqu’à la Révolution. Il reviendra au Sénat de Nice d’assurer la gestion de proximité de tous ces territoires, politiquement et administrativement, et d’éviter autant que possible les incidents frontaliers et diplomatiques avec la République de Gênes. Enfin, troisième manifestation de cette dimension régionale, c’est dans cet espace que s’organisera à la fin du XVIIe siècle l’intendance générale de Nice, cadre de fonctionnement de la plupart des services administratifs jusqu’en 1860.
 
            Il reste à replacer cette création dans le contexte institutionnel, judiciaire et normatif, du début du XVIIe siècle. La décision de Charles-Emmanuel Ier est exceptionnelle parce qu’elle introduit une nouvelle cour dans le cercle plutôt étroit des cours souveraines en Europe. Un inventaire exhaustif des juridictions jugeant en dernier appel serait sans doute nécessaire pour replacer le Sénat de Nice dans ce cadre global. À défaut, une évaluation sommaire peut suffire à éclairer la question : une dizaine de cours souveraines en France, quatre ou cinq pour la péninsule ibérique, une douzaine pour l’Italie, une quinzaine pour le Saint-Empire - celles qui bénéficient du jus de non appellando à la Chambre d’Empire -, deux pour le royaume de Pologne-Lituanie. Il en manque certainement quelques-unes mais le total ne doit pas dépasser la cinquantaine. Et Nice en fait partie ! L’histoire récente a sans doute trop sous-estimé l’importance du cadeau institutionnel fait à Nice par Charles-Emmanuel Ier. Aucune rue, aucune place ne porte son nom. Sa mémoire n’est rappelée que par le quai qu’il partage au port de Nice avec son lointain successeur Charles-Emmanuel III. Mais c’est pour son action en faveur du commerce maritime, la création du port franc en 1612, que sa mémoire est honorée. Pas pour le sénat.
            Un mot enfin sur le nom de sénat donné à cette institution. Il est assurément ambigu et peu explicite. C’est pour cette raison d’ailleurs qu’on éprouve le besoin de parler de cour d’appel ou de cour souveraine ou encore de parlement. Le terme sénat éclaire pourtant plus nettement la nature de l’institution que tout autre. Il n’est pas exceptionnel en Italie (Sénat de Milan, Sénat de Mantoue, etc …) et il est largement employé de façon générique en Espagne comme en France (senatus cataloniae, senatus parisiensis, senatus Tolosae, etc…). Il exprime mieux que tout autre appellation la transformation au milieu du XVIe siècle des cours de justice médiévales en conseils de législation déléguée. Ces cours travaillent aux côtés du souverain : elles le conseillent et elles assurent la diffusion et l’application des normes. Elles enregistrent les lois, prennent des arrêts de règlement et des mesures administratives.
Les progrès de la connaissance de l’histoire romaine au cours du XVIe siècle ont très naturellement conduit les contemporains à rapprocher ces fonctions de celles exercées par le Sénat de Rome, moins d’ailleurs celui de la République que celui du Principat. Dans ce système constitutionnel, que les historiens nomment « dyarchie », le princeps, l’empereur si on préfère, apparaît comme secondé par le Sénat tant dans l’œuvre législative avec les sénatus-consultes que dans l’action administrative, particulièrement dans les provinces dites sénatoriales. Les cours souveraines mises en place au cours du XVIe siècle sont ainsi des « sénats ». Et c’est d’ailleurs pour cette raison qu’elles peuvent produire de la jurisprudence, c’est à dire des décisions judiciaires qui, une fois motivées, sont de véritables lois.
 
Composition et fonctionnement
 
De la chambre unique à la deuxième chambre
            Le Sénat de Nice est composé à sa création d’un président et de quatre sénateurs. Il fonctionne en chambre unique. Le ministère public est assuré par deux avocats fiscaux. Sa composition s’étoffe progressivement. En 1638, il comprend un premier président, un chevalier d’honneur, cinq sénateurs, trois avocats fiscaux, deux avocats des pauvres, un secrétaire, deux huissiers et huit soldats de justice. Le total des dépenses s’élève à 11.000 livres. Il s’élève à 15.086 en 1643, à 16.000 en 1658, à 24.367 en 1681. À cette époque il est composé de 17 personnes, magistrats du siège, parquet, assistance judiciaire aux pauvres, auxquelles il faut ajouter les huissiers, les soldats de justice, le chapelain et le secrétaire. Ce qui même en tenant compte d’environ 20% d’inflation correspond à un doublement de la dépense depuis sa création.
            Cette évolution est freinée à partir du règne de Victor-Amédée II et pendant tout le XVIIIe siècle. L’accroissement du nombre de magistrats reprend après 1814 ; on compte en 1835 dix magistrats du siège y compris le premier président qui est d’ailleurs, c’est une première, un Niçois Hilarion Spitalieri de Cessole. L’avocat fiscal est secondé par quatre substituts, l’avocat des pauvres et le procureur des pauvres par deux substituts chacun. Signe de cette croissance, une deuxième chambre est mise en place en 1845.
            Les juges, les membres du parquet ainsi que les avocats et procureurs des pauvres sont nommés par le duc. Ils sont choisis en fonction de leur expérience comme avocat ou comme juge dans une juridiction inférieure. Le promu est le plus souvent docteur en droit. C’est le sénat qui s’assure de la compétence des personnes pressenties.
            Aucun Niçois n’en fait partie à l’origine. La ville de Nice a en effet expressément demandé au duc que nul citoyen ou étranger apparenté à un Niçois ne puisse être sénateur. Il s’agissait d’écarter les brigues et les accointances familiales. Mais la mesure ne concernait pas les autres fonctions, substituts du ministère public, avocat des pauvres, etc. Il fallut très vite faire des exceptions. Jean Ludovic Fabri est, en 1622, le premier niçois nommé sénateur. Puis le mouvement s’accélère. Les Niçois qui occupent au sénat des fonctions inférieures forment en effet une sorte de vivier où il est facile de choisir des sénateurs. Cette tendance est tellement forte qu’il faudra en 1666 imposer la présence d’au moins un sénateur piémontais. Le sénat s’est « nissardisé ». Au XVIIIe siècle la tendance s’inverse complètement : sur une cinquantaine de sénateurs, ne comptons pas les premiers présidents, 35 environ sont Piémontais, une quinzaine sont Niçois et cinq ou six Savoyards. Cette tendance se confirme après 1814.
 
Carrières sénatoriales
            Ces fonctions de sénateur, d’avocat général et d’avocat des pauvres sont assimilables à des offices en ce sens qu’elles ont un caractère public et qu’elles confèrent un statut. On sait qu’en France ces fonctions ont évolué à partir de Louis XI vers une stabilité de plus en plus marquée jusqu’à prendre un caractère patrimonial. Rien de tel dans les États de Savoie. Les souverains ont toujours combattu cette tendance, même si on constate dans les années 1660-1680 une nette poussée en faveur de la patrimonialisation. L’État vend des charges et plusieurs ordonnances accordent aux magistrats la faculté de disposer de leur charge moyennant finance. On peut y voir un effet de la faiblesse du pouvoir ducal pendant la deuxième partie du XVIIe siècle. On préfèrera plutôt y voir une conséquence de la forte influence française à une époque où la Maison de Savoie est étroitement liée à la France, au plan diplomatique et dynastique.
            Cette absence de vénalité n’empêche toutefois pas une transmission familiale des charges. Plusieurs techniques le permettent : expectatives, survivances, unions, coadjutoreries. Ce n’est jamais le cas pour la charge de premier président.
            Les souverains de la Maison de Savoie ont ainsi conservé la maîtrise non seulement des nominations mais aussi des affectations. En effet tous ces magistrats peuvent être mutés d’un sénat à l’autre, en Savoie, en Piémont, voire en Sardaigne après la constitution du royaume de Sardaigne en 1720, soit aussi dans un des consulats de commerce, à Turin ou à Nice, soit encore à la Chambre des comptes de Turin. Mieux même, les mutations peuvent concerner un détachement dans une administration non judiciaire, une intendance générale par exemple, ou une commission. En ce sens, on peut considérer que les sénateurs forment un grand corps de l’État, le premier même.
            Ces mutations ne sont pas toujours accueillies avec empressement. L’exemple de Nice est intéressant. Les magistrats piémontais estiment que le poste est trop éloigné de Turin et que la vie y est chère. Le souverain doit parfois faire preuve d’autorité ou offrir des compensations. Mais pour un début de carrière, il est parfois intéressant d’accepter un poste à Nice, le plus souvent pour un temps limité à trois ans. Pour le poste de premier président, le passage à Nice est intéressant. Il laisse espérer l’accès aux plus hautes fonctions à Turin, au sénat ou à la Chambre des comptes.
            Comme en France, comme ailleurs en Europe, ces magistrats occupent les rangs les plus élevés dans l’État et dans la société. Les sénateurs sont nobles soit par naissance soit par leur entrée en fonction qui leur confère la noblesse personnelle. D’ailleurs tous sont docteurs en droit et, par là même, nobles. Quelques-uns sont titrés mais presque tous, surtout au XVIIIe siècle, sont seigneurs de fiefs dans le comté de Nice, en Ligurie, en Savoie ou en Piémont. Cela leur permet de consolider leur noblesse sénatoriale personnelle en noblesse héréditaire et familiale. Cette position éminente des sénateurs rejaillit évidemment sur l’ensemble de la juridiction et profite à tout son personnel.
            Les solennités qui rythment l’activité de la cour soulignent cette éminente position. Aucune institution mieux que le sénat ne symbolise la puissance publique et le service du prince. Sa présence au cœur de la ville le rend proche du peuple. Presque accessible. Il est la référence des ambitions familiales. Les exemples de promotion sont nombreux. Le passage du commerce aux fonctions judiciaires, même les plus modestes, est une caractéristique de l’histoire sociale de Nice à l’époque moderne. C’est probablement d’ailleurs une cause majeure de la désaffection des familles niçoises les plus notables pour le commerce à partir du XVIIe siècle.
 
Évolution et compétences
 
            L’histoire du Sénat de Nice est longue de deux siècles et demi. Cette longévité est remarquable. Elle doit être soulignée. Le cadre départemental actuel par exemple dépasse à peine les deux-cents ans. Le sénat a évidemment dû affronter pendant toutes ces années plusieurs tempêtes politiques et maints réaménagements. Une petite histoire de l’institution s’impose.
            Commençons par l’histoire politique. Quatre événements politiques majeurs ont marqué l’histoire du Sénat de Nice.
 
La régence de Maurice de Savoie
            Le premier est la régence du cardinal Maurice de Savoie à la fin des années 1630. Les choix pro-français de la régente Marie-Chrétienne, sœur de Louis XIII, Madame royale, ont été contestés par ses deux beaux-frères Thomas et Maurice. Une guerre civile s’en est ensuivie opposant « Madamistes » et « Principistes ». Nice fit le choix des princes et Maurice vint s’installer à Nice en 1639 pour y établir une régence. Nice devient alors une capitale dissidente. Le sénat a dû prendre parti. Le premier président Losa a été contesté et Maurice appuyé par les autorités municipales a rapidement pris le dessus. Il favorise le sénat, accroît le nombre de ses officiers et restaure le collège des docteurs créé par son grand-père Emmanuel-Philibert en 1559. Maurice conclura en 1642 un accord avec Madame royale mais demeurera à Nice encore pendant 18 ans comme gouverneur investi des plus larges pouvoirs.
            Cette période correspond à un net développement du sénat. Le nombre de charges double et les Niçois accèdent en nombre aux postes sénatoriaux. C’est l’époque où s’illustre Honoré Leotardi, l’auteur d’un très célèbre traité sur l’usure qui fait référence en Europe jusqu’au milieu du XVIIIe siècle.
C’est aussi l’époque où le sénat quitte la maison Maletta et s’installe, en 1655, dans le palais de la Gabelle du sel. Le bâtiment s’élève sur trois étages. La porte d’entrée ouvre au nord. À l’extérieur, une loggia, qu’on peut encore voir aujourd’hui, sert aux cérémonies publiques. Les prisons sont aménagées contre le bâtiment en pied de colline. C’est aussi à cette époque, en 1659 qu’une chapelle est construite à côté du palais du sénat. Elle est dévolue aux pénitents de la confrérie du Saint-Suaire, actuellement dite « des pénitents rouges » mais les sénateurs y prennent leurs habitudes et la chapelle devient aussi celle du sénat. C’est là en particulier qu’est célébrée le 16 novembre à l’occasion de la rentrée judiciaire la messe du Saint-Esprit. Les sénateurs y font leur entrée en robes rouges au chant du Veni Creator. Le palais du sénat fera l’objet de deux extensions, en 1701 et en 1763. La chapelle sera réunie au palais du sénat en 1765 par une galerie voûtée.
 
La protection de Louis XIV
            Le deuxième événement est la double occupation française de la fin du règne de Louis XIV, celle de la guerre de la Ligue d’Augsbourg de 1691 à 1697 et celle de la guerre de Succession d’Espagne de 1705 à 1713, soit en tout pendant douze ans. La première leçon qu’il faut tirer de ces événements est institutionnelle. Louis XIV maintient le Sénat de Nice dans toutes ses compétences et rejette les revendications du Parlement d’Aix qui prétendait que le territoire conquis faisait partie de son ressort.
La seconde est politique. Louis XIV maintient les sénateurs dans leurs fonctions. Il n’écarte que le premier président pour le remplacer par un français, le provençal Lombard de Gourdon. La politique de francisation n’est pas frontale mais elle est assez marquée pour susciter l’opposition des sénateurs niçois, particulièrement celle de Dalamassi doyen des sénateurs et Constantin chef du parquet général. Lors du retour sous la souveraineté de Savoie cette résistance sera récompensée : deux promotions méritent d’être mentionnées : d’une part celle du sénateur Jules-César Lascaris qui sera nommé premier président du sénat de Casal en Montferrat ; d’autre part celle du second président Jérôme-Marcel de Gubernatis nommé grand chancelier des États de Savoie, c’est à dire ministre de la Justice.
 
Épisodes révolutionnaires, suppression et restauration
            Le troisième événement marquant de cette histoire regroupe les épisodes mouvementés, voire dramatiques, de la vie du sénat de 1792 à 1797 : l’entrée des Français à Nice en septembre 1792 provoque la fuite de tout le personnel de la cour vers Saorge d’où on compte bien poursuivre l’administration des parties du ressort non conquises par les Français. On a seulement eu le temps de rassembler le nécessaire, dont les archives. L’activité de la cour se poursuit pendant toute la Guerre des Alpes, pendant quatre ans, sous la direction de Clément Corvesi. Mais le travail est de plus en plus difficile. La juridiction doit se replier d’abord à Bourg-Saint-Dalmas, puis à Carmagnola et enfin à Turin. Le traité de Paris signé le 15 mai 1796 sonne le glas de l’institution.
            Le quatrième événement est la restauration du sénat à la chute de l’Empire napoléonien en 1814. Il s’agit d’une restauration intégrale. Le sénat retrouve toutes ses prérogatives et compétences antérieures à 1792, judiciaires et aussi normatives, ce qui est particulièrement remarquable. Le seul changement concerne l’étendue de son ressort. Celui-ci est étendu à la partie de la Ligurie située entre Vintimille et Porto Maurizio, ville voisine de l’ancienne enclave d’Oneglia. Ce territoire correspond à peu près à l’actuelle province d’Imperia. Cette extension a été rendue possible par le rattachement de l’ancienne République de Gênes aux États de Savoie en 1814. Cette restauration du Sénat à Nice dans des conditions aussi favorables permet de souligner deux aspects. D’une part, le rétablissement de l’institution n’a pas soulevé la moindre difficulté ; d’autre part, l’amputation du ressort de l’ancienne haute juridiction génoise, rétablie sous la forme d’un « Sénat de Gênes », est un acte politique particulièrement fort. Turin a en cette occasion nettement marqué sa préférence pour Nice.
            Passons à l’histoire institutionnelle. Sur ce plan l’histoire du Sénat de Nice est marquée par deux événements.
 
Le Consulat de mer, cour souveraine
            Le premier est l’extension des compétences du Consulat de mer, le tribunal formé au début du XVIIe siècle pour juger toutes les affaires commerciales et maritimes. Ses appels étaient portés devant le sénat et c’est le sénat qui assurait l’application des lois et la mise en œuvre des règlements dans toutes ces matières, qu’il s’agisse des règlementations professionnelles, de l’administration des franchises portuaires ou de la police maritime. Cette situation est bouleversée en 1749. Le Consulat de mer accède au rang de cour souveraine, c’est-à-dire qu’il obtient la connaissance du dernier appel et la mise en œuvre de la règlementation. Le sénat n’a pas protesté. Il aurait pu demander par exemple la création d’une deuxième chambre spécialisée dans les questions commerciales et maritimes. Mais le choix de Turin préservait la spécificité de la juridiction commerciale. On avait d’ailleurs pris toutes les précautions : il était prévu que le premier président du sénat soit aussi le chef de la juridiction commerciale et que des sénateurs puissent siéger au Consulat. Enfin, précaution supplémentaire, on nommait à la tête du sénat un fidèle parmi les fidèles, le savoyard Pierre-Louis Mellarède, neveu du célèbre intendant général de Nice Pierre Mellarède en poste cinquante auparavant. Chacun à Nice se souvenait encore de la bataille juridique qu’il mena contre la ville de Nice pour briser ses résistances fiscales. Ceci dit, institutionnellement parlant, les deux cours étaient bien indépendantes. Elles n’étaient pas égales pour autant. Le protocole le montre bien. Il n’empêche qu’une bonne partie de l’activité règlementaire et judiciaire passait au Consulat sans qu’on puisse considérer pour autant que le Consulat faisait fonction de chambre commerciale du sénat. Le Consulat a au demeurant toujours été matériellement séparé du sénat. Il siégeait avant la Révolution dans l’hôtel de ville, place Saint-François, et dans un palais proche du cours Saleya à la Restauration.
 
L’intendance générale de Nice
            Le deuxième événement institutionnel est la mise en place d’une intendance générale, c’est à dire d’un cadre nouveau d’administration territoriale. La nomination d’un intendant à Nice en 1688, Louis Morozzo, marque en effet un tournant dans l’histoire institutionnelle du sénat. L’institution de l’intendance est connue en France depuis le début du XVIIe siècle. Elle y a fait l’objet de nombreuses critiques, particulièrement à l’époque de la Fronde, mais elle a perduré faisant la preuve de son efficacité administrative et fiscale. Elle est reprise par la Maison de Savoie et va devenir entre les mains de Victor-Amédée II un redoutable moyen de centralisation. L’œuvre de Pierre Méllarède dans le comté de Nice illustre cette efficacité au service du prince, pour faire céder les résistances fiscales de la ville de Nice, pour mettre en ordre les droits féodaux, pour moderniser l’administration et pour organiser les finances communales. L’action sera poursuivie pendant tout le XVIIIe siècle.
Tout cela s’est fait au détriment du sénat. Ses compétences normatives ont reculé dans plusieurs domaines, en matière économique, en matière fiscale et en matière administrative. La tutelle des communautés d’habitants a changé de nature, la gestion des forêts a été rationalisée, l’administration des fermes fiscales s’est durcie, etc. La France a connu tout cela à la même époque. Mais les parlements ont protesté. Ils ont engagé une lutte ouverte contre tous les gouvernements de Louis XV. Charles-Emmanuel III, son contemporain (1730-1773), n’a pas rencontré les mêmes difficultés. Les cours souveraines ont obéi. Le réformisme, le buon governo comme disaient les Turinois, a pu se développer dans tous les domaines, la fiscalité directe, le cadastre, l’administration communale, la législation commerciale, la rénovation féodale, la règlementation douanière, etc. Les sénats se sont parfaitement adaptés à cette nouvelle politique, en y collaborant bien sûr, mais aussi en y prenant directement leur part dans plusieurs domaines administratifs dont ils gardaient la direction, comme les affaires religieuses ou les questions frontalières.
 
La fin du Sénat de Nice
 
Du sénat à l’éphémère cour d’appel
            La restauration du sénat en 1814 est, on l’a vu, un événement remarquable. Mais ce rétablissement était-il appelé à durer ? La présence française à Nice, en Piémont, en Ligurie, en Savoie pendant une vingtaine d’années a laissé des traces dans les esprits. Nombreux sont les politiques et les juristes qui ont ainsi appris le droit français à la faculté de droit de Turin à l’époque de l’occupation française. Certains ont exercé des fonctions judiciaires sous l’Empire, à l’époque du Grand Empire, lorsque Turin était chef-lieu du département du Pô et siège de cour d’appel. L’influence française était encore plus forte dans les territoires de l’ancienne République de Gênes.
Deux conceptions de la justice vont ainsi s’affronter après 1814. L’une, traditionnelle, confie aux cours souveraines l’exercice plénier de la justice et la participation à la formation et à l’application des lois et des règlements. Sans cour de cassation et sans conseil d’État.
 L’autre, française, limite la fonction de ces cours à la seule justice et les place en situation de totale dépendance législative, d’abord en les plaçant sous le contrôle d’une cour de cassation ensuite en transférant leurs compétences législatives et règlementaires à un conseil d’État. Cette seconde conception s’affirme progressivement dans les États de Savoie.
            La première étape de ce changement est la création par Charles-Albert au tout début de son règne, le 18 août 1831, d’un Conseil d’État chargé du conseil législatif et de l’élaboration des lois. La deuxième étape est celle du Code civil promulgué en 1837 sur le modèle du Code civil français. L’article 17 y dispose que les sentences des magistrats n’auront plus force de loi. C’est la fin de la jurisprudence des sénats. La troisième est celle de la création de la Cour de cassation le 30 octobre 1847. Les sénats sont ainsi réduits à de simples cours d’appel. Seul leur nom de sénat rappelle encore l’antique institution. Pas pour longtemps d’ailleurs puisque le Statuto du 4 mars 1848 remplace l’appellation par celle de cour d’appel, réservant l’appellation « Sénat » à la chambre haute du nouveau parlement bicaméral.
            C’est donc la Cour d’appel de Nice qui prend la suite du Sénat de Nice, dans les mêmes locaux. Aux yeux du public, elle conserve toute la considération dont bénéficiait le sénat. Elle apparaît toujours comme l’institution la plus emblématique de la ville, celle qui fait d’elle une capitale régionale. C’est cette institution qui est supprimée au printemps 1860 avec le rattachement de la province niçoise à la France. Le Tribunal de première instance et la Cour d’assises s’installent dans les locaux du sénat. Ils y resteront pendant douze ans, jusqu’à la construction d’un palais de justice en 1892, celui que nous connaissons. Le bâtiment de l’ancien sénat est alors vendu par l’État à l’Œuvre de la bouchée de pain et de l’asile de nuit fondée par Jules Gilly, un négociant niçois. Le bureau de bienfaisance de la ville de Nice prendra le relai en 1948. L’asile de nuit fonctionnera dans ces locaux jusqu’à une date très récente. L’Abbé Royal, directeur puis aumônier de 1969 à 2006, a marqué de sa personnalité l’activité de l’établissement. Avec, l’abbé Royal, Jules Gilly et d’autres, le palais du sénat, temple de la Justice, est devenu pendant plus de cent ans le temple de la Charité.
 
L’étrange silence des Niçois
            Revenons à la suppression de la cour d’appel. Cette décision n’a pas fait l’objet d’un débat en 1860. Il est apparu normal à l’époque qu’on ne maintienne pas cette juridiction pour un ressort limité à la seule province de Nice ou même au nouveau département des Alpes-Maritimes composé de cette province et de l’arrondissement de Grasse détaché du département du Var. La partition de l’ancienne région niçoise, résultat de l’amputation des territoires ligures, portait ainsi un coup fatal à la cour d’appel. Ce n’est qu’au cours des années qui suivent que, timidement, des voix s’élèveront contre cette suppression et demanderont la création d’une cour d’appel ou au moins une délocalisation de la cour d’Aix-en-Provence. On sait que toutes les démarches furent des échecs.
            Mais la vraie raison de la suppression de la cour d’appel de Nice est-elle bien celle qui est habituellement avancée ? On oublie trop facilement de rappeler que les Niçois eux-mêmes n’ont pas demandé son maintien en 1860. Là est la véritable raison. Pourquoi donc les Niçois tant attachés à l’institution ancestrale n’ont-ils pas réclamé son maintien ? Une analyse des positions en présence à Nice un mois avant le plébiscite des 15-16 avril 1860 fournit les éléments de réponse.
            Trois tendances s’opposent alors, celle des « italianissimes » partisans inconditionnels de l’Unité de l’Italie, celle du « parti italien », favorable au maintien de Nice sous la souveraineté de la Maison de Savoie et celle du « parti français » favorable au rattachement à la France. Ces derniers, minoritaires ont depuis plusieurs mois mené une intense campagne en faveur de ce rattachement, à une époque, fin 1859, où le sort de Nice, à la différence de la Savoie, n’était pas encore réglé. Napoléon III hésitait en effet à réclamer Nice comme contrepartie de son aide contre les Autrichiens, d’une part parce que les Anglais voyaient d’un très mauvais œil un tel rattachement et d’autre part parce que la diplomatie française est encore en 1859 favorable à une Italie confédérée sous influence française. La pièce essentielle de cette politique visait à placer Napoléon-Jérôme, neveu de l’Empereur, sur le trône de Toscane à la place du grand-duc Ferdinand IV. Les partisans de l’unité italienne font échouer ce projet à l’automne 1859.
            Cet échec relance l’idée d’un rattachement de Nice à la France. Nice devient alors la contrepartie d’une avancée piémontaise en Italie centrale, prémisse d’une unification de la péninsule. Mais pour que cela soit possible, il faut préalablement réussir le plébiscite et donc rallier le parti italien à cette idée. Le roi Victor-Emmanuel II et Cavour réussissent à convaincre les personnalités de ce parti, François Malausséna, le maire de Nice en tête, leur demandant ce sacrifice par fidélité à la dynastie. Le « parti italien » fera ainsi campagne sans réticence pour le « oui ». Les « italianissimes » seront marginalisés. Cela donnera un résultat unanime en faveur du rattachement. Dans toutes ces tractations pré-électorales il n’a jamais été franchement question de la cour d’appel. Les envoyés spéciaux de Napoléon III à Nice, Pietri et son adjoint Rapetti, ont certes promis dans leurs entretiens privés que la cour d’appel serait maintenue. Mais aucun n’a jamais fait de déclaration officielle.
            Après le vote, lorsque les premiers doutes sur le maintien de la cour d’appel commencent à poindre, on aurait pu s’attendre à une réaction. Il n’en a rien été. Il était pourtant question qu’une délégation de notables niçois se rende à Paris pour une rencontre solennelle au palais des Tuileries en présence de l’Empereur. Les Savoyards avaient formé une telle délégation et avaient été reçus le 31 mars. Le principal objectif était le maintien de la cour d’appel de Chambéry menacée par un rattachement des deux départements savoyards à la cour d’appel de Grenoble. Les deux parties de la Savoie, celle d’Annecy et celle de Chambéry, souvent antagonistes, y étaient unies et avaient parlé d’une même voix. À Nice, rien de tel. Pourquoi ?
 
Les ressorts cachés du Plébiscite de 1860
            Première constatation, les pro-français ne sont guère intéressés par la cour d’appel. Ces militants sont des commerçants, souvent liés aux intérêts marseillais. Le rattachement à la Cour d’appel d’Aix-en-Provence ne leur pose pas de difficultés. D’autant plus qu’ils ne portent pas beaucoup d’estime au milieu judiciaire niçois dont ils sont intellectuellement et sociologiquement coupés. La correspondance qu’Auguste Carlone, le chef du « parti français », a entretenue avec quelques proches durant l’année 1860 éclaire parfaitement cet état d’esprit.
            Le « parti italien » à l’inverse est mené par ces milieux judiciaires, avocats en tête. Malausséna par exemple est un avocat. Mais eux ont d’autres raisons de ne pas réclamer le maintien de la cour d’appel. Avant le vote, ils n’ont aucun intérêt à en faire un thème de campagne. Cela pourrait alimenter une surenchère avec les « italianissimes » et ainsi placer Pietri en situation délicate. La fidélité dynastique imposait qu’on aille jusqu’au bout de sa logique, celle d’un plébiscite réussi. Après le vote le désarroi a gagné les milieux judiciaires niçois. Sans relais parisiens, il leur était difficile de prendre de fortes initiatives. Pour ces Niçois, même la langue faisait obstacle. Les Savoyards, francophones, étaient dans une position plus favorable. Louis Lubonis, ancien conseiller à la cour d’appel de Nice, gouverneur provisoire au moment du plébiscite et personnalité importante du « parti italien », a fait l’expérience de ces difficultés parisiennes après son élection comme député en décembre 1860. Il eut beaucoup de difficultés à faire entendre la voix de Nice à Paris.
            Sans doute. Mais il n’est pas interdit de faire un peu d’uchronie et de conjecturer sur une alliance de Carlone et de Malausséna. Ainsi composée, la délégation niçoise aurait su plaider la cause de la cour d’appel et Napoléon III aurait, sans difficulté, étendu son ressort vers Draguignan et vers Digne. On imagine mal les magistrats d’Aix s’y opposer et entrer en résistance.
 
***
            La Cour d’appel de Nice a ainsi été sacrifiée sur l’autel du Rattachement. Ce sacrifice, ce ne sont assurément pas Carlone et ses amis du « parti français » qui l’ont fait. Ceux qui l’ont subi sont tous les Niçois qui dans un silence impressionnant ont accepté le nouvel ordre des choses : d’une part, tous ceux qui comprenaient que leur place n’était plus à Nice mais dans l’Italie nouvelle et qui ont ainsi payé le prix d’un choix déchirant en quittant leur petite patrie niçoise ; d’autre part, tous ceux qui restaient à Nice et dans le comté et qui comprenaient que cette suppression scellait le déclassement régional de Nice. Il ne leur restait que l’espoir d’une future restauration de la cour d’appel. Plusieurs demandes du Barreau de Nice et du Conseil général des Alpes-Maritimes ont entretenu l’espoir. Il faudra un jour faire l’histoire de ces démarches et de leurs échecs pour reprendre le fil interrompu de l’histoire du Sénat de Nice.
 


[1] Pour les sources et les références, voir la bibliographie du Sénat de Nice en fin d’ouvrage. On peut ajouter pour la dernière partie de cette étude, Michel Bottin, « Le parti français après l’annexion. Chronique de la vie politique niçoise d’après la correspondance d’Auguste Carlone (juin-décembre 1860) », in Nice Historique, 2010, pp. 192-241.

 


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